Édition du 19 novembre 2024

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Europe

Danemark : Percée de l’Alliance Rouge-Verte et recul de la droite radicale populiste

Les récentes élections législatives au Danemark, ainsi que les municipales et régionales en Norvège, ont signifié un recul important pour la droite et, surtout, pour l’extrême droite populiste, raciste et islamophobe qui avait jusqu’à présent le vent en poupe dans ces deux pays.

Preuve que la montée généralisée de ces forces en Europe aujourd’hui, à la faveur de la crise, n’est pas linéaire et qu’elle peut être battue en brèche. Au Danemark, avec 6,7% de votes (triplant le nombre de ses élus), l’Alliance Rouge-Verte (1), coalition de la gauche radicale anticapitaliste, a fait une percée importante. Nous reproduisons ci-dessous l’analyse de ses résultats par un camarade du SAP, section danoise de la IVe Internationale active dans cette Alliance. (LCR-Web)

Alors que les élections de 2007 avaient donné des résultats désastreux pour l’Alliance Rouge-Verte au Danemark, les résultats sont cette fois tout à fait différents et significatifs, que ce soit pour la droite ou la gauche.

Tout d’abord, c’est enfin le recul d’un gouvernement de droite qui se maintenait depuis 10 ans au pouvoir et qui semble avec enfin perdu sa crédibilité. Mais ces élections marquent plusieurs tournants. Tout d’abord, Helle Thorning-Schmidt (social-démocrate) sera la première femme à être Premier ministre au Danemark. Ensuite on a pu constater une augmentation significative des formations « radicales », que ce soit l’Alliance Rouge-Verte pour la gauche, ou encore les Libéraux démocrates, qui montrent que le vote à cette fois en partie favorisé les partis au discours clair et sans ambiguïtés.

Le nouveaux gouvernement sera principalement formé par le Parti social-démocrate et par le Parti socialiste du peuple (SF), deux formations qui préparaient un accord gouvernemental depuis plusieurs années déjà. La victoire de la « gauche » reste cependant assez serrée : les partis d’opposition à l’ancien gouvernement de droite n’ont remporté que 89 des 179 sièges au parlement danois (le « Folketing »), en laissant encore 86 à la droite.

En termes numériques, les deux partis de future coalition perdent même en réalité des sièges par rapport aux élections précédentes. Les sociaux-démocrates ont 44 sièges avec 29% des votes, ce qui est leur plus mauvais score depuis ces 100 dernières années, tandis que le Parti socialiste obtient 7 sièges avec 9,2% des votes (alors qu’ils avaient obtenus 13% des votes aux dernières élections : leur recul est donc énorme).

« Venstre » (Parti Libéral) confirme sa position de première formation politique au Danemark avec 26,7% des votes et 47 sièges. S’ils récupèrent une partie de l’électorat du Parti Conservateur (qui perd 8 sièges, avec seulement 4,9% des votes) ; une partie est également récupérée par l’Alliance Libérale qui passe de 9 à 4 sièges.

Ces pertes sont dues au choix d’orientation plus radicale d’une partie de l’électorat. « Endheslisten », l’Alliance Rouge-Verte, est quant à elle passée de 4 à 12 sièges (2) en obtenant 6,7% des votes, tandis que les « Radikale Venstre » (libéraux-démocrates) gagnent 8 sièges, avec un total de 17 (soit 9,5% des voix, contre 5,1% lors des dernières élections).

Ces deux derniers partis ont chacun mené des campagnes avec une ligne claire et sans ambiguïtés. Et, s’ils ont en commun des revendications pour des conditions d’asile et une politique pour les migrants et les réfugiés plus digne et décente, la similitude entre les deux formations s’arrête là.

L’Alliance Rouge-Verte a mené une campagne de défense claire des droits sociaux des travailleurs ; contre le recul de l’âge de la retraite et la détérioration continue des règles concernant les allocations de chômage ; contre la politique menée par le précédant gouvernement et pour un plan radical d’investissements dans les « emplois verts » pour combattre le changement climatique. Les Libéraux démocrates par contre restent sur une ligne très néo-libérale sur toutes les questions de politique économique.

Autre signe important que le discours sur « l’immigration est responsable de tous les problèmes » commence à perdre de l’influence dans le débat politique, c’est le recul de l’extrême droite, qui perd 3 sièges (mais il lui en reste quand même 22).

Que va faire l’Alliance Rouge-Verte avec cette augmentation de son nombre de sièges, vu que cette formation a toujours clairement exprimée son refus de participer à un gouvernement qui ne représenterait pas les intérêts des travailleurs ?

Si l’Alliance Rouge-Verte pensait effectivement connaître une progression dans ces élections, elle ne s’attendait tout de même pas à voir tripler son nombre de sièges, ce qui fait peser sur ses épaules une énorme responsabilité. Cette progression importante reflète le niveau de colère et de désespoir de la population face aux politiques ultra libérales et à la détérioration rapide des acquis sociaux. Mais c’est également le résultat du choix du Parti socialiste de s’allier avec les sociaux démocrates.

L’Alliance a exprimée son intention d’exercer une influence significative sur les politiques du prochain gouvernement à dominance social-démocrate. Mais elle reste également tout aussi claire sur son refus de participer à un tel gouvernement puisque sa politique générale restera dominée par le social-libéralisme. Au Parlement, par son nombre de sièges, l’Alliance Rouge-Verte permettra la formation d’un gouvernement alternatif mené par les sociaux-démocrates. La préférence de l’Alliance va à un gouvernement exclusivement composé des sociaux-démocrates et du Parti socialiste, mais cette option n’est actuellement pas viable.

Soulignons également que l’Alliance a fait le choix positif de mener campagne autour de la figure de sa porte-parole Johannne Schmidt-Nielsen (photo). Mettre ainsi en avant une jeune femme est fortement symbolique de sa volonté de coller avec le monde du travail et des jeunes précaires, en faveur desquels cette coalition des partis de la gauche radicale veut se battre.

Notes

(1) « La Liste de l’unité » (en danois : « Enhedslisten - de rød-grønne », littéralement « la Liste de l’unité - les Rouges et Verts ») a été est fondée en 1989 grâce à la collaboration entre les « Venstresocialisterne » (Socialistes de gauche), le DKP (Parti communiste danois) et le SAP (Socialistisk Arbejderparti, section danoise de la Quatrième Internationale). Elle a obtenu 6 élus au parlement en 1994, puis cinq mandats aux législatives de 1998 et de même en 2001. En 2005, elle en obtenait 6, avant de retomber à 4 mandats en 2007.

(2) Dont deux sont membres du SAP, section danoise de la Quatrième internationale

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