Tiré du blogue de l’auteur.
L’Huma - Lundi, 13 Août, 2018
« Marx n’a jamais été aussi utile », disait Samir Amin, qui fut sans conteste l’un des esprits les plus lucides du vingtième siècle dans la critique du système capitaliste mondialisé. Pour lui la logique capitaliste du profit entraîne la destruction des bases de la reproduction de la vie sur la planète. Cette critique fondamentale s’accompagnera tout au long de sa vie d’une analyse sans concession des rapports de domination entre le centre, les pays capitalistes développés, et la périphérie, le Tiers-monde.
Professeur agrégé de sciences économiques, Samir Amin, né au Caire en 1931, formé à Paris dans les années cinquante, a bouleversé le monde de l’économie du développement avec son immense livre intitulé : « Le développement inégal. Essai sur les formations sociales du capitalisme périphérique, Paris, Éd. de Minuit », paru en 1973 et analysant les modes de production tributaire à la périphérie et le mode de production capitaliste au centre.
Cet ouvrage majeur le propulse dans le champ antimondialiste qui deviendra deux décennies plus tard, l’altermondialisme. Grand défenseur des jeunes nations africaines, ce précurseur a toujours concilié son travail universitaire avec un engagement militant. Conseillé du gouvernement malien de 1960 à 1963, il fonde à Dakar, l’Institut africain de développement économique et de planification.
Il participa aussi à la création, d’Enda-Tiers Monde, l’une des premières ONG africaines. Pour lui il faut redéfinir l’ordre mondial basé sur le capitalisme financier et supprimer ses institutions comme l’OMC, le FMi et la Banque mondiale. Une pensée dense et radicale qui a inspiré plusieurs générations d’économistes africains.
Une perte pour le monde de l’économie et les cercles progressistes du Nord et du Sud
« Un Baobab est tombé », écrit le professeur Saliou Sy de l’Ecole de Dakar en hommage à l’économiste franco-égyptien qui résidait au Sénégal depuis plus de 40 ans.
"Avec le décès de l’économiste franco-égyptien Samir Amin, vient de disparaître un des grands intellectuels marxistes de notre époque, un camarade fraternel et un ami.", réagit son éditeur Francis Combes. "Samir a publié six livres aux éditions Le Temps des Cerises. Nous avons édité ses analyses théoriques sur la Loi de la valeur mondialisée, sa critique du Virus libéral, son étude sur de la Crise du capitalisme sénile. Il nous avait aussi confié ses livres sur l’Éveil du sud et sur les Communistes dans le monde arabe, tout un pan de l’histoire contemporaine dont il fut non seulement un observateur attentif mais un acteur, car Samir alliait la théorie et la pratique.
La force de sa pensée et sa grande utilité tenaient à sa lucidité, au fait qu’il avait un point de vue vraiment mondial (et non euro-centré) sur le capitalisme et à ce qu’il n’a jamais renoncé à l’engagement aux côtés des peuples dans la lutte contre l’impérialisme.
Il animait le Forum du Tiers monde, de Dakar. Et il a pris une part active dans de nombreuses initiatives collectives pour faire renaître une perspective progressiste et révolutionnaire.
Dans un bref livre qu’il nous avait confié, c’est lui qui a lancé l’idée (reprise par Chavez) de la nécessité d’une Cinquième Internationale, dans l’esprit de la Première. Ses réflexions sur la longue transition vers une société socialiste nous sont précieuses. Il continuera d’être à nos côtés et nous continuerons de nous appuyer sur ses travaux et travaillerons à les diffuser... "
Pour Pierre laurent le secrétaire national du PCF :
Les internationalistes que nous sommes se sentent aujourd’hui un peu orphelins
« Je perds un ami pour lequel j’avais le plus grand respect et une profonde estime, écrit le secrétaire national du PCF dans un communiqué :
"De celui qui voua son existence aux mises en mouvement populaires qui visent à transformer le monde, nous communistes français voulons saluer la mémoire et l’intelligence, les actions, la générosité et l’énergie toujours renouvelées.
L’existence entière de Samir fut tendue vers le seul objectif de l’émancipation humaine et sociale ; à libérer le genre humain du capitalisme, et des logiques de domination et d’exploitation que sont le colonialisme, l’impérialisme, le patriarcat, les fascismes et nazisme, l’ « occidentalisme », la xénophobie et la guerre. Militant des luttes anticoloniales et pour l’indépendance des peuples du « Tiers Monde », Samir était pour moi un internationaliste par excellence qui a tout autant contribué à briser le joug des aliénations sous toutes leurs formes.
Samir Amin fut sa vie durant un intellectuel en constant mouvement qui nourrissait ses travaux et prises de position d’expériences concrètes, d’expérimentations politiques et sociales, d’écoute et d’échanges.
Auteur d’une œuvre marxiste prolifique qui continuera longtemps de faire référence, Samir a formé plusieurs générations de chercheurs et de militant-e-s d’Afrique, d’Asie, d’Amérique latine, d’Europe et d’Amérique du nord en favorisant leurs contacts et dialogues autour d’objectifs communs, en particulier au sein du CODESRIA, établi à Dakar. »
RFI : voir les vidéos
Avec la mort de l’économiste Samir Amin le 12 août 2018, disparaît l’un des plus brillants théoriciens de la pensée marxiste et du communisme. Né en 1931 d’un père égyptien et d’une mère française, tous les deux médecins, il avait grandi à Port-Saïd, avant de venir achever à Paris ses études en statistiques et en économie.
Membre du Parti communiste français dès l’âge de 17 ans, il était considéré comme un des critiques les plus lucides de l’impérialisme économique occidental dans le monde. Vivant depuis plusieurs années à Dakar, Samir Amin était proche des mouvements populaires en lutte pour un avenir meilleur en Afrique.
Témoin privilégié des indépendances africaines, il aimait répéter que « le pire régime de l’Afrique indépendante était cinquante mille fois meilleur que ce qu’on appelait la belle colonisation ». RFI l’avait rencontré en mai 2018 à son domicile parisien à l’occasion du bicentenaire de Karl Marx.
35’ -“Révolution d’Octobre et mouvements de libération nationale”, par Samir Amin
1h37 -“L’implosion du système de la mondialisation néolibérale”, par Samir Amin
2h -“Lire le Capital, lire les capitalismes historiques”, par Samir Amin -
L’économiste franco-égyptien, Samir Amin, est décédé dimanche après-midi à Paris (France) des suites d’un cancer du poumon à l’âge de 86 ans, a appris APA de sources concordantes.« Samir a été évacué de Dakar pour Paris le 31 juillet 2018 pour y être hospitalisé. Samedi il a pu quitter l’hôpital pour revenir dans sa maison où il est resté une heure durant laquelle il a discuté un bout avec son épouse et des amis ! Il est ensuite reparti à l’hôpital où il est décédé ce dimanche 12 août à 16h18 minutes », a écrit sur sa page Facebook l’économiste sénégalais, Cherif Salif Sy, selon qui un « baobab est tombé ».
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