Édition du 17 décembre 2024

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Asie/Proche-Orient

A Idleb, pour son 10e anniversaire, les Syriens reprennent les slogans de la révolution

Dix ans après le déclenchement des manifestations pacifiques en Syrie contre le président Bachar al-Assad, Hanaa Dahnine et des milliers d’habitants de la ville d’Idleb ont battu le pavé lundi, criant "liberté" et appelant à la "chute du régime".

Tiré de Courrier international.

Mais après une décennie d’un conflit ayant fait des centaines de milliers de morts, le régime de Damas ne vacille plus et a repris le contrôle de la majorité du pays. A ce titre, une partie de la province d’Idleb et des localités adjacentes constituent les derniers bastions rebelles et jihadistes de Syrie.

"Nous sommes venus renouveler notre engagement, comme nous l’avions fait en 2011 (...), à renverser le régime (du président) Bachar al-Assad", assure pourtant Hanaa, qui avait participé aux premières manifestations il y a dix ans.

A l’époque, la militante croyait qu’un changement était imminent alors que les régimes despotiques en Tunisie, en Egypte et ailleurs dans la région tombaient les uns après les autres.

Mais cela ne fut pas le cas en Syrie. Le soulèvement, réprimé dans le sang, a progressivement muté en conflit meurtrier et dévastateur, avec une multitude d’acteurs et une grande victime : la population.

Cette guerre, entrée lundi dans sa onzième année, a fait plus de 388.000 morts, déplacé et poussé à l’exil plus de 12 millions de personnes, selon l’ONU, causant des destructions massives et dévastant l’économie du pays.

"Nous espérions faire tomber le régime dès le premier jour, mais il a utilisé toutes ses armes contre un peuple innocent pour réprimer la révolution", déplore Hanaa.

"Nous continuerons notre révolution bénie, même si elle doit durer 50 ans", poursuit-elle néanmoins.

"Vie ou mort"

Les manifestants ont scandé des slogans phares du soulèvement populaire qui avait démarré le 15 mars 2011, dont "Liberté, liberté, la Syrie veut la liberté", "Dégage Bachar" ou encore "Le peuple veut la chute régime".

Sur le toit d’un immeuble, des jeunes, entourés de quelques hommes armés encagoulés, ont soulevé des pancartes en forme du chiffre dix, peint aux couleurs du drapeau de la "révolution", adopté par l’opposition au début du soulèvement.

Sur un autre toit à proximité, des dizaines d’habitants ont agité des drapeaux en regardant la place, bondée.

"Il est vrai que nous n’avons rien changé en dix ans et c’est douloureux, mais nous ne pouvons que continuer", affirme à l’AFP Yaman, un manifestant âgé de 30 ans.

"Il ne s’agit pas de futilité, mais d’une nécessité, c’est une question de vie ou de mort", ajoute-t-il.

Après dix ans de tueries et de destructions, Bachar al-Assad se prépare à une élection présidentielle, cet été, qui lui semble déjà acquise.

Lundi, les manifestants n’ont pas caché leur déception face à la réaction de la communauté internationale, dont les promesses en faveur de la liberté et de la démocratie sont restées lettre morte.

"Une décennie de déception internationale" était-il écrit sur une pancarte brandie par un manifestant.

"Souffrances insoutenables"

"Nous sommes ici pour assurer au monde entier que nous ne nous reculerons pas (...) et que nous resterons résolus jusqu’à ce que le régime tombe et qu’il soit jugé par les tribunaux internationaux", affirme Yehya, un manifestant de 28 ans.

La ville d’Idleb avait rapidement rallié en 2011 le mouvement de contestation.

En 2015, la région est tombée aux mains d’une coalition de groupes rebelles et islamistes, dont Hayat Tahrir al-Cham, ex-branche syrienne d’Al-Qaïda alors connue sous le nom du Front al-Nosra.

Le régime, soutenu par l’aviation russe depuis 2015, y a mené plusieurs offensives, dont la dernière en date fin 2019, lui ayant permis de reconquérir la moitié de la province. Un cessez-le-feu est en vigueur depuis mars 2020.

La région abrite environ trois millions d’habitants, dont la majorité ont été déplacés d’autres régions reprises par le régime ces dernières années.

Bien que les combats se soient quasiment arrêtés en Syrie, les plaies restent béantes et la paix lointaine.

"Le monde n’a pas rempli ses obligations vis-à-vis des Syriens" et "les souffrances et le dénuement des personnes à l’intérieur de la Syrie sont insoutenables", a déclaré vendredi le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Filippo Grandi.

Mais pour Ammar, l’espoir n’est pas mort : "Nous continuerons à manifester et à exprimer notre opinion, même si le régime finit par contrôler toute la Syrie".

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