Tiré du blogue de l’auteure.
Deon Mayer ne donne aucun nom, pas même celui de Jacob Zuma, le président des neuf années perdues pour l’Afrique du Sud, livrée aux appétits gloutons des frères indiens Gupta et de leurs affidés qui ont vidé les coffres de l’état grâce à des stratagèmes et complicité dans tous les rouages de l’Etat, connus sous le nom de « State capture » ou captation de l’Etat, mais tous les personnages sont facilement identifiables.
Les anciens de la lutte qui se retrouvent pour faire un grand nettoyage définitif n’ont rien perdu de leur pugnacité, de leurs talents de stratège, de tout ce qu’ils ont appris dans les pays du bloc soviétique pour démasquer les ennemis de la révolution nationale démocratique et comble du paradoxe, pour échapper aux méchants russes des services secrets de Poutine !
Faut-il ici rappeler que Nelson Mandela a fait un tour du monde de remerciements, mais jamais à Moscou ; c’est le vice président, FW De Klerk qui a fait le voyage.
Avec beaucoup de lucidité, Deon Meyer, fait dire à son inspecteur Benny Griessel, un policier de l’unité d’élite The Hawks, « nous revoilà au temps de l’apartheid : mensonges et trahisons » et évoque au fil des chapitres les turpitudes des grandes entreprises, des banques pour contourner les sanctions imposées par le Conseil de Sécurité de l’Onu, en particulier les ventes d’armes qui se poursuivront en 1999 avec le scandale de l’achat d’armes et équipements militaires pour l’armée sud-africaine ou l’on retrouve les mêmes interlocuteurs. Le scandale « Arms Deal » a été mis à jour par des journalistes d’investigation et des ONG https://blogs.mediapart.fr/jacqueline-derens/blog/010917/apartheid-guns-and-money-tale-profit
Pour ceux qui se sont battus pour la justice et la liberté la pilule est amère et le constat affligeant, ce qui fait dire à Daniel Darret, le vétéran qui reprend de l’embauche avec ses vieux camarades pour sauver le pays : « Il s’est battu pour la démocratie, il a obtenu une kleptocratie ». Le livre toutefois n’est pas négatif parce qu’il y a toujours d’honnêtes gens en Afrique du Sud, des anciens et aussi des jeunes qui n’acceptent pas l’inacceptable.
Le groupe des anciens n’est pas qu’une création littéraire, il existe bel et bien et depuis que Cyril Ramaphosa a promis de mettre fin à la corruption et surtout depuis qu’il a dénoncé « les charognards » qui n’ont pas hésité à faire de l’argent en spéculant sur la fourniture de matériel de protection pour lutter contre la pandémie du Covid 19, la coupe est pleine.
La société civile qui avait si bien su rassembler en 1984 toutes les forces de progrès dans le Front Démocratique uni (UDF) pour abattre le régime d’apartheid pourrait bien remonter au front pour en finir avec la crapulerie qui désespère l’Afrique du Sud et donner un épilogue heureux au livre de Deon Meyer. L’ ancien aumônier de l’ANC, le Père Michael Lapsley, qui a perdu les deux mains et un œil en ouvrant une lettre piégée, expédiée par le Bureau de Coopération civil (CCB), couverture pour une unité spéciale de l’apartheid chargée de liquider par tous les moyens les opposants au régime, vient de résumer le ras–le bol et le dégoût des sud-africains honnêtes et de les appeler à l’action « Combien de temps faudra-t-il pour que les coupables soient jugés, déclarés coupables, expédiés en prison et l’argent volé retrouvé ? » https://www.dailymaverick.co.za/article/2020-09-04-we-all-have-a-role-to-play-in-building-an-ethical-sociey-as-an-antidote-to-corruption/ ?
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