Édition du 12 novembre 2024

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Les réformes minières d'AMLO pourraient aggraver le conflit avec le Canada

Les entreprises canadiennes représentent les deux tiers de tous les investissements étrangers dans le secteur minier mexicain, Les sociétés minières sont furieuses des réformes économiques proposées par le Mexique, qui raccourciraient les concessions minières, offriraient de meilleures protections environnementales et obligeraient les entreprises à consulter les communautés autochtones locales avant d’obtenir l’autorisation d’entamer des travaux de prospection.

11 mai 2023 | tiré de Canadian Dimension

Ces réformes sont une version "adoucie" de la réforme du secteur minier proposée par le président Andrés Manuel López Obrador (AMLO) en mars. Cette proposition visait à réduire les droits d’exploration minière de 50 à 15 ans et à limiter les droits d’utilisation de l’eau à un maximum de cinq ans. En outre, AMLO a proposé d’interdire l’exploitation minière dans les zones protégées et d’obliger les entreprises qui souhaitent obtenir des droits d’exploitation minière à prouver que leurs activités n’auront aucun impact sur les réserves d’eau environnantes.

Face à l’opposition de l’industrie et des dirigeants de l’opposition, le gouvernement mexicain a atténué quelque peu sa proposition initiale. Les nouvelles réformes prévoient de raccourcir la durée des concessions minières à 30 ans au lieu de 15 (les entreprises auront également la possibilité de prolonger leurs licences de 25 ans). Toutefois, la cessation des concessions minières en raison de la dégradation de l’environnement et des activités illégales sera facilitée. Les députés fédéraux ont également accepté que les compagnies minières allouent 10 % de leurs bénéfices aux communautés locales dans lesquelles elles opèrent.

Les réformes minières d’AMLO s’inscrivent dans le prolongement de ses efforts visant à réduire la domination étrangère sur les réserves minières du Mexique et font partie de son programme plus vaste de "quatrième transformation", qui vise à garantir la souveraineté nationale sur les ressources lucratives du pays. Jusqu’à présent, il n’a pas défié l’industrie minière à ce point ; ses actions à l’égard du secteur ont plutôt pris la forme d’un gel des nouveaux permis d’exploitation minière et d’exploitation de l’eau pour les entreprises étrangères. Comme l’explique le Mexico News Daily, "entre 1988 et 2018, 65 534 permis ont été accordés, en grande majorité à des entreprises du Canada et des États-Unis. Cependant, depuis l’avènement du gouvernement Morena, il y a eu un arrêt total de l’approbation de nouveaux permis."

Alors qu’AMLO poursuit ces réformes, il continue de bénéficier d’une forte approbation de la part de l’opinion publique. En avril, l’Institut national de la statistique et de la géographie a constaté que 67,8 % des Mexicains interrogés avaient un "niveau de confiance moyen à élevé" dans le leadership d’AMLO. Plus de la moitié des Mexicains interrogés avaient une "grande confiance" dans l’administration du président. Les sondages d’opinion placent régulièrement sa cote de popularité bien au-dessus de 60 %, ce qui fait de lui le deuxième dirigeant mondial le plus populaire, loin devant le président américain Joe Biden et le Premier ministre canadien Justin Trudeau.

Le soutien populaire dont bénéficie AMLO est clairement démontré par le fait qu’il est capable d’attirer des foules de 500 000 à 1 million de partisans à Mexico pour ses événements, y compris lors d’un récent rassemblement pour célébrer le 85e anniversaire de la nationalisation de l’industrie pétrolière mexicaine par le président Lázaro Cárdenas.

Douglas Coleman, PDG du Centre minier mexicain, résume le point de vue de l’industrie sur les réformes progressistes d’AMLO. Dans une interview accordée à Forbes, il a qualifié le Mexique de "pays le plus attrayant pour l’exploration minière dans la région", mais s’est emporté contre AMLO en déclarant :

Je décrirais l’attitude d’AMLO à l’égard du secteur minier mexicain comme méfiante, antagoniste et mal informée. Je pense que la propriété étrangère des concessions minières va à l’encontre de l’idéologie nationaliste d’AMLO et qu’il considère l’industrie comme un mal nécessaire. Il fait souvent des déclarations accusant les entreprises canadiennes de profiter des ressources minières du Mexique tout en causant plus de tort que de bien aux communautés où elles opèrent.

Les entreprises basées au Canada représentent les deux tiers de tous les investissements étrangers dans le secteur minier mexicain, le nombre d’entreprises canadiennes au Mexique ayant augmenté après l’imposition de l’ALENA. De nombreux gouvernements mexicains avant AMLO ont fait tout leur possible pour satisfaire les sociétés minières transnationales. Cependant, maintenant qu’AMLO prend des mesures pour restaurer la souveraineté du Mexique sur les minéraux présents sur son territoire, les responsables canadiens expriment leur inquiétude.

Le 23 novembre 2022, la ministre canadienne du commerce, Mary Ng, s’est rendue à Mexico pour rencontrer des représentants de grandes entreprises canadiennes actives dans les secteurs de l’énergie, des mines et de la fabrication au Mexique. Mme Ng "a réaffirmé l’engagement du Canada à collaborer avec le Mexique pour résoudre les préoccupations [des entreprises canadiennes], en particulier en ce qui concerne l’État de droit, les questions de permis et les changements apportés au secteur énergétique mexicain".

Le 9 janvier 2023, Ng est retourné à Mexico pour se plaindre des réformes énergétiques d’AMLO et de ses efforts pour accroître la souveraineté de l’État sur les richesses minérales du pays. Lors d’une réunion avec la secrétaire mexicaine à l’économie, Raquel Buenrostro, Ng "a exprimé ses préoccupations concernant le traitement des sociétés minières canadiennes au Mexique et la nécessité de processus transparents pour les permis du secteur minier", tout en affirmant que "les sociétés canadiennes, y compris celles du secteur minier, sont des chefs de file dans l’établissement de pratiques inclusives et durables sur le lieu de travail".

Le 26 avril, lors d’un appel téléphonique avec Buenrostro, Ng a une fois de plus "exprimé ses inquiétudes" au sujet des réformes minières du Mexique. M. Ng a "exhorté le Mexique à s’assurer qu’il respecte l’esprit des engagements pris par les dirigeants lors du Sommet des leaders nord-américains et de l’Accord Canada-États-Unis-Mexique", et a demandé au gouvernement mexicain de consulter "toutes les parties prenantes au sujet des réformes proposées, y compris les entreprises canadiennes, qui représentent le plus grand groupe d’investisseurs étrangers dans le secteur minier mexicain".

Alors que le gouvernement d’AMLO poursuit ses réformes progressistes du secteur minier, qui accordent une plus grande importance à la protection de l’environnement, à la consultation des autochtones et au bien-être des communautés vivant à proximité des projets d’extraction, le Canada continuera à chercher des moyens de saper son programme.

Comme dans le cas du différend énergétique actuel, Ottawa pourrait contester les réformes d’AMLO par l’intermédiaire de la CUSMA, le successeur de l’accord commercial de l’ALENA. Selon le quotidien Mexico News Daily, "les entreprises canadiennes sont d’importants investisseurs au Mexique : "Les entreprises canadiennes sont d’importants investisseurs dans le secteur minier mexicain. Si le gouvernement canadien estime que les mineurs canadiens sont traités injustement au Mexique, il pourrait éventuellement contester les lois mexicaines dans le cadre de la CUSMA, le pacte de libre-échange nord-américain qui a remplacé l’ALENA en 2020."

Si Ottawa choisit de contester les réformes minières mexicaines, il ne fera que se ranger davantage du côté des transnationales à but lucratif contre le gouvernement populaire d’AMLO.

Le principal ennemi d’Ottawa dans ce pays n’est pas le président mexicain, mais la démocratie mexicaine elle-même, qui a élu un dirigeant et un parti pour mettre en œuvre le type de réformes que le Canada tente aujourd’hui d’entraver.

Owen Schalk est un écrivain du Manitoba. Son livre sur le rôle du Canada dans la guerre en Afghanistan sera publié par Lorimer en septembre. Vous pouvez le précommander ici. Pour découvrir d’autres de ses travaux, visitez le site www.owenschalk.com.

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