Édition du 3 décembre 2024

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Écosocialisme

Principe No.3

Eviter le piège techno-scientifique pour repolitiser la transition énergétique

Nous poursuivons la publication d’une importante brochure d’ATTAC-France, "La transition énergétique dans une perspective altermondialiste" Nous publions cette semaine le chapitre intitulé : Principe no. 3 : "Eviter le piège techno-scientifique pour repolitiser la transition énergétique".

S’interroger avec sincérité sur notre futur énergétique impose d’aller plus loin que le débat techno-scientifique dans lequel veulent nous confiner ceux qui savent, qu’ils soient de véritables spécialistes et techniciens de l’énergie ou pas. En France, ce sont quelques hauts fonctionnaires et industriels issus du Corps des Mines qui confisquent ce débat, maintenant les citoyens éloignés d’un sujet jugé trop complexe et trop technique. Les résultats d’une telle dépossession plaident pour une reprise en main citoyenne de notre avenir énergétique.

Aucun miracle techno-scientifique ou industriel ne permettra de résoudre les défis énergétiques du XXIe siècle de manière soutenable sur le plan écologique, dans le temps et dans l’espace, socialement juste, égalitaire entre les populations de la planète.

La transition énergétique, ce n’est pas le réchauffement ou le nucléaire ! Ni le nucléaire, ni la géo-ingéniérie, ni la capture et le stockage de carbone, pas plus que le développement industriel à marche forcée des énergies renouvelables ne permettent de répondre à l’ensemble de ces défis. Abandonner le rêve prométhéen de maîtrise de la nature permettrait d’éviter de tester grandeur nature de nouvelles technologies non maîtrisées, alors que la plupart des installations énergétiques ont a minima des implications sur des dizaines d’années. Voire sur des centaines ou des milliers d’années comme l’énergie nucléaire ou les projets de géo-ingéniérie [1], visant par exemple à injecter des particules dans l’atmosphère pour réfléchir les rayons du soleil, inonder les océans de nanoparticules, recouvrir les déserts de plastique.

Il n’existe pas de choix techno-scientifiques qui n’aient pas d’implications, souvent extrêmement lourdes, sur les structures sociales, économiques, culturelles, éducatives et étatiques d’un pays [2]. Questionner, un certain nombre de réalités techno-scientifiques posées comme de simples évidences par les spécialistes nécessite donc de transformer considérablement le débat énergétique en repartant des besoins des populations et des exigences écologiques. La politique de l’offre, qui consiste à accroître coûte que coûte l’offre énergétique, quelles que soient les techniques utilisées, devrait donc être abandonnée. Pour y contribuer, un processus de détechnicisation et de repolitisation de l’énergie doit s’ouvrir et se généraliser. La transition écologique et sociale ne se fera pas sans les populations, sans l’implication du plus grand nombre.

Parce que la teneur et les exigences de la transition écologique et sociale nécessite l’implication, les savoirs, l’esprit critique et l’intelligence de toutes et tous. L’avenir énergétique de chaque territoire s’appuiera sur un mélange inextricable de savoirs-faire, savoirs profanes, savoirs scientifiques et exigences citoyennes que seules des démarches participatives et coopératives permettront de faire émerger. Plutôt que poursuivre sur la voie de méga projets imposés par des logiques centralisatrices et technocrates, n’est-il pas préférable d’encourager la participation des usagers, des habitants mais aussi des travailleurs dans les décisions d’investissement et de mise en oeuvre des politiques de transition écologique et sociale ? Il s’agirait donc d’encourager, déployer et décupler les trésors d’innovation sociale et citoyenne sur les territoires. Ne plus considérer l’énergie comme une dimension extérieure aux écosystèmes et la réimbriquer dans un vaste système d’interactions écologiques complexes paraît clef. Les contenus et processus de production et transmission des savoirs sur l’énergie doivent donc être largement revus. La démarche actuelle de rédaction de plans climat énergie citoyens ancrés sur des territoires, mêlant savoirs scientifique et citoyens, comme l’exemple des virage-énergie [3] est une excellente première approche.


[1Voir www.bastamag.net/article1765.html et le rapport d’ETC Group Géopiraterie : argumentaire contre la géo-ingénierie, www.etcgroup.org/upload/publication/pdf_file/ETC_geopiracy_fr.pdf

[2Voir par exemple Petrocratia, La démocratie à l’âge du pétrole, Timothy Mitchell, éd. Ere.

[3Voir celui du Nord-Pas-de-Calais (www.virage-energie-npdc.org/), de Pays de la Loire (http://virageenergieclimatpdl.org/) ou encore d’Ile-de-France (http://virage-energie-idf.org/)

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