En plus des déclarations du ministre des Ressources naturelles Pierre Arcand en faveur du développement des hydrocarbures [1], une vaste campagne publicitaire de Gaz Métro vante les mérites d’une alimentation locale en gaz [2]. De son côté, Pierre-Olivier Pineau, spécialiste du secteur de l’énergie aux HEC à Montréal, plaide en faveur du développement « rentable et responsable » de cet hydrocarbure [3].
Cette semaine encore, à l’émission Faut pas croire tout ce qu’on dit à Radio-Canada, Jean Simard, président de l’Association de l’aluminium du Canada, déclarait à tort que le gaz naturel était une énergie de transition moins polluante que le charbon [4].
Cette offensive médiatique survient alors qu’une étude publiée dans le cadre des Évaluations environnementales stratégiques (ÉES) révèle que le développement des infrastructures pour exploiter le gaz à Anticosti nécessiterait des investissements publics de l’ordre de 14 milliards de dollars [5] [6]. D’autres projets, comme l’usine de liquéfaction de gaz à Grande-Anse au Saguenay et la construction d’un port méthanier pour traiter et exporter le gaz de schiste en provenance de l’ouest et des États-Unis, représentent des investissements de plus de 7,5 milliards de dollars [7] [8]. Le gouvernement s’est encore montré favorable à la construction de l’usine de liquéfaction de gaz de la multinationale Stolt à Bécancour, au gazoduc de Tugliq en Gaspésie, au terminal de gaz naturel liquéfié flottant de la norvégienne Hoegh à Sept-Îles, et à l’agrandissement de l’usine de liquéfaction, de stockage et de regazéification de Gaz Métro dans l’est de Montréal, ce qui devrait permettre à cette industrie de tripler sa production. Bref, le gouvernement actuel, grâce aux généreuses contributions financières de l’État, ambitionne de transformer le Québec en technopole du gaz de schiste, qu’il renomme, pour le rendre plus socialement acceptable, « gaz naturel liquéfié » ou « GNL ».
Malgré les déclarations rassurantes de Philippe Couillard à la COP 21 à Paris, la perspective d’un tel développement de la filière gazière au Québec demeure très préoccupante. D’abord les données nécessaires à l’analyse coûts-bénéfices de cette filière ne sont pas encore disponibles ou sont biaisées en faveur de l’industrie. C’est le cas des études des ÉES sur les projets d’hydrocarbures à Anticosti et ailleurs au Québec [9]. Ensuite aucune distinction n’est faite, dans le discours public, entre le gaz naturel conventionnel et le gaz issu de la fracturation hydraulique. Si le gaz naturel conventionnel émet moins de GES que le pétrole ou le mazout, le gaz obtenu par fracturation est, lui, nettement plus polluant [10]. Et c’est bien ce type d’énergie sale que le gouvernement actuel veut voir s’implanter chez nous.
En plus des émissions de GES et du radon radioactif, les promoteurs du GNL devraient se préoccuper des impacts très négatifs de cette industrie sur l’eau potable, les sols, la santé, la vie des communautés et les autres industries, dont celles liées à une véritable transition énergétique. Ce sont là des sujets dont il faut absolument tenir compte si on veut donner l’heure juste dans le cadre d’une politique énergétique visant à lutter contre le réchauffement climatique. Malheureusement ceux et celles qui font l’apologie du gaz au Québec sont bien loin de ces considérations.
Louise Morand
Comité vigilance hydrocarbure l’Assomption
13 décembre 2015