Édition du 17 décembre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

À la veille du Conseil national de Québec solidaire

Pour les cibles du GIEC, pas d'écotaxes, pour la grève sociale

La proposition du climatologue anglais Kevin Anderson1 — objectif de réduction de 80% des GES (par rapport à 1990) pour l’UE, et atteinte de 100% quelques années plus tard, afin d’être conforme au GIEC2 — correspond tout à fait à ce que dit l’IRIS au sujet du budget carbone du Québec soit qu’au rythme actuel d’émanation des GES, il sera totalement dépensé d’ici 2030.

D’où la nécessité minimum de maintenir tel quel les cibles chiffrées du programme Solidaire (40% en 2020, 95% en 2050) qui sont devenues en-dessous de ce qui est nécessaire car elles reflètent les objectifs du rapport de 2007 alors que la réalité depuis a été pire que le scénario le plus pessimiste du GIEC en 2007. Et quand on sera rendu en 2018 ou en 2020, il faudra garder ces cibles au programme pour montrer le retard à combler tout en ayant de nouvelles cibles encore plus ambitieuses pour 2025 ou 2030. Il ne faut pas tomber dans le piège attrape-nigaud qui se prépare pour le COP21 de cibles mouvantes à réviser aux 5 ans qui permettent de constamment pelleter en avant. Ne pas maintenir ces cibles rangerait Québec solidaire dans le même club anti-scientifique que les Conservateurs canadiens.

Sont nécessaires des révolutions immédiates de nos systèmes énergétiques, de transport, de l’agriculture et de l’urbanisme. Ces révolutions sont impossibles en tentant d’influencer le marché, contrôlé par quelques dizaines de transnationales, avec un marché ou une taxe carbone, des bonus-malus et des tarifs et péages de toutes sortes. Avec ces écotaxes, les riches (et classes moyennes) s’adaptent et souvent en profitent (ex. circulation moins dense) pendant que les classes inférieures écopent. En résulte une aggravation de la pauvreté et des inégalités et une opinion publique anti-écologique.

Toute l’épargne nationale est à mobiliser pour réaliser ces révolutions ce qui suppose l’expropriation des banques et consorts de même qu’une réforme fiscale radicale, ce qui à son tour suppose l’indépendance. Ainsi on aura les moyens, tout en ayant mis fin à la dictature de la finance, de se doter de programmes drastiques votés démocratiquement mais d’application obligatoire pour le bâtiment, le transport (avec interdiction à terme de l’automobile privée), l’énergie (avec priorité sur la sobriété et l’efficacité), la souveraineté alimentaire et une ville de piétons-vélos-transport collectif-agriculture urbaine. Faut-il ajouter que la mise en place de ses grands travaux écologiques aboutirait au plein emploi écologique et à la fin de la pauvreté.

Le chemin pour être en position d’enclencher cette politique ne passe pas par les élections de 2018 et son corollaire d’assemblée constituante. L’échec de Syriza en Grèce a amplement « ...démontré qu’entre une confrontation à grande échelle et la capitulation il n’y a pas de voie intermédiaire »4. Ce chemin passe par la grève sociale, c’est-à-dire par une grève politique fait de tracages, blocages et occupations de lieux de travail et d’études, et territoriales sur fond de grèves de grande ampleur dont le but est le renversement du gouvernement.

En ce moment le peuple québécois est à la croisée des chemins dont l’un aboutit à la grève sociale et l’autre à la capitulation avec ou sans accommodements à la marge. De connivence avec le gouvernement, la direction du Front commun, soutenue par sa bureaucratie, essaie de bloquer l’accès à la route de la libération. Elle veut empêcher les trois jours de grève générale dûment votés. Elle tente surtout de régler à bon compte, du moins sur la question des salaires à la table centrale, avant la période des Fêtes. La base syndicale est dans l’ensemble déçue de cet abandon mais ce n’est pas sans flottement. Le temps est venu, sans tarder, pour Québec solidaire de cesser de soutenir la direction du Front commun pour lancer l’idée de la grève sociale à commencer par appeler à se joindre aux trois jours de grève de la FAE.

Marc Bonhomme, 26 novembre 2015

www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca

1Wikipédia anglais, Kevin Anderson (scientist), visité le 26/11/15

2Kevin Anderson, Letter to the [British] PM outlining how 2°C demands an 80% cut in EU emissions by 2030, 22/10/14

3IRIS, Le budget carbone du Québec (note socio-économique), décembre 2013

4Stathis Kouvelakis, Vu de Grèce : peser les risques – Quelques réflexions sur la situation au Portugal, Facebook de l’auteur, Traduction Agatha, par ESSF, 8/11/15

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