Il a, à son palmarès, les tentatives de réintégration à l’Église des intégristes comme Mgr Lefèbvre, qui n’ont d’ailleurs pas réussies. Il a aussi fait des déclarations choc sur l’abstinence sexuelle et le port du condom, qu’il a dû nuancées en ouvrant la porte au port du condom pour éviter la transmission du SIDA. Il associe dans un discours l’islamisme à la violence et doit se reprendre en tentant de créer des liens avec cette religion. Pour couronner ce règne peu édifiant éclate tout le scandale de pédophilie aux États-Unis et dans plusieurs pays d’Europe dont l’Irlande. Il doit prononcer un discours de pardon pour tenter d’apaiser les victimes.
Ce règne réactionnaire prendra-t-il fin avec la démission de Benoit XVI ? Espérer que oui, c’est s’en tenir au bilan superficiel que l’on vient de faire. Benoit XVI est certes reconnu pour ses positions ultra-conservatrices, mais il n’a fait que poursuivent l’œuvre entamé par Jean Paul II. Pourtant il porte une image plus à droite que le fameux bon pape.
La présence de l’Opus Dei
C’est avec le pape Jean-Paul II que l’Opus Dei, cette organisation d’extrême droite, prend de l’ampleur dans les affaires du Vatican. Jean Paul II nomme systématiquement des membres de l’Opus Dei dans son entourage.
« Aujourd’hui, l’Opus est tout-puissant à Rome. Son ascension a été couronnée par la béatification de Mgr Escriva de Balaguer (fondateur en 1928 de l’Opus Dei note de cmg) par Jean Paul II - un ami de longue date de l’Oeuvre - en 1992, dix-sept ans seulement après sa mort, à l’issue d’un procès expéditif, où seuls les témoignages positifs ont été retenus. Déjà évêque de Cracovie, Mgr Karol Wojtyla venait à Rome à l’invitation de l’Opus, qui l’hébergeait au 73, viale Bruno-Bozzi, dans une belle résidence de la banlieue cossue de Rome. L’Opus a continué à se montrer généreux envers le pape polonais, par exemple en participant au financement du syndicat Solidarnosc.
Le cardinal Wojtyla était le candidat de l’Opus à la papauté. C’est le cardinal König, archevêque de Vienne et proche de l’Oeuvre, qui a joué un rôle déterminant dans son élection. Outre le changement de statut et la béatification d’Escriva - deux décisions qui ont soulevé une vague de critiques à travers le monde -, le pape s’est entouré de membres de l’Opus. Parmi ses proches collaborateurs, on peut citer ses quatre chapelains, Joachim Pacheco, Klaus Becker, Fernando Ocariz et Felipe Rodriguez, son porte-parole laïque, numéraire de l’Opus, M. Joaquin Navarro Valls, et le cardinal Martinez Somalo, ancien substitut proche de l’Opus. M. Alberto Michelini, député national de l’ex-Démocratie chrétienne et membre de l’Opus, est conseiller du Vatican pour les questions de télévision et M. Gianmario Rovero, lui aussi membre, est conseiller financier. » http://www.monde-diplomatique.fr/1995/09/NORMAND/1804
Jean-Paul II, d’origine polonaise, avait dans ses objectifs politiques la lutte contre le communisme. L’Opus Dei, dès sa fondation à Madrid défendait les mêmes idées réinteprétant les valeurs chrétiennes.
« La première perversion fut la « cléricalisation » de l’Oeuvre. Elle se prétend toujours « laïque » mais ce sont les prêtres qui détiennent le vrai pouvoir et occupent tous les postes de commandement. Et les non-clercs, qui représentent 98 % des membres, sont présentés comme « des gens ordinaires, qui vivent dans le monde » mais ressemblent plus à des religieux, par leurs « voeux » (rebaptisés « liens contractuels » ) de pauvreté, chasteté et obéissance, qu’à des laïcs…..
La deuxième perversion fut politique. Le jeune Escriva de Balaguer vécut la guerre civile en Espagne comme une lutte entre catholiques et communistes, en qui il voyait l’incarnation du mal. Sa vision du monde en fut déformée et, tout comme Pie XII, il minimisa l’horreur du nazisme, et même la gravité de l’holocauste, y voyant un rempart « providentiel » contre le communisme…..
La troisième perversion fut théologique. D’abord, l’accent exclusif mis sur « la sanctification par le travail » (9) favorise le culte de la réussite matérielle et le règne du capitalisme libéral. Ensuite, l’Opus est tombé dans le piège de l’intégrisme. Le théologien Urs von Balthasar (un des maîtres à penser de Jean Paul II qui ne saurait être soupçonné de progressisme) a décrit l’Opus Dei comme "la plus forte concentration intégriste dans l’Église (10)". « L’intégrisme, écrit-il, s’efforce pour commencer d’assurer le pouvoir politique et social de l’Église, en recourant à tous les moyens visibles et cachés, publics et secrets. http://www.monde-diplomatique.fr/1995/09/NORMAND/1804
L’esprit du concile et les idéaux de la théorie de la libération n’ont pas bonne vue au Vatican. Ce qu’on voit, c’est une lente mais sûre montée de la droite intégriste,qui a commencé bien avant l’arrivée de Benoit XVI. Et cette puissance est loin d’être remise en question. Il est donc plus que probable que le prochain pape devra se situer dans cette lignée politique.
C’est là que la candidature du Cardinal Marc Ouellet prend son vrai sens. Il est digne successeur de cette lignée. Son passage au Diocèse de Québec est loin d’avoir été marqué par l’ouverture.
Une démission surprise ou provoquée ?
Les raisons de santé ont compté dans la démission du pape. Mais il faut voir que la direction du Vatican est en crise. Le scandale des documents dérobés par le majordome ont fait les choux gras des journaux puis ont rapidement retombés dans l’ombre. Mais derrière ce vol, ce sont les finances occultes du Vatican qui étaient remises en question. Le majordome alimentait le journaliste Nuzzi qui a mis en lumière, entre autre, les faits suvants :
« De ces documents, le journaliste italien fait son miel et tire son best-seller. Il radiographie et démonte les tortueuses affaires financières de l’Institut pour les œuvres de religion (IOR), la banque du Vatican, impliquée ou suspectée de l’être dans une série de scandales qui ont ébranlé l’Italie depuis les années 70. A commencer par le krach du Banco Ambrosiano, l’institution catholique soupçonnée d’avoir recyclé l’argent sale de la mafia avec la complicité du sulfureux monseigneur Paul Casimir Marcinkus, alors président de l’IOR. L’affaire s’était soldée par la mort, en 1982, de Roberto Calvi, le patron de l’Ambrosiano, retrouvé pendu sous un pont de Londres. Pour éviter les ennuis avec la justice, l’IOR avait fini par verser 240 millions d’euros aux liquidateurs de la banque.
L’institut avait également été impliqué dans le scandale Enimont, du nom de la tentative de fusion, en 1988, entre le colosse pétrolier public ENI et le géant de la chimie Montedison, alors dirigé par Raul Gardini, lequel se suicidera en 1993 alors que l’étau de la justice se resserrait autour de lui. Le rapprochement avorté aurait donné lieu à des versements de pots-de-vin aux partis politiques pour une somme estimée à 75 millions d’euros, une partie de cette somme transitant par les comptes de la « banque de Dieu ». » http://www.liberation.fr/monde/2012/09/28/scandale-au-vatican-le-journaliste-qui-a-allume-la-meche_849665
Cette crise des finances vaticanes se combine avec la crise économique des institutions financières en Europe. Le Vatican devra se serrer la ceinture :
« Avis d’austérité sur les palais pontificaux. Après avoir annoncé en juillet dernier un déficit record de 14,9 millions d’euros pour l’exercice 2011, le Saint-siège s’apprête à sérieusement réduire ses dépenses »http://www.20minutes.fr/economie/1067313-vatican-aussi-contraint-serrer-ceinture
Mais les différents scandales financiers vont obliger la transparence dans les finances. C’est ce que le pape Benoit XVI essayait de faire. Cela allait-il assez vite ? Cela dérangeait-il ? Maintenant le Vatican est au pied du mur. C’est le système financier européen qui ne lui fait plus confiance.
« Le Vatican doit s’en remettre à l’argent liquide depuis le 1er janvier, après que la Banque centrale italienne ait poussé la branche italienne de la Deutsche Bank de cesser d’offrir des services de paiements électroniques au Saint Siège. Cela signifie que les visiteurs des musées du Vatican — ils étaient cinq millions l’an dernier — et du bureau de poste du Vatican doivent payer les billets et toutes les autres transactions en espèces sonnantes et trébuchantes.
Il s’agit d’un inconvénient qui, s’il perdure, pourrait éventuellement affecter les revenus du Vatican, en raison du rôle critique que jouent les entrées d’argent dans les finances du petit État. Par exemple, en 2011, les revenus des musées ont représenté 91,3 millions d’euros, aidant le Vatican à afficher un surplus budgétaire de 21,8 millions d’euros.
La Banque d’Italie a annoncé cette semaine qu’elle n’avait pas eu d’autre choix que d’ordonner le blocage des transactions, puisque le Vatican ne dispose pas de cadre réglementaire bancaire, ou d’alternative reconnue par l’Union européenne en ce qui concerne le blanchiment d’argent » http://finances.ca.msn.com/actualites/le-vatican-surpris-par-des-sanctions-financi%C3%A8res-1
Il nous est difficile de faire une analyse économique détaillée de la situation mais ces quelques éléments nous permettent de démystifier l’Église catholique uniquement porteuse de valeurs. C’est surtout une institution économique et politique qui intervient contre les femmes, les gais et qui se nourrit des mécanismes du capitalisme en parlant du bout des lèvres de la pauvreté. Le prochain pape devra se situer dans ce cadre sinon il ne sera pas élu. Alors tout le verbiage médiatique sur Mg Ouellet , sur Benoit XVI et sur l’Église ne sont que des mensonges qu’on nous sert deux fois plus qu’une.
Chloé Matte Gagné