Édition du 19 novembre 2024

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Shell fermée, Québec pousse les prix de l'essence à la hausse

Le cas des prix de l’essence : S’il est un dossier où les consommateurs se font raconter n’importe quoi, autant par les pétrolières que par le gouvernement, c’est bien celui-là.

Les récents événements liés à l’effondrement des poutres dans le tunnel Ville-Marie nous démontrent bien combien il est difficile pour les citoyens d’obtenir toute l’information requise pour se faire une opinion éclairée.

Le cas des prix de l’essence n’échappe pas à cette logique, bien au contraire. S’il est un dossier où les consommateurs se font raconter n’importe quoi, autant par les pétrolières que par le gouvernement, c’est bien celui-là.

Au début des années 80, lorsque les pétrolières avaient des surplus de capacité de raffinage et de grandes réserves de produits finis dans chacune de leurs raffineries, le prix à la pompe était raisonnable. C’était la belle époque de la stabilité des prix pour les consommateurs.

Afin de générer davantage de profits, les pétrolières ont décidé de fermer des raffineries et de ne plus conserver de réserves de produits finis en grande quantité dans leurs raffineries afin de créer la rareté. C’était le début de l’ère du « just in time ».

Cette stratégie a très bien fonctionné puisque les prix à la pompe ont augmenté de même que les profits. Aussi, ne disposant plus de grandes réserves, l’arrêt d’une raffinerie amplifiait la rareté et faisait augmenter les prix à la pompe. Combien de fois, au cours des dernières années, avons-nous entendu le porte-parole des pétrolières dire que les prix à la pompe élevés étaient dus à un manque de capacité de raffinage causé par l’arrêt d’une raffinerie en Amérique ? Le tout accompagné par une demande croissante des pays émergents. Ajoutons la fusion qui a mené en 2008 à la création de la bourse NYMEX, là où se transigent pétrole et produits finis, qui a décuplé la spéculation.

En 2010, récession aux États-Unis, donc ralentissement des activités et nous revoilà avec une surcapacité temporaire de raffinage en raison de la baisse de la demande industrielle. Avant cette crise, les raffineries opéraient à plein rendement et faisaient des profits. Les pétrolières ont néanmoins saisi cette occasion pour fermer d’autres raffineries afin de maintenir leurs profits à des niveaux records.

On peut facilement imaginer les conséquences que ces décisions de fermetures additionnelles auront lors d’une pleine reprise de l’économie américaine, combinée avec la demande croissante des pays émergents. Quel prix paierons-nous alors ?

Face à cela, les gouvernements prétendent ne rien pouvoir faire. Ils créent des enquêtes bidon pour satisfaire l’opinion publique et encaissent les augmentations de revenus de taxes sur l’essence en proportion des prix.

Au Québec, le gouvernement avait l’occasion d’agir sur le maintien de la capacité de raffinage en empêchant le démantèlement de la raffinerie Shell à Montréal-Est en vertu de la Loi sur les produits pétroliers adoptée en 1986. Qu’est-ce que le gouvernement, la ministre Nathalie Normandeau en tête, a fait ? Rien ! Elle a contribué à créer davantage de rareté, ce qui ne manquera pas de faire augmenter les prix à la pompe, sans compter les 3500 emplois de qualité directs et indirects disparus dans l’opération.

Les gouvernements doivent arrêter d’être les complices des pétrolières en quête de profits toujours plus grands et refuser les fermetures à outrance de raffineries sous de faux prétextes. Le gouvernement du Québec doit appliquer la Loi sur les produits pétroliers et protéger notre industrie et nos approvisionnements.

Nous devons avoir le contrôle de cette ressource, notamment en la transformant sur place plutôt que de dépendre des arrivages de produits raffinés. Cela prend d’ailleurs un tout nouveau sens avec la découverte de réserves de pétrole, dont les gisements d’Old Harry et de l’île d’Anticosti.

À quand un gouvernement qui mise sur la transformation des ressources naturelles plutôt que sur l’exportation de matières brutes, qui applique une politique énergétique cohérente qui fera en sorte que les ressources du Québec profitent à l’ensemble des Québécois plutôt qu’aux seules compagnies pétrolières ?

* L’auteur est ex-président et conseiller du Syndicat des employés de la raffinerie Shell à Montréal (SCEP-FTQ).

Jean-Claude Rocheleau

Syndicaliste, ex-président et conseiller du Syndicat des travailleurs de Shell (SCEP-FTQ)

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