Neuf mois après le déclenchement du processus révolutionnaire tunisien et le départ de Ben Ali, l’aspiration à la démocratie a poussé les Tunisiens à participer à ces élections.
À l’heure où cet article est rédigé, les résultats définitifs ne sont pas encore connus et les rumeurs vont bon train.
Une première certitude, l’Assemblée constituante comportera très peu de femmes : seules 7 % des listes avaient en effet mis une femme en numéro 1, y compris parmi les partis faisant de longs discours sur l’égalité des droits entre les hommes et les femmes !
Succès pour Ennahdha
Ce rendez-vous électoral a surtout profité au mouvement islamiste Ennahdha qui arrive largement en tête. Même si ce parti n’a pas participé aux mobilisations ayant fait tomber Ben Ali, il est auréolé du statut de martyrs de ses militants emprisonnés et torturés par milliers sous la dictature. Il a bénéficié par ailleurs de ressources financières colossales, provenant notamment d’anciens riches dirigeants du RCD lui permettant notamment d’entretenir des œuvres charitables lui assurant le soutien de milieux paupérisés.
Ennahdha a aussi profité d’une propagande officielle qui a orienté la campagne sur le thème favori de cette organisation : l’identité arabo-musulmane.
Et si Ennahdha s’allie au CPR de Moncef Marzouki, ces deux formations pourraient détenir la majorité absolue à l’Assemblée constituante.
Notons qu’Ennahdha bénéficie par ailleurs aujourd’hui de l’appui des puissances impérialistes.
Rien d’étonnant pour un parti dont le programme économique est dans la droite ligne des solutions préconisées par le FMI et la Banque mondiale, avec leur cortège de privatisations, de licenciements et de démantèlement des services publics. Rien d’étonnant, en conséquence, à ce que Barak Obama soit le premier à féliciter les Tunisiens du résultat de ces élections. En plus du repli identitaire et des menaces fortes qui pèsent désormais sur les droits des femmes notamment, et qui sont dans le programme d’Ennahdha, les travailleurs qui se sont révoltés aux cris de « un travail est un droit, bande de voleurs » accorderont-ils longtemps leur confiance à un tel parti qui représentera et garantira les intérêts impérialistes en Tunisie ?
Échec pour la gauche radicale
Ce qui ressort aussi, c’est que les organisations de la gauche radicale sont les grandes perdantes de ce scrutin. Elles se sont présentées dispersées à ces élections, chacune pensant incarner à elle seule l’essentiel de la radicalité. Certaines, comme la LGO ont finalement décidé de les boycotter. Résultat, la gauche radicale dispose seulement de 4 élus (3 du PCOT et 1 du Mouvement des Patriotes démocrates).
Développement des luttes ?
Au lendemain des élections, la situation des travailleurs n’a pas changé, et ce sera la principale désillusion pour nombre d’entre eux. Le rôle des militants révolutionnaires sera alors plus déterminant que jamais.
En effet, les luttes seront indispensables face à la poursuite de la politique néolibérale que compte mettre en œuvre Ennahdha, ainsi que les attaques prévisibles contre les droits des femmes.
Les nombreux militants syndicaux et politiques qui avaient plus ou moins déserté le terrain des luttes depuis le début de l’été pour se lancer dans la campagne électorale, auront la lourde tâche d’aider les mobilisations qui ne manqueront pas de se développer.
Commission Maghreb du NPA
(tiré du site du NPA)