Alors qu’au départ le modèle reposait sur les Centres de la petite enfance et les milieux familiaux régis et subventionnés, les gouvernements successifs n’ont cessé de s’éloigner de l’objectif initial en favorisant l’ouverture massive de garderies privées. Résultat : un réseau à deux vitesses, dans lequel les établissements privés offrent des services de moindre qualité. Alors qu’aujourd’hui, par le Grand chantier pour les familles, le ministre propose d’un côté de créer 37 000 places et de l’autre de bonifier un crédit d’impôt destiné aux garderie privées, il importe de lui rappeler que ce réseau, nous le souhaitons encore entièrement public et universel. Nous voulons aussi qu’il soit inclusif et qu’il vise l’objectif d’une réelle égalité des chances pour les enfants, et pour l’ensemble des femmes du Québec. C’est ce que devrait viser le projet de loi 1, actuellement à l’étude à l’Assemblée nationale, et qui vise à modifier la Loi sur les services de garde éducatifs à l’enfance.
Entre 1996 et 2019, le taux d’emploi des femmes au Québec a bondi de près de 18 points de pourcentage, plaçant la province au 2e rang parmi 32 États de l’OCDE, tout juste après la Suède. Cette place qu’occupe les femmes sur le marché du travail, le Québec la doit notamment à son réseau des services éducatifs à la petite enfance.
La situation actuelle démontre à quel point cette avancée demeure fragile. L’iniquité salariale tout comme l’iniquité dans le partage des responsabilités familiales font en sorte qu’un plus grand nombre de femmes quittent le marché de l’emploi pour s’occuper des enfants, faute notamment de places.
En plus de ce manque de places, d’importants obstacles à la conciliation famille-travail-études demeurent pour un grand nombre de parents. Bien que le Plan d’action pour compléter le réseau des services de garde éducatifs à l’enfance déposé récemment par le ministre de la Famille reconnaisse les besoins des parents ayant des horaires atypiques ou des enfants avec des besoins particuliers, les solutions concrètes manquent à l’appel, notamment pour le personnel de la santé. La complétion de ce réseau ne peut se faire sans la prise en compte réelle des besoins des parents et des femmes du Québec. Elle ne peut se faire sans la mise en place d’un réseau public et universel.
Le Grand chantier du ministre Lacombe ne peut se réaliser sans l’apport des personnels du réseau, qui demeure caractérisé par une importante ségrégation professionnelle. Les éducatrices et les aide-éducatrices à la petite enfance sont à 96% des femmes[1]. Ce sont elles qui, depuis près de 25 ans, contribuent à une plus grande participation des mères au marché du travail et qui soutiennent, par la bande, une part de l’économie québécoise. Ces femmes qui, au quotidien, s’assurent de la santé et de la sécurité des enfants tout en participant à leur éducation et en favorisant leur développement font, au sens de la loi, de la “garde éducative”. Alors que la situation actuelle démontre l’importance de valoriser ces professions de la petite enfance, n’est-il pas temps, M. le ministre, de reconnaître la valeur éducative du travail fait par ces femmes et de retirer le mot “garde” de votre projet de loi ?
L’Intersyndicale des femmes
Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS)
Centrale des syndicats démocratiques (CSD)
Centrale des syndicats du Québec (CSQ)
Fédération autonome de l’enseignement (FAE)
Fédération Interprofessionnelle de la santé (FIQ)
Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ)
Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ)
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