>
> La fin de l’année représente toujours un moment d’émotion et
> favorise l’adoption de bonnes résolutions. On se laisse alors si
> aisément aller au sentimentalisme... On voit loin et grand.
>
> Les voyages touristiques de masse représentent de nos jours une
> industrrie majeure et une précieuse source de devises étrangères
> pour plusieurs gouvernements, qu’ils soient occidentaux ou du « Tiers
> Monde » comme la Chine, l’Indonésie, la Thaïlande... ou encore
> Israël.
>
> Beaucoup de visiteurs et visiteuses parcourent ces pays avec intérêt ou
> curiosité, mais sans se poser de questions sur leur régime politique
> ni sur le sort de leurs populations. Ils et elles prétendent ne pas faire de
> politique et ils-elles évitent de prendre position sur les enjeux que doivent
> affronter ces sociétés, mais soutiennent se concentrer sur la
> dimension culturelle, historique ou hédoniste de ces pays, lesquels
> ont souvent développé une infrastructure d’accueil complète et
> attirante. Tout ceci sans mentionner le tourisme sexuel qui s’opère
> au détriment des filles du pays, parfois aussi des petits garçons,
> des gens frappés par une très grande pauvreté et à la merci
> d’exploiteurs sans scrupules.
>
> Mais ces touristes, honnêtes ou dépravés selon le cas ne font pas
> de politique... et permettent à certaines personnes démunies de se faire un peu
> d’argent, se justifient-ils-elles sans doute.
>
> Comme s’il était possible de se promener d’un pays à l’autre en
> toute neutralité politique. Le seul fait de chosir une destination
> entraîne une contribution financière au régime en place.
>
> C’est particulièrement vrai pour Israël. Le tourisme dans ce pays
> s’accroît sans cesse depuis des années et ce phénomène permet à
> son gouvernement de renforcer sa bonne réputation auprès des
> opinions publiques occidentales. Les touristes qui s’y rendent
> soutiennnent souvent qu’ils et elles le font sans approuver pour autant
> l’oppression que subissent les Palestiniens et Palestiniennes d’à
> côté. C’est une position insoutenable.
>
> Non seulement le fric dépensé en Israël aboutit-il dans les coffres
> de l’État hébreu et des entreprises israéliennes, mais les Arabes
> israéliens-nes n’en profitent guère et les Palestiniens et
> Palestiniennes de Cisjordanie en font les frais puisque cet apport
> d’argent étranger sert à entretenir les colonies de peuplement
> juives et à perpétuer l’occupation militaire.
>
> Une objection courante au mouvement de boycott d’Israël consiste à
> ressortir l’argument habituel selon lequel ce pays serait « la seule
> démocratie du Proche-Orient » et qu’il ne faudrait donc pas
> l’affaiblir. De plus, pourquoi boycotter Israël et non d’autres
> destinations gouvernées par des régimes dictatoriaux, autoritaires
> et corrompus ? Se profile derrière cette objection l’accusation ou du
> moins le soupçon « d’antisémitisme ». Air connu.
>
> Dans le cas de plusieurs pays « exotiques » dirigés par des
> gouvernements non démocratiques (selon les normes occidentales), on
> peut parler d’une culture politique et historique différente de la
> nôtre et enracinée depuis longtemps dans ces sociétés ; elle n’a pas été imposée par des puissances coloniales, c’est une culture à laquelle des segments
> importants de ces populations adhèrent plus ou moins mais contre
> laquelle ils ne se révoltent pas vraiment. De plus, l’hostilité à
> l’endroit de l’Occident y repose largement sur des actions agressives
> passées de gouvernements occidentaux colonialistes, comme en Chine,
> en Indonésie, en Thaïlande, au Vietnam ou au Cambodge et dont on
> garde un souvenir amer dans ces pays.
>
> Bien sûr, on peut boycotter des destinations asiatiques ou
> latino-américaines mais si on adopte cette approche sans discernement,
le choix de destinations tourisitques se réduirait
> comme peau de chagrin. À la limite, on devrait boycotter... nos
> propres pays où l’esprit même de la démocratie s’érode sous
> l’effet conjugué du rétrolibéralisme et du néoconservatisme. On
> n’a qu’à observer l’évolution politique américaine...
>
> Pour en revenir à Israël, on a le droit et même le devoir d’être
> plus exigeant en ce qui concerne le respect du droit à
> l’autodétermination des Palestiniens et Palestiniennes. Si les
> fondateurs de l’État hébreu ont adopté des formes de gouvernement
> libéralo-électorales, ils ont édifié cet État sur les ruines de
> l’ancienne Palestine arabe. Les dirigeant-e-s israélien-ne-s ont maintenu
> cet État au détriment des populations palestiniennes de Cisjordanie,
> de Jérusalem-Est et des réfugiés des camps du Liban, de Syrie, de
> Jordanie et des habitants de Gaza. Le tout avec l’appui
> inconditionnel de l’ensemble des classes politiques occidentales.
>
> L’État d’Israël constitue donc un prolongement direct et toujours
> très actuel de l’impérialisme occidental au Moyen-Orient (il est le
> protégé par excellence des États-Unis). On ne peut qualifier ainsi
> la Chine, l’Indonésie ou plusieurs pays latino-américains qui en
> sont plutôt les adversaires ou les clients.
>
> Ce double standard dans le traitement entre Israël d’une part, et la
> Palestine de l’autre discrédite auprès des Arabes les prétentions
> occidentales au soutien d’Israël pour des motifs démocratiques. La
> fumisterie est trop évidente pour qu’on y croie. Les classes
> politiques occidentales appuient avant tout le nationalisme israélien
> bien plus que sa « démocratie », laquelle ne profite qu’aux seuls
> Juifs.
>
> Alors vertueux et vertueuses touristes qui préparez un voyage en
> Israël, réfléchissez à la question avant de vous rendre là-bas
> gonfler le bas de laine d’acier israélien.
>
> Je conseille à tous les militants et militantes québécois de faire
> passer le mot et de s’impliquer activement dans le mouvement de
> boycott d’Israël. Renseignez-vous sur BDS Québec.
>
> Jean-François Delisle
Bien se placer les pieds
mercredi 16 janvier 2019 /
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