« C’est mathématique. Plus on coupe dans le personnel des services publics, plus on presse le citron, plus on nourrit de l’anxiété chez travailleuses et les travailleurs avec des conséquences de lésions psychologiques parfois importantes. Il faudra bien que nos dirigeants en prennent conscience », s’insurge Pierre Jobin, vice-président de la CSQ et responsable du dossier Santé et sécurité au travail.
Des statistiques sous-estimées
Les estimations faites par l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et sécurité du travail (IRSST) en 2013 donnent des coûts globaux réels des lésions professionnelles pour l’ensemble de la société québécoise de plus de 4,6 milliards $ annuellement. La portion la plus importante de ces coûts, soit 69 %, est supportée par les travailleuses et travailleurs, en opposition à un peu moins du quart supporté par les employeurs. On peut aussi soupçonner, comme le font les chercheurs de l’IRSST, que ces chiffres sont sous-estimés, en raison d’une sous-déclaration des accidents et maladies du travail à la CSST. Soulignons que c’est aujourd’hui, lundi, que la Commission de la santé et de la sécurité au travail (CSST) dévoilera ses statistiques sur les accidents et les décès pour l’année 2013.
« Malgré que la CSST se gargarise depuis quelques années avec des chiffres à la baisse du nombre de réclamations, nous profitons de l’occasion pour rappeler au nouveau ministre du Travail, Sam Hamad, que derrière les statistiques se cachent des drames humains. Ce n’est certes pas avec des mesures d’austérité que nous pouvons espérer une baisse de réclamations », poursuit Pierre Jobin.
Une modernisation s’impose
La CSQ croit qu’une « modernisation » du régime de santé et sécurité du travail s’impose, 35 ans après l’adoption de la Loi sur la santé et la sécurité du travail qui aujourd’hui ne s’applique en totalité qu’à environ 20 % des travailleuses et travailleurs œuvrant dans les secteurs désignés comme prioritaires par la CSST en 1980.
Une véritable modernisation repose sur le renforcement des mécanismes de prévention déjà prévus à la LSST, notamment par leur extension aux secteurs ignorés jusqu’à présent et caractérisés entre autres par une forte présence féminine. Les lois en SST et leurs réglementations doivent être revues pour tenir compte de l’évolution des emplois depuis 35 ans et de l’émergence de nouveaux risques. Le développement des nanotechnologies et l’augmentation des risques psychosociaux, de plus en plus présents dans les divers milieux de travail en sont un bon exemple.
« Dans tous les cas, une modernisation du régime de SST ne peut se faire sur le dos des travailleuses et travailleurs », rappelle Pierre Jobin. Plusieurs employeurs ont déjà dans leur mire le programme de retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite. Trop généreux et trop coûteux selon eux ! Il en va de même pour les bénéfices accordés aux travailleuses et travailleurs victimes de lésions professionnelles, qui engendreraient des cotisations à la CSST, d’ailleurs qualifiées à tort de « taxes sur la masse salariale », trop élevées et qui nuiraient à la compétitivité des entreprises.
« Il est clair que le discours d’austérité du nouveau gouvernement peut faire craindre des reculs pour les travailleuses et travailleurs. Nous entendons faire barrage à cette logique de mauvaise foi », conclut le vice-président de la CSQ.