Le ton du propos, il est vrai, traduit bien la mentalité militariste de l’homme politique qui, comme le démontrent ses choix budgétaires, a une foi inébranlable dans le pouvoir des armes et l’usage de la force. Ce n’est pas un hasard si depuis son accession au pouvoir les dépenses militaires ont augmenté de 44 % atteignant aujourd’hui la rondelette somme de 23 milliards de dollars. Et c’est aux citoyens et citoyennes que son gouvernement demande maintenant de se serrer la ceinture en raison des restrictions décidées par Ottawa pour résorber les déficits hérités de la crise économique, mais aussi, dans une certaine mesure, des aventures guerrières auxquelles se prête allègrement le gouvernement conservateur.
Mais, tout cohérent qu’il soit avec le personnage, le discours belliciste de Stephen Harper n’en reste pas moins totalement trompeur. L’échec patent des expéditions et occupations militaires qui, en cette matière, ont marqué la dernière décennie en témoignent éloquemment.
Moins de deux mois après le début de la guerre en Irak, un certain George Bush lors d’un événement spectacle diffusé sur les réseaux américains et mondiaux à partir d’un porte-avions américain, faisait lui aussi l’éloge de la force et de la puissance de l’armée impériale pour saluer la chute de Sadam Hussein. On connaît la suite, plus de 4000 soldats américains morts dans des embuscades et autres attaques, au moins 100 000 victimes civiles, un pays en proie à des conflits interethniques "sanglants" et une armée américaine, férocement détestée, qui finalement en est réduite à quitter sur la pointe des pieds laissant derrière elle un pays dévasté et déchiré.
Et l’année 2001 marque pour l’armée canadienne le retrait des zones de combat en Afghanistan après plusieurs années d’engagement militaire actif sur le terrain. Résultats : 152 jeunes soldats canadiens morts dans un pays en proie à une guerre sans fin et à propos de laquelle le premier ministre lui-même a affirmé en mars 2009 qu’elle pouvait être gagnée par les forces d’occupation. Dix années de guerre menée par une puissante coalition militaire regroupant plus de 130 000 soldats, dont près de 3000 Canadiens, ont donné quoi comme résultat ? Un pays éminemment dangereux, gangrené par la corruption et le commerce de l’héroïne, pauvre à mourir, où quelques grands seigneurs de guerre font la loi et bloquent les progrès significatifs des droits humains, notamment ceux des femmes, pour lesquels, notamment, on disait aller se battre.
Oui l’usage de la force et la puissance de feu permettent parfois des victoires militaires : mais ces victoires sont à la fois fragiles et éphémères. Il est illusoire de croire que la paix et la prospérité se gagnent à coup de bombes si ce n’est la prospérité des seuls marchands de canons. Pour construire la paix et favoriser la mise en place de sociétés harmonieuses, rien ne remplacera la puissance et l’efficacité du dialogue et de la diplomatie active. Les peuples du monde l’avaient compris au lendemain de la Première Guerre mondiale quand fut créée la Société des Nations devenue par la suite l’Organisation des Nations Unies (ONU).
Dicton pour dicton, en situation de conflits, le "Mieux vaut se servir de sa tête que de ses poings" évoque nettement mieux la mentalité des citoyens de ce pays que l’éloge au Canada va-t-en-guerre de Stephen Harper.
Tirée de La Gazette de la Mauricie