Tiré de Entre les lignes et les mots
Dans le cadre de ce projet, cette organisation a créé un programme d’intervention auprès des agresseurs de 24 semaines dans lequel la majorité des hommes ont été mandatés par les tribunaux pour participer à un groupe de responsabilisation à raison d’une séance par semaine, pendant 24 semaines. Lorsque nous avons créé ces groupes, nous pensions que les hommes exerçaient ces violences intimes parce qu’ils avaient des problèmes de « gestion de la colère » ou qu’ils avaient simplement « perdu le contrôle d’eux-mêmes ».
Ensuite, ce groupe, le Domestic Abuse Intervention Program de Duluth, au Minnesota, a organisé un groupe de discussion avec des femmes victimes de violence et a créé le schéma de Roue du pouvoir et du contrôle (ci-dessous), que plusieurs d’entre vous connaissez probablement. Lorsque j’ai vu ce schéma pour la première fois, j’ai réalisé que cette violence et ces comportements d’agression reflétaient en fait des choix conscients et délibérés, qui visaient des buts concrets.
Illustration : Domestic Abuse Intervention Program
Une fois que j’ai compris qu’il s’agissait d’un comportement conscient, j’ai décidé de demander aux hommes du groupe quels bénéfices ils tiraient de leur violence. Lorsque je leur ai posé cette question, ils se sont tous regardés (ce qui était déjà remarquable) et ont dit : « Il n’y a pas de tels bénéfices. » Je leur ai alors répondu : « Eh bien, vous devez en retirer quelque chose, sinon pourquoi le feriez-vous ? » Un homme a alors commencé à nommer certains de ces bénéfices, puis tous les hommes ont fait de même, et nous avons rempli un tableau noir de 1,5 mètre sur 3 en y inscrivant tous ces bénéfices de leur violence… et nous avons manqué d’espace. La première fois que j’ai fait cela, écrire tous ces bénéfices au tableau, j’ai regardé cette liste et je me suis dit : « Oh mon Dieu, pourquoi abandonneraient-ils ces avantages ? » J’ai alors décidé de leur demander : « Pourquoi les abandonneriez-vous ? » Nous avons ensuite rempli un espace beaucoup plus petit (60 cm x 60 cm) en y inscrivant les raisons pour lesquelles ils les renonceraient à ces avantages.
Le document ci-dessous énumère ces bénéfices que des agresseurs ont identifiés et suggère des raisons pour lesquelles ils pourraient y renoncer.
Elle a peur et ne va pas sortir et dépenser de l’argent ◆ J’obtiens ce que tu veux : je sors librement ◆ Elle me respecte ◆ Elle cesse de discuter ◆ Sentiment de supériorité : elle doit me rendre des comptes pour ce qui est d’être quelque part à l’heure : c’est moi qui décide ◆ Cela maintient la relation – elle a trop peur de partir ◆ Obtenir l’argent ◆ Obtenir du sexe ◆ Contrôle total dans la prise de décision ◆ Obtenir de l’argent pour de la drogue ◆ Ne pas avoir à changer pour elle ◆ Conserver le pouvoir ◆ Décider où on va (ensemble) ◆ Décider qui voir ◆ Décider quoi porter ◆ Contrôler les enfants ◆ Si elle est en retard, elle ne le sera jamais plus ◆ Intimidation ◆ Lui faire peur pour l’empêcher de me tenir tête ◆ La convaincre qu’elle se goure ◆ L’amener à se sentir moins valable et à s’en remettre à mes besoins et à mes désirs ◆ L’amener à me respecter et à accepter mes décisions sans discuter ◆ Me permettre de décider de sa vie sociale – de ce qu’elle porte pour que son allure n’affecte pas mon image sociale ◆ Faire en sorte qu’elle ne trouve pas de soutien contre moi pour les violences précédentes, parce qu’elle n’a personne pour la soutenir et qu’elle est troublée par mes mensonges ◆ La convaincre qu’elle est cinglée ◆ La convaincre qu’elle est laide ◆ La convaincre que le problème tient à elle ◆ Pouvoir me défouler sur elle ◆ Me servir des enfants pour « espionner » maman ◆ Empêcher les enfants de dire à maman ce que j’ai fait ◆ Empêcher que les enfants ne me critiquent ◆ M’éviter d’avoir à lui parler ◆ Cela fait de moi le maître de la maison ◆ Je peux me défiler quand je veux ◆ J’ai quelqu’un sur qui me vider le coeur ◆ J’ai quelqu’un contre qui râler ◆ Faire en sorte qu’elle n’appelle pas la police ◆ Pouvoir dire aux enfants qu’ils n’ont pas à écouter maman ◆ Faire en sorte qu’elle interrompe toute poursuite ◆ Faire en sorte qu’elle me soutienne auprès de sa famille, ma famille, les flics, le juge, le Programme d’intervention de crise, les procureurs, etc. ◆ Lui faire admettre que tout est de sa faute ◆ Arriver à la blâmer pour mes raclées ◆ Elle est un objet ◆ Cela me fournit un robot baby-sitter, une femme de ménage, du sexe, de la nourriture et flatte mon ego ◆ Cela me permet de me vanter ◆ Si elle travaille – j’obtiens son argent ◆ La faire quitter son emploi pour qu’elle s’occupe mieux de la maison ◆ L’isoler pour que ses ami.es ne puissent pas me tenir tête ◆ Décider comment l’argent est dépensé ◆ « Passer pour le soutien de famille » ◆ Acheter les jouets que je veux ◆ Prendre du temps pour moi ◆ Elle doit compter sur moi si je casse ses affaires ◆ Je suis au courant de tout ◆ Elle me sert d’infirmière-femme de ménage ◆ Elle me réconforte ◆ Le dîner est toujours sur la table ◆ Pouvoir inviter des amis à l’improviste = plus de travail pour elle ◆ Pas de compromis = plus de liberté ◆ Ne pas avoir à l’écouter se plaindre de ne pas être informée à l’avance ◆ Elle travaille pour moi ◆ Je n’ai pas à l’aider ◆ Je n’ai pas à traîner avec elle ou les enfants ◆ Déterminer les valeurs des enfants – avec qui ils jouent, quelle école ils fréquentent ou arriver à ignorer tout ce processus – dicter ce dont ils « ont besoin : nourriture, vêtements, loisirs, etc. ◆ Dicter la réalité ◆ Les enfants sont de mon côté contre elle ◆ Les enfants font ce que je dis ◆ Amener les enfants à m’aider en s’acquittant de mes tâches ◆ Faire taire les enfants au sujet de ma violence ◆ M’éviter d’avoir à me lever, à sortir les poubelles, à surveiller les enfants, à faire la vaisselle, à me lever la nuit m’occuper des enfants, à faire la lessive, à changer les couches, à nettoyer la maison, à amener les enfants à leurs rendez-vous ou autres activités, à passer la serpillière, à nettoyer le réfrigérateur, etc. ◆ Ne répondre à personne de mes comportements ◆ Faire ce que je veux, quand je le veux ◆ Pouvoir ignorer/nier mes antécédents de violence et autres comportements irresponsables ◆ Réécrire l’histoire ◆ Déterminer l’avenir ◆ Choisir mes batailles et ce qu’il lui en coûtera ◆ Prouver ma supériorité ◆ Gagner toutes les discussions ◆ Ne pas avoir à écouter ses souhaits, ses plaintes, sa colère, ses craintes, etc. ◆ Faire les règles puis les enfreindre quand je le souhaite
Il y a environ semaines, j’ai reçu un appel d’une station de radio en Australie au sujet de l’article que j’avais rédigé pour le magazine Voice Male en 2015 sur Les bénéfices masculins de la violence. Ils venaient de lire cet article et voulaient m’interviewer. Je suis à la retraite depuis 3 ans, et tous les 2 ou 3 mois, je reçois un appel ou un courriel de quelqu’un ou d’une organisation qui vient de lire ce texte et voudrait m’interviewer à la radio, ou en podcast, ou lors d’un webinaire. Ces contacts proviennent de plusieurs pays et sont relatifs à ce concept que les hommes sont conscients de leur comportement et le font en raison des multiples bénéfices qu’il leur procure.
Ce qui est remarquable pour moi, c’est le fait que, même à la retraite, je reçois encore des messages nationaux et internationaux basés sur cet article. Cela peut indiquer que cette compréhension des raisons pour lesquelles les hommes agressent les femmes, du fait que leur violence est délibérée et fonctionnelle, n’est peut-être pas aussi largement exprimée et comprise qu’elle devrait l’être.
Je lance donc ce message et ces documents pour nous encourager tous.tes à nous concentrer sur cette réalité de la violence masculine. C’est une réalité fonctionnelle, et c’est pour cela que ces hommes y recourent. Et nous devons partager cette information pour qu’elle soit mieux comprise et acceptée. Cette compréhension a radicalement changé la façon dont le système de justice pénale et civile américaine a porté attention à ce problème et commence à tenir les hommes responsables de leurs crimes.
Comme nous le savons tous, la violence des hommes à l’égard des femmes est l’un des principaux fondements de l’oppression sexiste. Et elle doit cesser ! Et nous pouvons y mettre fin, car nous travaillons en partenariat avec les femmes pour y parvenir.
Merci de prendre en compte cette question !
Chuck Derry
Traduction : TRADFEM
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