Édition du 15 avril 2025

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Arts culture et société

Carnaval

Même en période de crises, des gens rêvent de danser le carnaval.

Port-au-Prince, le 27 janvier 2025- Dans les ruelles vibrantes d’Haïti, entre les échos des coups de feu et les cris d’espoir, une réalité troublante persiste : même en pleine tourmente, la population rêve de danser le carnaval. Ce paradoxe est révélateur d’un peuple résilient, attaché à ses traditions et à sa culture, mais aussi d’une lutte intérieure entre la survie quotidienne et le désir de se libérer, ne serait-ce qu’un instant, des chaînes de la crise.

Le carnaval en Haïti n’est pas une simple fête. C’est un exutoire collectif, un espace où le peuple exprime sa joie, sa colère, ses frustrations et ses rêves à travers la musique, les costumes et les danses. Pour une société meurtrie par la violence des gangs, l’instabilité politique et une pauvreté accablante, le carnaval représente un moment suspendu, un instant où l’on peut oublier les luttes quotidiennes et se réapproprier sa dignité.
Mais ce rêve de carnaval prend une teinte particulière en période de crise. Pour beaucoup, il est un acte de résistance culturelle, une manière de dire que la vie continue malgré tout. Pourtant, il illustre aussi une réalité douloureuse : danser devient un luxe dans un pays où la sécurité, la nourriture et même l’eau potable manquent cruellement.

Les rues, autrefois remplies de chars colorés et de foules en liesse, sont aujourd’hui dominées par la peur. Les gangs armés contrôlent des quartiers entiers, kidnappant et terrorisant la population. Comment organiser un carnaval lorsque se rendre d’un point A à un point B peut être une entreprise mortelle ?

Pourtant, chaque année, des voix s’élèvent pour réclamer cette célébration. Certains y voient un moyen de résister à la terreur et de rappeler au monde qu’Haïti est bien plus qu’un pays en crise. Mais pour d’autres, danser le carnaval en pleine tourmente ressemble à une fuite en avant, une tentative désespérée de masquer des problèmes profonds qui continuent de s’aggraver.

Dans le contexte actuel, le carnaval pourrait être perçu comme un reflet de la société haïtienne elle-même : belle, forte et vibrante, mais brisée et en quête de rédemption. Les chansons carnavalesques, souvent empreintes d’humour et de critiques sociales, témoignent des défis quotidiens et des espoirs d’un peuple qui refuse de se résigner.
Cependant, la persistance du carnaval dans un environnement de chaos soulève une question essentielle : à quel prix le rêve de danser est-il maintenu ? Le carnaval, dans toute sa splendeur, peut-il réellement guérir les blessures d’un pays ou est-il simplement une distraction temporaire qui retarde l’inévitable confrontation avec la réalité ?

Le rêve de danser le carnaval, même en période de crise, est un témoignage poignant de l’esprit haïtien. Mais pour que ce rêve ne se transforme pas en illusion, il est impératif que les priorités nationales changent. La sécurité, la justice et les conditions de vie dignes doivent être placées au centre des préoccupations.

Danser le carnaval ne devrait pas être un acte de bravoure ou de défiance face à l’adversité. Cela devrait être une célébration libre et joyeuse, dans un pays où chaque citoyen peut se sentir en sécurité et espérer un avenir meilleur.
Aujourd’hui, alors que la crise s’intensifie, le rêve de danser n’est pas simplement un besoin de fête, mais un cri silencieux pour la paix, la stabilité et la dignité. Et si le carnaval est un rappel de la force d’Haïti, il doit aussi être une invitation à construire un avenir où ce rêve pourra enfin être dansé sans peur.

Smith PRINVIL

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