Édition du 17 décembre 2024

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Politique québécoise

Davos : M. Philippe Couillard à l’école des très riches !

Le sommet de Davos a accueilli 2500 personnes les plus riches de la planète et les chefs d’État à leur service. Ces personnes ont échangé sur leurs angoisses face à leur avenir économique et sur celui de la planète. Pas question d’analyser sérieusement les causes réelles de la situation internationale actuelle, d’identifier les responsables et d’esquisser des perspectives qui impliqueraient la participation démocratique de la majorité de la population. Leur ligne d’horizon, c’est celle de la croissance de leurs affaires et de la préservation de leurs privilèges.

Maintenir les inégalités et préserver leur « sécurité »

Durant la première conférence de presse à son retour de son pèlerinage à Davos, il nous a appris que le maître mot des puissants de ce monde était le mot sécurité. Et cela se comprend. Ces représentants du 1% de la population mondiale détiendront, selon l’organisme OXFAM, plus de la moitié des richesses mondiales dès l’an prochain. Il n’est pas étonnant que la contradiction entre la richesse grandissante de cette oligarchie capitaliste et la paupérisation de la vaste majorité de la population manifeste son caractère de plus en plus illégitime.

Ces élites championnes de la concentration de richesses savent qu’elles sont les responsables de cette situation. Les grandes entreprises capitalistes, en collaboration avec des politiciens à leur service, ont organisé la défiscalisation de leurs revenus et ont multiplié les procédés de tout genre pour ne pas payer leur juste part des dépenses publiques. Elles ont créé et ont utilisé des paradis fiscaux pour ne pas payer leurs impôts. Face à des États dépourvus de moyens pour satisfaire aux besoins de la majorité de la population, elles leur ont consenti des prêts et favorisé leur endettement. Comme créanciers influents, ils ont mis les États sous surveillance, les soumettant à leurs diktats et les pressant à couper dans les dépenses sociales. Ils ont mené une bataille frontale pour diminuer les salaires de leurs employéEs, appelant les États à s’attaquer aux syndicats et autres organisations de défense de la majorité populaire. Ils ont favorisé la détérioration des services p publics pour légitimer leur privatisation. Le renforcement des inégalités n’est donc pas tombé du ciel. Il s’explique. Et les principaux responsables de cette réalité se sont retrouvés à Davos non pour remettre en question leurs procédés d’enrichissement, mais pour masquer le caractère odieux et immoral de leur règne sur l’ensemble de la société.

Ici aussi, Couillard s’inscrit en complice du développement des inégalités en défendant une fiscalité régressive, en ne s’attaquant pas aux paradis fiscaux (il n’a pas hésité à les utiliser lui-même) et en favorisant le libre-échange qui renforce le pouvoir des multinationales. Durant son voyage en Europe il n’a d’ailleurs pas hésité à se faire le chantre de l’Accord Économique et Social Global - AÉCG, qui permettrait, s’il était ratifié, aux grandes entreprises de poursuivre les États devant des tribunaux d’arbitrage, si des mesures protégeant les normes les conditions de travail ou l’environnement mettaient en danger, selon les dires des compagnies privées, la rentabilité de leurs investissements.
Malheureusement, pour M. Couillard, l’Allemagne et la France y voient une attaque contre la souveraineté de leur État, et demande la réécriture de chapitres entiers de cet accord. [1]. Il ne semble pas que ce genre de préoccupations n’ait effleuré le premier ministre libéral.

Les changements climatiques, une occasion d’affaires

Nul ne peut ignorer les changements climatiques et les désastres qu’ils nous préparent. Les scientifiques du GIEC ont démontré que ce réchauffement climatique était lié aux activités humaines et particulièrement aux énergies fossiles dont l’utilisation dégage des gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique. Comment se comportent les grandes entreprises pétrolières et gazières et les gouvernements à leur service face à cette réalité ? Elles ont qu’une réponse : après nous, le déluge. Elles cherchent à protéger leurs investissements. Pour ce faire, elles se sont lancées dans l’exploitation du pétrole tiré des sables bitumineux et des gaz de schiste. Le Canada s’est retiré des accords de Kyoto. Il a fait adopter des lois pour réduire la protection de l’environnement. Les États-Unis ont augmenté considérablement leur exploitation des énergies fossiles. En 2015, ce pays pompera 4 millions de barils par jour, plus qu’un pays pétrolier comme l’Irak. Notre élite mortifère se contente donc de grands discours sur le développement durable, mais refuse de toucher l’essentiel. C’est ainsi que Philippe Couillard s’est vanté à Davos, d’avoir une position plus souple que le Canada en la matière, mais il n’a pas hésité à affirmer que le pétrole circulera sur le St-Laurent tant qu’il y aura de l’exploitation pétrolière. Voilà la stratégie maritime particulièrement dévastatrice qu’il nous prépare ! Le premier ministre Couillard n’est prêt à parler de décarbonisation de l’économie que lorsqu’il parle du commerce des permis de polluer.

Créer les conditions d’une guerre permanente pour assurer la spoliation des richesses de la planète

Les puissances capitalistes n’hésitent pas à multiplier les guerres régionales pour s’assurer l’ouverture au pétrole et la maîtrise des matières premières stratégiques. C’est ainsi que les États-Unis ont initié les guerres en Afghanistan, en Iraq et dans l’ensemble du Proche-Orient. Cela sans parler du soutien indéfectible de son allié Israël. Cet État terroriste peut se permettre massacre après massacre de la population palestinienne sans que le soutien indéfectible des puissances occidentales lui fasse défaut. La France n’a pas hésité à lancer ses troupes au Mali et d’autres aventures guerrières sur le continent africain.

Pour couvrir ces guerres spoliatrices, on n’hésite pas à présenter ces guerres comme des guerres pour la défense de la démocratie alors que les États-Unis et leurs alliés se sont toujours acoquinés avec les dictatures les plus féroces du monde arabe. Le concert d’éloges à l’endroit du roi Abdallah d’Arabie saoudite n’en est que la dernière illustration. Les interventions impérialistes au Proche-Orient ou ailleurs dans le monde n’ont jamais instauré des démocraties, mais elles ont semé la haine de l’Occident et ont créé le terreau sur lequel a pu se développer l’islam politique et ses actions terroristes.

Aujourd’hui, les puissances occidentales cherchent à justifier leurs guerres de rapine en développement l’islamophobie. Elles font tout pour créer un sentiment d’insécurité dans la population elles profitent de cette insécurité pour s’attaquer aux droits démocratiques de la population et pour criminaliser de la contestation à leurs projets de régression sociale.

M. Couillard a retenu que le mot sécurité était le maître mot des maîtres du monde. Il a compris qu’on lui demandait de renforcer la coordination et les marges de manoeuvre de la police sur le territoire du Québec. Mais, s’attaquer réellement aux fondements de l’insécurité, il ne peut même pas l’envisager, car il est solidaire de la rhétorique fumeuse des puissants de ce monde.

Lors de ses rencontres à Davos, l’oligarchie capitaliste en profite pour peaufiner son discours et se conforter dans son statut de « forces vives » de la planète et de décideurs éclairés régnant sur des peuples peu éclairés. Mais la majorité populaire a des réponses à offrir : un tournant vers une société écologique et égalitaire, la fin de la spoliation impérialiste du monde, une solidarité sociale véritable, l’unité de l’humanité contre les violences racistes, sexistes et homophobes.

Face aux marmites de la barbarie qu’on nous cuisine à Davos, une véritable démocratie écoscocialiste une alternative incontournable.


[1Le Devoir du 27 janvier 2015

Bernard Rioux

Militant socialiste depuis le début des années 70, il a été impliqué dans le processus d’unification de la gauche politique. Il a participé à la fondation du Parti de la démocratie socialiste et à celle de l’Union des Forces progressistes. Militant de Québec solidaire, il participe au collectif de Gauche socialiste où il a été longtemps responsable de son site, lagauche.com (maintenant la gauche.ca). Il est un membre fondateur de Presse-toi à gauche.

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