Le déséquilibre entre les ressources budgétaires et les besoins matériels a en effet conduit les administrations universitaires à puiser à même les fonds de fonctionnement pour financer leurs nouveaux espaces et matériels. Ainsi, entre 1997 et 2007, la proportion du financement du fonds des immobilisations provenant du fonds de fonctionnement est passée de 26 % à 45 %.
Les résultats d’une toute nouvelle étude de la Fédération québécoise des professeures et professeurs d’université (FQPPU) montrent l’inadéquation entre le fonds des immobilisations universitaires et les besoins d’espaces minimalement requis par le développement des institutions et par la croissance de leurs effectifs étudiants. Les conséquences sont désastreuses. Cette recherche examine tous les établissements universitaires du Québec durant une période de dix ans, soit de 1997 à 2007. Le rapport-synthèse de cette étude, intitulé Le fonds des immobilisations des universités. Une nouvelle cohérence à trouver entre vocations, budgets et réalités, rédigé par Élaine Hémond, en collaboration avec Martin Maltais et Michel Umbriaco, dévoile l’envergure du problème.
Il y appert que le financement du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) pour le fonds des immobilisations universitaires ne suit ni l’inflation ni la hausse des effectifs étudiants. Cette situation prévaut dans un contexte où le parc immobilier exige un entretien important et où les besoins d’espaces sont pressants, compte tenu de l’expansion de la recherche de pointe et de l’accroissement du nombre des étudiants et étudiantes. En dix années, les subventions pour les immobilisations ont diminué de 20,7 %, tandis que les acquisitions annuelles d’immobilisations pour l’ensemble des universités sont passées de 333 millions à 691 millions de dollars, représentant une croissance de 108 %. Pendant la même période, les effectifs étudiants ont augmenté de 23,4 %, alors que le MELS anticipait plutôt une baisse de la fréquentation étudiante. L’écart entre les prévisions et la réalité est considérable et il est d’autant plus conséquent que la part de financement du MELS, par étudiant, au fonds des immobilisations a été réduite. Chiffres à l’appui, l’étude démontre que la situation s’aggrave avec le temps et risque de perdurer.
Au total, les prélèvements pour les immobilisations équivalent à l’ensemble des sommes réinvesties par les gouvernements au cours des dernières années dans le fonctionnement général des universités. Ainsi, malgré des investissements considérables de l’État, au chapitre des budgets de fonctionnement des universités, les conditions de l’enseignement et de la recherche ne se sont pas améliorées. Au contraire, la hausse du nombre d’étudiantes et d’étudiants par groupe-cours et la diminution de la présence des professeures/professeurs réguliers, même aux cycles supérieurs, sont des signes évidents de détérioration.
L’étude se conclut par des recommandations pressantes : 1) élaborer un plan directeur du développement universitaire québécois qui émanerait d’États généraux ; 2) baliser l’autonomie des universités à l’égard du fonds de fonctionnement ; 3) réfléchir sur les pratiques de compétition entre les établissements universitaires.
Il s’agit du deuxième volet des travaux du Comité sur le financement des universités de la FQPPU. Un précédent rapport, en 2008, démontrait une dérive gestionnaire des budgets salariaux au détriment du corps professoral. Depuis plusieurs années, la FQPPU dénonce des pratiques qui vont à l’encontre des visées académiques, scientifiques et sociales d’une institution publique. La course à la « clientèle étudiante », les projets d’expansion et le ciblage de la recherche, entre autres, favorisent une marchandisation du savoir et intensifient la compétition entre les établissements. Plus que jamais, le Québec a besoin d’une réflexion approfondie et d’un large débat démocratique, sous la forme d’États généraux, pour se donner un plan de développement à long terme du réseau universitaire.
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Source : FQPPU 514-843-5953 www.fqppu.org