Tiré du site Solidarités Suisse
21.10.2020
Pour éviter un réchauffement global supérieur à 1,5°C
De plus, la loi mise sur des systèmes de compensation à l’étranger qui reviennent à octroyer des droits de polluer pour les grandes entreprises, reportant leur nécessaire effort de réduction sur les pays du Sud.
Mais surtout, la LCO2 passe à côté de l’essentiel en ne prévoyant aucune mesure contraignante sur les activités des banques, assurances et multinationales. Or, les investissements de ces organismes émettent vingt-deux fois plus de gaz à effets de serre (GES) que la population suisse, industries et transports compris ! Ces monstres de la finance pourront continuer de polluer sans compter.
Le dérèglement climatique oblige à opérer une transformation en profondeur de notre système économique et de nos modes de vie : la production, le transport, les échanges, la consommation d’énergie et de biens matériels doivent diminuer considérablement et immédiatement. Pour opérer cette mutation radicale, nous avons besoin d’un projet social qui réduise les inégalités, organise un meilleur partage des richesses et permette la reconversion de nombre d’activités polluantes.
A la place, la LCO2 concentre son effort sur des mesures de marché (principalement des taxes) qui seront sans effet sur le climat et qui permettront aux plus nanti·e·s de continuer à polluer sans entrave.
Nous ne voulons pas d’une loi alibi qui donne bonne conscience aux autorités en leur laissant croire qu’ils et elles ont « fait ce qu’il fallait pour le climat », ce qui risque de verrouiller tout débat jusqu’aux prochaines élections, au moins. Au contraire, nous devons agir vite et fort, et pour cela il nous faut un réel changement de paradigme !
Aux côtés des collectifs de la Grève du climat qui ont lancé le référendum contre la LCO2, et en opposition totale aux réactionnaires de l’UDC et aux lobbies du pétrole qui combattent la loi pour de tout autres raisons, solidaritéS défend, avec ce référendum, une véritable bifurcation écologiste et solidaire pour faire face à la catastrophe, en rompant avec le modèle productiviste qui en est la source.
I. DES MESURES INJUSTES…
Les plus gros pollueurs épargnés
Alors que, par ses investissements (notamment dans les énergies fossiles), la place financière suisse pollue vingt-deux fois plus que la population, la nouvelle loi ne prévoit aucune mesure contraignante sur les activités des banques, des multinationales et des assurances, qui pourront continuer à polluer pour maximiser leurs profits, dans la plus totale impunité. De 2016 à 2019, Crédit Suisse a ainis prêté 75 milliards à la filière des énergies fossiles. De son côté, UBS a multiplié par neuf ses investissements dans le charbon l’an dernier. Trois-quarts des grandes caisses de pension suisses n’ont tout simplement pas de politique climatique et investissent encore massivement dans les énergies fossiles. La BNS est responsable de 43,3 millions de tonnes d’émissions de CO₂ par an, soit l’équivalent à elle seule du bilan carbone de toute la population helvétique. Globalement, cette politique d’investissement favorise un réchauffement planétaire de 4 à 6°C – probablement plus encore en Suisse – très loin au-dessus de la limite fatidique des 1,5°C. Les montants considérables qui continuent ainsi d’être investis dans les énergies fossiles entrent en contradiction avec l’Accord de Paris sur le climat, selon lequel les flux financiers doivent être rendus compatibles avec un profil d’évolution vers un développement à faibles émissions de gaz à effet de serre et résilient aux changements climatiques.
Un tel statu quo en matière d’encadrement des investissements financiers nous fait passer à côté du problème principal : agir sur les émissions en Suisse sans prendre en compte les conséquences climatiques dramatiques des actions de la place financière revient à n’apporter qu’une réponse totalement incomplète à la catastrophe climatique. Les émissions générées par les flux financiers doivent être prises en compte, sans quoi on n’agira que sur une partie marginale du problème. Les institutions financières et leurs investissements doivent donc être soumis aux mêmes objectifs de réduction, au même titre que leurs émissions directes à l’étranger.
Des taxes inefficaces et injustes
La loi se base surtout sur des mesures de marché, en particulier des taxes qui frapperont en premier lieu la classe moyenne et les catégories moyennes les plus précaires de la population. Bien qu’une rétrocession partielle en soit prévue, les taxes de la LCO2 sont socialement injustes, puisqu’elles ne dissuaderont pas les plus privilégié·e·s de polluer sans compter. Renforçant les inégalités sociales, de telles mesures violent le principe de justice climatique défendu par les mouvements écologistes, puisqu’elles frapperont la population sans différentiation relative au revenu et aux conditions de vie. C’est tout l’inverse d’une fiscalité écologique efficace et juste, qui ponctionnerait en proportion des moyens de chacun·e et qui appliquerait le principe du plus gros pollueur, plus gros payeur.
Surtout, ces nouvelles taxes seront sans effets concrets sur les modes de production, de déplacement et d’échanges, à la source du dérèglement climatique. L’augmentation du prix de l’essence (12 ct par litre dès 2025) sera trop faible pour avoir un effet réel sur les choix de modes de transport. Et pour cause, les variations des prix à la pompe sont surtout dictées par le marché international du pétrole : il est par exemple passé de 1,64 CHF/litre en août 2019 à 1,39 CHF/litre en août 2020, soit une variation de 25 ct/litre. Dans ces conditions, une taxe de 12ct ne changera pas les habitudes individuelles, mais prendra par contre un peu plus à la gorge les personnes dont le revenu leur permet déjà difficilement de joindre les deux bouts. Si cette taxe était augmentée massivement, elle aurait sans doute un effet, mais ce serait aux dépens des habitant·e·s des régions périphériques les plus modestes, sans améliorer leurs alternatives en matière de mobilité écologique, thème qui n’est aucunement abordé par la loi CO2.
Dans une certaine mesure, la même logique s’applique à la taxe sur les billets d’avion. Avec la LCO2, les billets d’avion seront majorés de CHF 30.– à 120.–. En l’absence d’une taxation sur le kérosène (alors que tous les autres carburants sont taxés), cette taxe peut avoir un certain sens. Mais là encore, avec de tels montant, les plus riches ne verront pas la différence et la plupart de celles et ceux qui ne se verront pas apporter d’alternative continueront de voyager ainsi. Plutôt que des mesures incitatives ne visant que les plus précaires, il faut décider de l’interdiction de certaines liaisons aériennes, à commencer par celles qui peuvent être raccordées par d’autres moyens, mettre en place des quotas sur l’aviation en général et favoriser une vraie politique du rail, par exemple.
Si la loi prévoit d’encourager l’isolation thermique des bâtiments, les moyens engagés sont totalement insuffisants pour y parvenir. De plus, les propriétaires pourront librement répercuter les prix des travaux sur les loyers, qui sont déjà difficiles à assumer pour une grande partie de la population. Pourtant, les taxes seront intégralement redistribuées aux propriétaires (souvent des grandes sociétés immobilières) pour qu’ils et elles mènent – de manière non-contraignante – des assainissements énergiques. En revanche, les locataires, de leur côté, ne bénéficieront qu’indirectement des recettes de cette taxe que et ce uniquement si les propriétaires décident de réduire leur loyer de leur plein gré. On sait bien que dans l’immense majorité des cas, on peut toujours rêver. A l’inverse, dans le cas où un·e propriétaire déciderait de ne pas assainir un bien foncier, même contre l’avis de ses locataires, ces derniers paieraient le prix de l’augmentation des combustibles de manière injuste et subie. Pile je gagne, face tu perds !
Renforcement des injustices internationales
Les classes dominantes des pays riches, dont la Suisse fait partie, ont une lourde responsabilité historique et actuelle dans le dérèglement climatique. De leur côté, les populations des pays du Sud global se retrouvent au premier rang des victimes. Dans une perspective internationaliste et anti-impérialiste, réparer cette injustice passe donc, en plus d’atteindre la neutralité carbone en Suisse et d’empêcher les institutions financières et les grandes entreprises suisses de polluer à l’étranger, par un soutien matériel, technologique et humain à l’égard des pays du Sud global, afin de faire face aux désastres écologiques.
C’est tout l’inverse que prévoit de faire la LCO2, puisque les méthodes de compensation d’émissions et de bourses carbone vont creuser les écarts économiques entre pays dits « développés » et pays pauvres ou « en développement. » De même, l’absence de mesures pour réduire l’impact écologique des entreprises internationales basées en Suisse va perpétuer, sinon renforcer le rôle destructeurs de ces acteurs dans les pays du Sud global, dont les populations sont les plus pauvres. Glencore pourra continuer d’approfondir ses mines à ciel ouvert en toute impunité, Vale pourra continuer d’assassiner des populations au Brésil par ses activités extractivistes, tandis que Nestlé pourrra continuer de s’approprier les ressources d’eau potable et les cultures, en imposant sa loi sur le marché alimentaire.
II. … POUR DES EFFETS TRÈS INSUFFISANTS
Neutralité carbone : le compte n’y est pas
Si l’on en croit les prédictions de ses propres partisans, la LCO2 permettrait une réduction des émissions de gaz à effets de serre (GES) de 50% d’ici 2030, par rapport à 1990. Même si les mesurettes de la LCO2 devaient réellement permettre d’atteindre ces objectifs, ce qui est plus que discutable (cf. ci-dessous), de tels engagements ne permettraient malheureusement pas d’éviter de très graves catastrophes climatiques. Tous les rapports récents du Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) sont très clairs : pour éviter un réchauffement supérieur à 1,5°C qui pourrait provoquer un emballement climatique menaçant la survie de l’humanité sur terre, il faut absolument atteindre la neutralité carbone au niveau mondial d’ici 2050. Pour ce faire, il est nécessaire que les pays les plus industrialisés et les plus fortement émetteurs de GES par habitant·e, telle la Suisse, réduisent plus rapidement encore leur impact climatique, en atteignant zéro émissions nettes d’ici 2030.
La Suisse a pris des engagements en théorie contraignants en ratifiant les Accords de Paris sur le climat en 2015, mais ne les respectera pas avec cette loi. Ce ne sont pourtant pas des objectifs optionnels. S’en tenir à ces limites constitue la condition sine qua non pour faire face aux dangers que fait peser la crise écologique sur les écosystèmes nécessaires à la vie humaine sur terre.
La Suisse n’est pas à l’abri des conséquences du réchauffement climatique. Selon les calculs du GIEC, l’augmentation de la température moyenne planétaire se traduit pour la Suisse, compte tenu de ses particularités géographiques, par un facteur deux. C’est à dire que pour un degré d’élévation de la température moyenne, il faut compter avec une augmentation de deux degrés en Suisse. Autrement dit, 4°C à la fin du siècle, là où risque de nous emmener la politique climatique de la Suisse, c’est potentiellement 8°C de plus en Suisse. Soit un basculement de certaines régions dans des régimes climatiques semi-désertique et des conséquences catastrophiques pour les conditions de vie pour l’humanité et la biodiversité dans cette région.
Réduire et non compenser
Selon la LCO2, 25% des réductions prévues devraient être réalisées par des mesures dites de « compensation » à l’étranger. Mais pour répondre à l’urgence, il ne faut pas compenser, il faut réduire concrètement, partout et dans l’immédiat l’impact écologique des activités humaines. Réduire artificiellement nos émissions par des mesures réalisées à l’étranger ne fait que déplacer le problème et retarde une résolution globale de la crise, tout en ne permettant pas un réel contrôle démocratique des mesures prises. Dans les faits, ce sont les mesures les plus élémentaires qui sont entreprises par les pays industrialisés, laissant les défis les plus complexes et les travaux les plus coûteux à la charge des pays défavorisés, déjà en première ligne des conséquences du réchauffement climatique.
Pour éviter de toucher aux principales activités à la sources du dérèglement climatique (et aux profits pharamineux qu’une toute petite minorité en extorque !), le dispositif de la LCO2 va nécessairement impliquer l’emploi précipité de techniques dites d’« émissions négatives » pour parvenir à réduire les émissions de GES. Encore mal maîtrisées à ce jour, il s’agit de méthodes visant à compenser nos émissions par la captation artificielle du CO2 présent dans l’atmosphère, soit en utilisant des cavités déjà existantes (par exemple d’anciens puits de pétrole), soit en mélangeant le CO2 avec d’autres matériaux pour provoquer une captation chimique, soit en tentant d’en faire de l’hydrogène. Toutes ces techniques ont une efficacité encore très limitée. Utilisées à large échelle, elles comportent toutes de grands risques pour les écosystèmes et les société humaines. Si leur usage pourra s’avérer nécessaire à mesure que l’urgence n’est pas prise en compte par les dirigeants, cela doit être un dernier recours et la priorité doit être celle de réduire à la source les émissions de GES issues de l’activité humaine.
Si la Suisse a le devoir historique de participer à la réduction des émissions de GES dans les pays qui souffrent déjà des conséquences du dérèglement climatique sans en être responsables, elle ne peut le faire en s’économisant d’atteindre, sur son territoire, la neutralité carbone d’ici 2030, ainsi que pour les activités que mènent les entreprises installées en Suisse. Sans quoi les objectifs de l’Accord de Paris ne peuvent être respectés.
« Bourse carbone » : ne pas confier la catastrophe à la finance
La loi légitime et pérennise le principe de la Bourse du Carbone. Hautement spéculative, celle-ci permet aux pays riches, responsables de la catastrophe climatique, d’acheter des droits de polluer en subventionnant des politiques environnementales dans d’autres pays. Autrement dit, dans le même esprit que les mesures de compensation, elle délivre des permis de polluer ici, en soutenant des mesures très incertaines ailleurs. Au lieu d’imposer de réels changements dans les règles de productions de marchandise et leur circulation au niveau international, la LCO2 propose donc d’offrir des bonus financiers aux acteurs financiers qui investiront dans cette bourse.
III. POUR UNE ALTERNATIVE ÉCOSOCIALISTE
Changer de paradigme
Il est illusoire de penser réduire considérablement les GES et de s’adapter aux conséquences du dérèglement climatique sans s’attaquer au système profondément injuste qui le sous-tend. La catastrophe écologique est une conséquence inévitable du capitalisme, qui ne peut survivre sans produire et gaspiller toujours plus. C’est le mythe mortel d’une croissance infinie dans un monde aux ressources limitées.
La LCO₂ ne s’éloigne pas des mécanismes de marché qui sont à la source de la crise écologique. En renforçant les inégalités sociales, elle risque de pousser une partie importante de la population à s’opposer à toute politique écologique. Nous avons au contraire besoin d’une planification écologique décidée démocratiquement et socialement juste, qui rompe avec les dogmes de la croissance et du productivisme.
Nous devons sortir de la logique capitaliste et défendre une politique basée sur le principe de justice climatique : toute mesure environnementale doit contribuer à réduire les inégalités sociales et conduire à une meilleure répartition des richesses. Celles et ceux qui causent et profitent le plus des émissions de gaz à effet de serre doivent être mis prioritairement à contribution, et non pas ceux et celles qui en sont les victimes, sous quelque forme que ce soit. Le principe de justice climatique implique également le développement d’infrastructures permettant à chacun·e de pouvoir sortir du « tout bagnole » et des énergies fossiles, sans subir des dégradations importantes de ses conditions de vie. Cela implique d’importants investissement qui, dans un premier temps, entraîneront des émissions de GES supplémentaires. Ce qui renforce encore la nécessité de réduire au plus vite toutes les émissions qui peuvent l’être.
solidaritéS soutient les revendications portées par les jeunes mobilisé·e·s pour le climat. Pour préserver les écosystèmes et freiner la catastrophe en cours, le respect de la « règle verte » est impératif : la Suisse ne doit pas utiliser plus de ressources naturelles que ce que nos écosystèmes peuvent produire et reproduire naturellement. Cela doit impérativement également s’imposer aux activités des sociétés suisses à l’étranger.
solidaritéS défend le désinvestissement immédiat des institutions financières et des grandes entreprises suisses contribuant au réchauffement climatique, à la dégradation d’écosystèmes ou au non-respect des droits humains. Cet argent doit être réinvesti dans un Fonds Climat afin de financer la transition écologique. Ce fonds serait alimenté par une fiscalité différenciée et progressives sur les énergies fossiles (combustibles et carburants), sur le CO2 contenu dans les produits importés et sur les entreprises helvétiques en fonction de leurs impacts climatique, environnemental et social.
Défendons un programme d’urgence écologiste, solidaire et démocratique
Dans cette perspective, solidaritéS se bat pour un programme d’urgence climatique en dix mesures à mettre en œuvre sans délai pour faire face à la catastrophe
1. L’objectif : zéro émission nette d’ici 2030, en prenant en considération les émissions directes et indirectes liées à la consommation ainsi qu’aux activités des instituts financiers et des multinationales
2. La création d’un Fonds Climat pour financer la transition écologique, financé par une fiscalité équitable, progressive en fonction du revenu et différenciée en fonction de l’impact écologique
3. Une transition immédiate vers un système énergétique public basé à 100 % sur les énergies renouvelables – sans privatisation du marché de l’électricité ! – en privilégiant les petites installations décentralisées et démocratiquement contrôlées ; l’arrêt de toutes les centrales nucléaires
4. L’abolition de l’élevage intensif et la transition vers une agriculture décarbonisée et locale utilisant des méthodes d’agriculture régénératrices (agroécologie, permaculture, etc.)
5. Un strict encadrement légal du négoce et l’interdiction de la spéculation sur les matières premières incluant les denrées alimentaires (céréales et soja importées du Sud pour nourrir le bétail du Nord), le charbon et les hydrocarbures
6. La décarbonisation totale des transports terrestres par l’investissement massif dans des transports publics régionaux gratuits et la baisse massive des tarifs CFF, dans des aménagements favorisant la mobilité douce et l’interdiction des véhicules à carburant fossile dans les 10 ans ; un moratoire sur tous les projets de nouvelles routes, autoroutes et aéroports, ainsi que la transition vers des centres-villes sans voitures d’ici 2030
7. L’interdiction, d’ici 2030, des vols en avion court-courriers ; un investissement massif dans les trains de nuit pour relier les villes suisses aux villes européennes ; la mise en place de quotas de rationnement pour l’aviation assurant une juste répartition de la possibilité de voyager en avion, sans discrimination en fonction du revenu
8. La protection immédiate et absolue, ainsi que la mise en réseau de tous les milieux naturels ou construits d’importance pour la biodiversité
9. Un subventionnement massif pour la rénovation écologique des bâtiments, notamment pour l’isolation des bâtiments et le développement des sources de chaleur renouvelables, ainsi que l’interdiction des combustibles fossiles d’ici 2030 ; ces mesures ne doivent pas être répercutées sur les loyers
10. L’interdiction des activités polluantes, nuisibles et inutiles, telles que la publicité commerciale, la production d’armements ou l’industrie du luxe
Vers une société écosocialiste
Au-delà de cette campagne référendaire, solidaritéS se bat une transformation en profondeur de nos modes de production, d’échanges, de partage et de vie, pour construire une société basée le la satisfaction des besoins sociaux de toutes et tous et favorisant un rapport harmonieux de l’être humain avec son écosystème.
Nous voulons tracer d’autres voies économiques et politiques, construire une société plus responsable, moins destructrice, plus solidaire et plus juste. Nous voulons défendre et étendre à tous les niveaux un contrôle démocratique sur les ressources disponibles, les infrastructures et les conditions de vie et de travail. Nous voulons redéfinir, de toute urgence, nos priorités et nos besoins fondamentaux et inventer ensemble un mode de vivre radicalement différent, capable de garantir un avenir aux générations présentes et futures.
Nous voulons également accorder plus de place à des dimensions essentielles de la vie – culturelle, artistique, affective, citoyenne et démocratiques – reléguées aujourd’hui à une place marginale, alors qu’elles pourraient être développées sans limites et sans péril pour le monde qui est le nôtre.
La LCO2 ne nous fait pas avancer vers ces objectifs ; elle verrouille au contraire une politique libérale qui ne permettra pas d’éviter la catastrophe. Or, l’urgence climatique ne laisse plus le temps pour les demi-mesures ou les fausses solutions. De telles réponses sont aujourd’hui équivalentes à des reculs. Nous avons besoin de formuler des objectifs à la hauteur des enjeux écologiques et de mettre en œuvre rapidement des mesures socialement justes pour y faire face. Cela ne passera que par un éveil de la population, qui doit se mobiliser pour exiger une autre politique climatique !
C’est dans ce but que solidaritéS participe à la récolte de signatures pour l’aboutissement de ce référendum lancé par des collectifs de la Grève du climat.
IV. Les faux arguments des partisans de la LCO2
La LCO2 est un premier pas en avant
La LCO2 ne fait aucun pas vers une politique climatique conséquente. Elle perpétue le mythe qu’une écologie de marché est possible et que des taxes incitatives vont permettre d’empêcher la catastrophe écologique. Sous ses airs de « petit pas en avant », elle verrouillera la politique écologique de la Suisse. La LCO2 va servir durant plusieurs années de référence pour les révisions des autres lois concernant le climat, puisqu’elle définit l’objectif global de réduction des GES jusqu’en 2050. Du reste, ces objectifs insuffisants se fondent sur une grande illusion entretenue par les partisans de la Loi sur la mobilité automobile. Ceux-ci misent sur le remplacement massif de l’automobile thermique par l’électrique pour réduire les émissions de GES, sans jamais intégrer aux calculs les immenses quantités d’émissions de GES que provoquerait, dans un premier temps, le remplacement de l’une par l’autre ainsi que la simple extraction et production des matériaux servant à produire les piles.
Face à l’urgence, cette politique du « moindre mal » promet de nous mener tout droit vers le « toujours pire ».
Les taxes sont équitables car elles seront redistribuées
Toute taxe revêt en soi un caractère inéquitable parce qu’elle frappe de manière indifférenciée tous les individus, quel que soit leur revenu. De plus, le problème central de ces taxes est qu’elles resteront sans effet sur les plus riches, qui pourront continuer de polluer sans compter. Par ailleurs, elles seront globalement inefficaces, puisqu’elles ne modifieront pas substantiellement les habitudes de la population en matière de mobilité et de consommation, mais auront un impact tangible sur le revenu des personnes les plus précaires. Ces taxes sont également injustes car elles ne touchent pas aux activités très polluantes des banques, des fonds de pension, des assurances et des multinationales.
Il n’y a pas d’alternative possible avec la majorité politique actuelle
Les partisans de la loi se défendent d’avoir obtenu le maximum de ce qu’il pouvait obtenir dans le rapport de force actuel. Mais ils ne considèrent que les équilibres parlementaires pour en juger. Ils oublient que le rapport de force politique et social se joue aussi dans la rue, sur les lieux de travail et d’études, et l’histoire du mouvement écologiste en Suisse le prouve : dans les années 1970-1980, le mouvement antinucléaire est parvenu à emporter des victoires importantes, empêchant notamment la construction de la centrale nucléaire de Kaiseraugst, malgré un parlement très à droite et une représentation des Vert·e·s proche de zéro. À croire que lorsque le parti au tournesol ne résonnait pas uniquement en termes de majorité parlementaire, son poids dans les décisions politiques était plus important !
Plus généralement, la crise sanitaire liée à la pandémie de COVID-19 a montré que des mesures de très large ampleur peuvent être décidées et mises en œuvre sans attendre pour faire face à une catastrophe. Comme lorsqu’il s’est agi de sauver le système financier lors de la crise des subprimes en 2008, des dizaines de milliards ont été débloqués en quelques jours pour mettre en œuvre le plan de crise du Conseil fédéral. Il est donc faux de prétendre qu’un refus de la LCO2 rendrait impossible toute mesure écologique dans les années à venir. C’est une affaire de volonté politique.
Un référendum écologiste et solidaire permet d’agir sur le rapport de force, en accroissant la pression des mouvements écologistes sur les autorités et en montrant à ces dernières que la population ne se satisfera pas d’une politique injuste et inefficace.
Le référendum fait le jeu de l’UDC et des climato-sceptiques ?
Dans le contexte politique suisse actuel, le référendum lancé par les jeunes de la Grève du climat est le seul moyen pour défendre et faire progresser une politique climatique solidaire à la hauteur des enjeux. C’est l’absence d’une telle campagne qui aurait fait le jeu de l’UDC – qui aurait alors eu tout le loisir de s’attribuer le monopole de la contestation de la politique climatique de la Suisse – et plus généralement de celles et ceux qui s’opposent à un changement d’ampleur.
Qu’une loi soit combattue à la fois par un camp réactionnaire et par un camp progressiste n’a rien de nouveau en Suisse. Comme toujours, il est demandé aux progressistes de bien vouloir se taire, au risque de faire le jeu de la réaction. Nous l’avons récemment vu avec le référendum (victorieux) contre PV2020.
Mais nous ne pouvons pas mettre de côté les injustices et les insuffisances d’une loi sous prétexte que des climato-réactionnaires la combattent également. La droite dure et les lobbies du pétrole appartiennent à l’ancien monde, climatosceptique et obsédé par les impératifs de croissance et de profits de la société capitaliste. Les arguments de solidaritéS contre la loi sont diamétralement opposés aux leurs.
La Suisse est un minuscule pays à l’échelle mondiale. Cela ne sert à rien de tout bousculer dans notre coin si les USA, la Chine, l’Allemagne, ne nous emboîtent pas le pas, ce qui paraît actuellement mal emmanché
C’est l’argument favori de la droite libérale, mais c’est un mensonge pur et simple.
La place financière suisse (les grandes banques telles que UBS, Crédit Suisse ou même la BCV, les assurances, les fonds de pensions et d’investissement ainsi que la BNS) est l’une des plus grandes et plus puissantes au monde. Comme elle est également très opaque et très peu régulée, ses activités sont méconnues du grand public et son rôle dans le réchauffement fréquemment occulté. Alors qu’elle pollue vingt fois plus que la population, les transports et l’industrie indigènes.
La Suisse accueil de nombreuses multinationales, notamment actives dans l’extraction de matières premières et d’aliments essentiels, la cimenterie et les pesticides. Elle est aussi numéro un mondiale dans l’accueil de sociétés de trading de matières premières et alimentaires. Ses multinationales emploient des millions de personnes en travers le monde, et polluent et tuent à tout va. On pense notamment à L’exemple récent de la catastrophe du barrage de Brumadinho au Brésil à cause de Vale, basée à St-Prex dans le canton de Vaud.
Finalement, la population suisse est l’une des plus riches du monde, ce qui induit une pollution et une consommation de CO2 par habitant-e nettement plus élevée que la moyenne mondiale. Pour des raisons de justice climatique, il faut de toute urgence réduire ce rythme.
Sans les investissements de la place financière suisse dans les énergies fossiles et les industries socialement nuisibles, un immense changement de paradigme se produirait au niveau des investissements internationaux et rien ne prouve que d’autres fonds étrangers se rueraient pour combler la brèche laissée vacante par les investissements issus de Suisse.
Un message, un commentaire ?