Édition du 12 novembre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Billet

Qui sont les véritables immobilistes au Québec ?

A tout bout de champ, on parle de l’immobilisme du Québec. Conscients du pouvoir des mots, les soi-disant "lucides" se réservent, selon leur habitude, les mots à consonance positive, et attribuent ceux à consonance négative, comme celui d’immobilisme, à ceux qui ne partagent pas leur idéologie néolibérale afin de les discréditer. C’est toujours la droite qui met ce sujet sur la table des médias. Vous en doutez ?

Serge Rouleau, qui partage leur mentalité, fait un bon résumé de leurs efforts de propagande sur le site libertarien : québecois libre.org « Le débat sur l’immobilisme au Québec a été lancé par la publication du manifeste Pour un Québec lucide en octobre 2005. Depuis, malgré des efforts répétés, le débat n’arrive pas à décoller. En avril 2006, Alain Dubuc, chroniqueur à la Presse, lance son livre, Éloge à la richesse ; en juin, suite à l’abandon du projet Loto-Québec/Cirque du Soleil, Michel Kelly-Gagnon, président du Conseil du patronat du Québec, lance son cri du coeur ; en septembre, la Fédération des chambres de commerce du Québec dévoile ses recommandations visant à contrer l’immobilisme au Québec ; finalement, pour souligner le premier anniversaire du manifeste, Lucien Bouchard relance le débat en soulignant le fait que les Québécois travaillent moins que les Ontariens et les Américains tout en se payant plus de service. »

A force d’entendre ce discours sur l’immobilisme sur toutes les tribunes, certains finissent par « acheter » cette propagande. A la TV, face à un journaliste visitant une résidence pour personnes âgées. une dame reprenait leur discours exactement dans les mêmes termes.

Cette accusation d’immobilisme : on l’a entendu notamment lorsque des citoyens s’opposaient à des projets nuisibles soit sur le plan environnemental ou social : la centrale du Suroît, le port méthanier en face de l’île d’Orléans, le casino dans l’est de Montréal, l’exploitation de l’uranium à Sept-îles, la privatisation du Mont-Orford, le projet d’Hydro-électricité sur la Rupert, la privatisation d’Hydro-Québec, les divers PPP, etc.

Autrement dit, tous les projets générateurs de profits, peu importe les conséquences environnementales ou sociales, sont taxés de « grands projets » de « projets dynamiques » et ceux qui s’y opposent de rétrogrades.

Curieusement, les projets qui ont comme but le mieux-être collectif : la nationalisation de l’énergie éolienne, la promotion de l’énergie solaire et géothermique, la réappropriation de nos ressources collectives par de justes redevances, l’assurance de notre souveraineté alimentaire par une agriculture respectueuse de l’environnement, l’organisation de transport public efficace, la protection de notre système public de santé et la création de PharmaQuébec qui permettrait de mieux contrôler l’excès de profits des pharmaceutiques. lesquels grugent un % élevé du financement public de notre système, etc on n’en parle pas ou peu et les politiques gouvernementales en ce sens n’avancent pas. Silence total dans les médias, notamment les médias corporatifs. Pas étonnant, car ces projets visent le bien commun et non le profit individuel. Ils ne s’inscrivent pas dans la logique marchande de notre système économique axé sur le profit à tout prix et donc n’ont pas la faveur des médias qui font partie intégrante de ce système.

Avez-vous remarqué que tout ce qui favorise l’intérêt collectif ne bouge pas vite ? Que le système de transport public réclamé par la population n’avance pas vite ? Comment se fait-il que notre système public de santé n’est pas plus efficace depuis les 7 ans que Charest est au pouvoir après avoir promis d’en faire sa priorité ? Quel immobilisme ! Il faut en déduire qu’on s’organise, soit activement, soit passivement, pour que ces projets favorisant le mieux-être collectif ne se réalisent pas.

Les véritables immobilistes ce sont ceux qui ont monté en épingle ce mot assassin. Si la population avait écouté de tels chantres de la privatisation dans les années 60, les Québecois ne seraient pas aujourd’hui propriétaires d’Hydro-Québec et ne bénéficieraient pas d’un système public de santé.

Il est amusant de lire dans l’extrait ci-haut : « Depuis, malgré des efforts répétés, le débat n’arrive pas à décoller ». Cela m’a rappelé les sondages où les Québecois continuent de privilégier des services publics de qualité en santé et en éducation, plutôt que des baisses d’impôt malgré toute la propagande de cette même droite.

Très réconfortant ! Finalement au bout de la ligne, les Québecois ne sont pas dupes. Malgré toute la propagande, ils réussissent à garder leur gros bon sens. Vive les Québecois ! Il y a encore de l’espoir.

Puissent-ils un jour être assez nombreux dans cette prise de conscience, pour choisir des gouvernements qui ont à coeur l’intérêt de tous et non l’intérêt des « lupides » : « soi-disant lucidité » au service de la cupidité = lupides.

Françoise Breault

Après une carrière en enseignement, dont un an avec les Échanges France-Québec, j’ai poursuivi en travail social auprès des familles. Vers l’âge de cinq ans, je me demandais pourquoi il y avait des pauvres et ce que je pouvais faire. Sans en prendre pleinement conscience, cette interrogation m’a habité toute ma vie. Une année en Amérique du Sud ne m’avait toujours pas apporté de réponse. Cela m’a pris du temps à voir clair... Maintenant que la lumière est allumée, je ne peux et ne veux la refermer... Tous les faits, toutes mes lectures me confirment comment le système économique actuel contribue à ce fossé grandissant entre riches et pauvres. Me voici maintenant à ma 3e carrière, celle où je peux mettre tout mon temps et énergie à sensibiliser les gens aux graves enjeux d’aujourd’hui, afin de vivre dans un monde plus juste... « mais nous, nous serons morts mon frère... ».

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