Édition du 17 décembre 2024

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Asie/Proche-Orient

Corée du Sud : l’Assemblée nationale s’oppose au coup de force du président

Le président sud-coréen Yoon Suk-yeol a proclamé mardi la loi martiale, invoquant la menace des « forces communistes nord-coréennes » et dénonçant l’obstruction de l’opposition au parlement. Mais, comme le permet la constitution, l’Assemblée nationale a voté une résolution réclamant sa levée.

Tiré de Europe Solidaire Sans Frontières
3 décembre 2024

Par La rédaction de Mediapart

Pour la première fois depuis 1979, la Corée du Sud est confrontée à l’autoritarisme de son dirigeant. Alors que l’opposition bataillait sur le projet de budget à l’Assemblée nationale, le président Yoon Suk-yeol a décidé de recourir à l’armée pour la museler, en proclamant la loi martiale, tout en s’abritant derrière la menace du frère ennemi nord-coréen.

Mais, quelques heures plus tard, l’Assemblée nationale, où l’opposition est majoritaire, a adopté une résolution réclamant sa levée. Selon la Constitution, dans ce cas, le chef de l’État doit se conformer à cette décision. Le président de l’Assemblée, Woo Won-sik, a ainsi estimé que « le président devrait immédiatement lever la loi martiale ». « La déclaration de la loi martiale n’est plus valide  », a-t-il ajouté, cité par les médias sud-coréens.

Dans un discours télévisé surprise mardi soir, Yoon Suk-yeol, 63 ans, a affirmé que cette mesure était motivée par les «  forces communistes nord-coréennes ». « Sans se soucier des moyens de subsistance du peuple, le parti d’opposition a paralysé le gouvernement, à des fins de destitutions, d’enquêtes spéciales et pour protéger son leader de poursuites judiciaires », a t-il ensuite lancé.

Cette intervention surprise intervient alors que le Parti du pouvoir au peuple de Yoon continue de batailler avec le principal parti d’opposition, le Parti démocrate, sur le projet de budget de l’année prochaine. Les députés de l’opposition ont approuvé la semaine dernière, à travers une commission, un programme budgétaire considérablement réduit.

« Notre Assemblée nationale est devenue un refuge de criminels, un repaire de dictature législative qui cherche à paralyser les systèmes administratif et judiciaire et à renverser notre ordre démocratique libéral », a déclaré M. Yoon. Il a accusé les élus de l’opposition de couper « tous les budgets essentiels aux fonctions premières de la nation qui sont la lutte contre les crimes liés à la drogue et le maintien de la sécurité publique […], transformant le pays en un paradis de la drogue et en un lieu de chaos pour la sécurité publique  ».

Les activités politiques interdites

M. Yoon a poursuivi en qualifiant l’opposition, qui détient une majorité au Parlement, de « forces hostiles à l’État ayant l’intention de renverser le régime  ». Il a assuré que sa décision était «  inévitable ». «  Je rétablirai la normalité dans le pays en me débarrassant de ces forces hostile à l’État dès que possible », a ajouté le président sud-coréen.

Ce dernier est cependant contesté même par son propre parti. Sur son compte Facebook, le chef de la formation du président, le Parti du pouvoir du peuple, Han Dong-hoon, a jugé que « la déclaration de loi martiale du président est une erreur  » et qu’il « œuvrerait avec les citoyens pour l’arrêter ».

Lee Jae-myung, chef du Parti démocrate et qui avait perdu la présidentielle de 2022 face à Yoon, a lancé un appel au peuple pour qu’il vienne à l’Assemblée nationale et marque ainsi son opposition à une mesure qu’il a qualifiée d’«  illégale ». Élu en 2022, le président Yoon Suk-yeol a été affaibli par des accusations de trafic d’influence l’impliquant lui et son épouse. Il a été accusé par l’opposition d’avoir étouffé les enquêtes.

Après le vote de l’Assemblée nationale sur la levée de la loi martiale, Han Dong-hoon et Lee Jae-myung se sont serré la main pour montrer leur unité face au risque de la dictature.

Selon des images des télévisions sud-coréennes, des policiers et des militaires ont été déployés devant l’Assemblée nationale, repoussant des manifestant·es qui voulaient y entrer. Le général Park An-soo, qui a été nommé commandant de la loi martiale, a interdit «  toutes les activités politiques », y compris les rassemblements de citoyen·nes.

Les médias sont également placés sous la coupe des militaires, a déclaré le général dans un décret qui est entré en vigueur mardi soir. Les activités syndicales sont également proscrites. Les personnes qui enfreignent le décret peuvent être arrêtées sans mandat d’un tribunal.

C’est la première fois en quarante-cinq ans qu’un dirigeant sud-coréen déclare la loi martiale. Il faut remonter à octobre 1979, après un soulèvement prodémocratique qui avait été réprimé par l’armée, qui a dirigé le pays jusqu’en 1993. Au total, pendant la dictature militaire, la loi martiale a été adoptée à 12 reprises de 1948 à 1979.

Les États-Unis, grand allié de la Corée du Sud et soutien militaire avec plus de 28 000 soldats basés dans le pays, a indiqué «  suivre la situation de près ». Au lendemain de la nouvelle victoire à la présidentielle de Donald Trump le 5 novembre, le président sud-coréen avait félicité le républicain, disant espérer travailler plus étroitement avec Washington à l’avenir. En rupture avec son prédécesseur Moon Jae-in, Yoon Suk Yeol a adopté une ligne plus dure avec la Corée du Nord, dotée de l’arme nucléaire.

La rédaction de Mediapart

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