Or, l’incorporation de l’agriculture dans les accords de libre-échange et la financiarisation de l’agriculture ne laissent présager rien de bon pour nourrir convenablement la planète.
Le libre-échange tue la souveraineté alimentaire
La production agricole est de plus en plus concentrée entre les mains de grands propriétaires terriens. Au Québec, le nombre de fermes est passé de 140 000 à 26 000 en 50 ans. L’agriculture de proximité, celle des agriculteurs qui offrent une diversité d’aliments à des consommateurs proches, a donc cédé le pas à une agriculture industrielle spécialisée qui achemine les aliments produits vers les grands centres pour ensuite les redistribuer à la grandeur du territoire.
En parallèle, l’industrie agricole s’est mondialisée entre les mains de géants agro-industriels et de financiers. Ces derniers, dont la soif de profits est insatiable, exercent des pressions sur les gouvernements afin de soumettre l’agriculture au diktat du libre-échange. Qui dit libre-échange, dit spécialisation de la production agricole qui est exportée vers l’étranger. En retour, cela nous oblige à importer les aliments que nous ne produisons plus.
Le productivisme agricole mondialisé s’est donc installé, cependant que nous avons perdu le contrôle de la qualité et des conditions de production des aliments. Le Québec perd clairement de sa souveraineté alimentaire, comme en témoigne la diminution de la part des aliments québécois dans notre assiette, laquelle est passée de 78 % à 33 % en 25 ans !
Le libre-échange tue les régions et l’environnement
En réduisant l’agriculture à une simple machine à produire pour conquérir les marchés étrangers, et non plus pour nourrir la population locale, le libre-échange productiviste détruit le tissu social d’un pays.
De gros spéculateurs financiers profitent de la rareté des terres agricoles pour les accaparer à des prix toujours plus élevés. Selon la Fédération de la relève agricole du Québec, le prix des terres agricoles a été multiplié par six en 20 ans. Il est donc très difficile, voire impossible, pour les jeunes d’assumer la relève agricole, et d’autant plus difficile pour les fermiers de concurrencer avec ces géants agro-industriels. Le libre-échange agricole tue donc l’agriculture et l’entrepreneuriat agricole local.
Le libre-échange agro-industriel est non seulement néfaste pour le développement régional, mais aussi pour l’environnement. Les géants agro-industriels sont les plus grands pollueurs des sources d’eau, à cause de l’utilisation intensive d’engrais très polluants. D’autre part, les aliments produits voyagent beaucoup plus, ce qui contribue à accroître les émissions de gaz à effet de serre.
Ce modèle est en train de montrer ses limites. Partout dans le monde, les rendements des cultures ne progressent plus.
Une agriculture de proximité
Devant un tel constat, le concept de souveraineté alimentaire s’avère une réelle alternative. Né lors du Sommet de l’alimentation de l’ONU à Rome en 1996, le concept désigne le droit d’un pays de définir une politique agricole et alimentaire adaptée à sa population et de protéger sa production agricole avec un objectif de nourrir durablement la population.
Pour ce faire, nous devons encourager le développement de différentes formes d’agriculture de proximité, de l’agriculture familiale à l’agriculture urbaine en passant par l’agriculture biologique respectueuse de l’environnement. Pour ce faire, nous devons protéger notre agriculture, ce qui implique d’exclure l’agriculture des accords de libre-échange, de bloquer l’accaparement des terres par les spéculateurs financiers et d’imposer des tarifs douaniers aux produits importés qui entrent en concurrence avec les produits locaux. C’est la condition essentielle pour retrouver notre souveraineté alimentaire.