Bleue du jour
Il est temps
S’il faut trembler pour venir au monde,
Je serai le séisme
Qui libérera mes artères discursives,
Une tempête bien plus féroce
Que nos confrontations
À chaque trajet,
Sur chaque itinéraire.
J’ai la colère rentrée et le sourire aux lèvres,
Comme toutes celles qui se taisaient et n’en pensaient pas moins
Levant un regard vertical où se déroule la fougère
De siècles de résistance
Qui me tient encore l’échine droite et brûlante.
Il n’y a à ta fenêtre qu’une petite femme absente.
Nos traces fines s’étreignent entre nous,
Se hument, se reconnaissent
Et, oui, je me souviens de la saveur de ta peau,
Et de ton profil sur la plage noire du bitume.
Ta silhouette gesticule encore dans la fenêtre,
Je fixe le bleu du jour qui apparait avant l’aube.
Je ne deviendrai pas l’ossuaire délicat
De mes désespoirs.
J’assiste en spectatrice à la scène que tu soliloques.
Mon visage est opaque
Je porte à même mon corps les stigmates de mes défaites,
La douleur en gage.
Là-bas, entre les hangars, le jour s’insinue.
Je prends congé tendrement,
Tu ne sais pas que je pars,
Tu ne sens pas sur mon cou l’odeur du courroux.
La porte se ferme, puis c’est un effritement,
Seule, j’avance, le corps vacant.
Usée par cette colère encore une fois tue.
Manon Ann Blanchard
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