Tiré de Reporterre. Légende de la phot : Sous la chaleur de Mexico, des affiches de Claudia Sheinbaum, candidate de la majorité au pouvoir, appellent à voter à l’élection présidentielle du 2 juin 2024. AFP/Yuri Cortez.
Les derniers sondages le confirment : le Mexique élira sa première « presidenta » (« présidente ») le dimanche 2 juin. « En tant que femme, ça va au-delà de toutes nos attentes », s’émeut Elisa, 26 ans, durant la clôture de campagne de l’ultrafavorite Claudia Sheinbaum. Dans son dernier discours, l’ancienne maire de la capitale (2018-2023) a énuméré les principaux points de son programme. Si les questions d’égalité de genre arrivent dans les premiers, les enjeux environnementaux ne sont évoqués qu’en quinzième position.
Face à elle, Xóchitl Gálvez, la candidate de la coalition de droite, joue souvent du bilan environnemental du président sortant, Andrés Manuel López Obrador (dit « AMLO »), très critiqué. « Xóchitl Gálvez se concentre sur la question climatique et sur une transition vers les énergies propres, analyse Leticia Merino, professeure à l’Université nationale autonome du Mexique et coordinatrice de l’Agenda socio-environnemental 2024. Mais comme d’autres, elle a tendance à réduire les enjeux environnementaux à la seule question climatique. »
Claudia Sheinbaum représente l’alliance de gauche, mais elle est surtout vue comme la dauphine du très populaire président López Obrador. Physicienne de formation et ancienne membre du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), c’est pourtant elle qui semble avoir le plus d’expérience sur les questions environnementales.
L’eau, première préoccupation
Avec des températures en constante hausse (jusqu’à 52 °C), une vague de chaleur ayant déjà fait quarante-huit morts et une sécheresse qui touche 70 % du territoire, le Mexique suffoque. À l’image du Cutzamala, le système de barrages alimentant Mexico en eau, qui fonctionne à moins de 30 % de ses capacités, les ressources en eau s’amenuisent. La perspective de stress hydrique est l’une des principales sources d’inquiétudes des Mexicains et Mexicaines.
Claudia Sheinbaum propose de changer la loi sur la gestion de l’eau, qui assure à l’État fédéral un contrôle total sur la ressource en dépit d’une gérance locale qui favoriserait les inégalités de distribution. Une proposition insuffisante, selon Leticia Merino, puisqu’il est impossible de savoir dans quel sens ces changements seraient opérés.
« Les programmes de Xóchitl Gálvez et Jorge Máynez [candidat du Mouvement citoyen, parti aux intentions de vote très faibles] sont assez pauvres, ils ne parlent presque pas d’environnement, explique la spécialiste. Et pourtant Claudia Sheinbaum n’en dit pas beaucoup plus, il n’y a rien sur la biodiversité ni sur les océans. » La perte de biodiversité et notamment des mangroves augmente pourtant la vulnérabilité face aux événements climatiques, comme avec Otis, ouragan de force 5/5, qui a littéralement détruit Acapulco en octobre 2023.
Mégaprojets
Le bilan de l’administration actuelle joue un rôle considérable dans la campagne. Et le mandat d’AMLO est notamment marqué par de grands projets, dont l’utilité divise : « Leur grande mesure a été de réduire les budgets alloués à la santé, à l’éducation, à l’écologie pour les transférer aux mégaprojets du président, déplore Leticia Merino. Alors que ceux-là violent souvent leurs propres lois sur l’environnement. »
Parmi les projets qui créent la controverse, le Train Maya et ses 1 500 kilomètres de voies ferrées reliant le sud-est mexicain, ayant engendré une importante déforestation et contamination de l’eau, ou le « corridor interocéanique », système de connexion entre les océans Atlantique et Pacifique pour concurrencer le canal de Panama.
Au Mexique, encore près de la moitié de l’électricité produite provient des énergies fossiles et notamment du charbon. Pour amorcer la transition énergétique, Claudia Sheinbaum prévoit de suivre une politique extractiviste et d’exploiter d’importantes réserves de lithium.
Au-delà de l’élection présidentielle, les législatives, locales (9 des 32 États changeront de gouvernement) et municipales rebattront aussi certaines cartes en matière de politiques environnementales.
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