Édition du 17 décembre 2024

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Gaz de schiste

Gaz de schiste au Nouveau-Brunswick - Tourner sa langue sept fois

Au lieu d’entonner le refrain de l’industrie comme un vulgaire perroquet sur l’épaule d’un pirate, le ministre Leonard devrait s’informer adéquatement avant de caqueter des phrases qui ne résistent pas à l’analyse et aux faits. L’autre option qui s’offre à lui, c’est de tourner sa langue sept fois avant de parler.

Le 24 juin dernier, le ministre de l’Énergie du Nouveau-Brunswick, Craig Leonard, a prononcé un discours devant le Conseil du commerce de Saint-Jean (Saint John Board of Trade) au sujet du potentiel économique du gaz de shale pour la province du Nouveau-Brunswick.

Près de 1500 personnes ont manifesté devant l’Assemblé législative à Fredericton au début du mois d’août pour protester contre l’exploration et l’exploitation du gaz de shale.

Comme on peut s’en douter, le ministre a défendu le point de vue de l’industrie des gaz de shale en disant qu’elle « peut devenir un moteur économique majeur de notre province et qu’elle peut se développer de manière saine et sécuritaire sur le plan environnemental ».

En tant que protecteur de l’industrie et de la « piastre », le ministre a mentionné qu’il y avait beaucoup de mauvaises informations dans l’espace public au sujet de l’exploitation du gaz de shale. M. Leonard, dans son discours, a pointé du doigt le film « Gasland » que j’ai eu la chance de voir et qui montre les dangers que fait porter l’industrie du gaz de shale à l’environnement. Dans ce film, il y a une scène qui fait extrêmement mal à l’industrie et c’est celle qui montre des citoyens qui allument l’eau qui coule de leur robinet. L’eau est tellement contaminée par le gaz naturel qu’elle prend feu quand on allume une allumette près de l’écoulement.

D’ailleurs, le film montre que plusieurs résidants sont aux prises avec une contamination de l’eau de leur puits. M. Leonard tente de discréditer le film et cette scène en disant qu’un ingénieur à la retraite lui a raconté que c’est quelque chose qui se produit depuis près de 50 ans dans cette région puisque les habitations sont construites au-dessus de dépôt de gaz naturel. Donc par ce raisonnement d’une étonnante logique, les gens qui habitent cette région ont le plaisir d’allumer leur eau de robinet depuis 50 ans sans conséquence à leur santé et sans se plaindre aux autorités. Avec de tels propos, il est à se demander si M. Leonard n’est pas un personnage tout droit sorti du livre d’Alice au pays des merveilles.

Pourtant, les surprenantes affirmations de M. Leonard ne s’arrêtent pas là. Dans son discours du 24 juin, il a aussi dit que la fracturation hydraulique ne contaminait pas les puits artésiens. Il appuie cette affirmation sur les déclarations de la directrice de l’Agence américaine pour la protection de l’environnement. Le ministre soutient que cette dernière a déclaré : « (...) qu’elle n’était pas au courant, à sa connaissance, de cas prouvé que la fracturation avait un impact sur l’eau. »

Pourtant, en guise d’information pour le ministre, le New York Times a rapporté dans son édition électronique du 3 août dernier que l’Agence de protection de l’Environnement a détecté un cas de puits contaminé par la fracturation hydraulique. De plus, l’agence américaine a rédigé un rapport à ce sujet en 1987, alors que la contamination remontait à 1984. Selon le journal, il y aurait d’autres cas de contamination de puits, mais les détails les entourant ne peuvent être dévoilés publiquement parce que les compagnies responsables des problèmes ont négocié des ententes avec les victimes qui contiennent des clauses de non-divulgation.

Un élément très intéressant de l’article du New York Times affirme que l’Agence de protection de l’environnement voulait décrire d’autres cas de contamination dans son rapport final, mais que l’Association de l’industrie pétrolière a exercé de fortes pressions pour l’en empêcher.

Quand vous aurez la chance de voir le documentaire « Gasland », vous verrez au début les principaux représentants de cette industrie se présenter à une audience publique pour répéter joyeusement le même refrain que le ministre Leonard : « À notre connaissance, nous ne sommes pas au courant de cas prouvé de contamination d’eau potable par les activités de fracturation hydraulique. »

Au lieu d’entonner le refrain de l’industrie comme un vulgaire perroquet sur l’épaule d’un pirate, le ministre Leonard devrait s’informer adéquatement avant de caqueter des phrases qui ne résistent pas à l’analyse et aux faits. L’autre option qui s’offre à lui, c’est de tourner sa langue sept fois avant de parler. Par contre, si l’intention du ministre est comme il le dit « d’apporter cette industrie au Nouveau-Brunswick qui est d’importance cruciale d’un point de vue économique », alors on peut s’attendre à ce qu’il se moque de nos conseils et qu’il continue d’articuler un discours destiné à essayer de nous endormir au profit de l’industrie.

Florian Levesque est un artiste, un activiste et un homme d’affaires qui se définit comme un citoyen responsable. À la mesure de ses moyens, il essaie de bâtir un meilleur monde pour la 7e génération à venir.

Ce texte est ttiré du journal L’Étoile, voix des francophones du Nouveau-Brunswick

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