Édition du 17 décembre 2024

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Réplique au vice-président du PQ-Mercier : La lutte pour l’indépendance du Québec n’est le monopole d’aucun parti !

Mardi 13 janvier 2009

Le vice-président du PQ-Mercier, Marc Desnoyers, affirme dans Le Devoir du 6 janvier dernier que l’élection d’Amir Khadir « constitue un recul pour la cause de l’indépendance québécoise », que Québec solidaire n’est pas véritablement souverainiste. Il soutient surtout qu’il ne faut pas lier le projet d’indépendance à un projet social. Bref, pour lui, la cause est entendue. Pour les souverainistes, hors du PQ, point de salut.

Marc Desnoyers affirme que le PQ met l’indépendance au-dessus de tout et particulièrement au-dessus des revendications à caractère social. Ce n’est pas ce que nous démontre l’histoire du PQ. En 1978, à l’Assemblée nationale, le PQ a proclamé le caractère indissociable de la souveraineté et de l’association du Québec avec l’État canadien. En 1980, il a fait un référendum sur la négociation d’une nouvelle entente avec le Canada en attendant un deuxième référendum. Pierre Bourgault, à ce moment-là, a regretté amèrement d’avoir sabordé le Rassemblement pour l’indépendance nationale. En 1982, Le PQ prenait le tournant du beau risque, s’activant dans la réforme du fédéralisme canadien qui n’a d’ailleurs débouché que sur un nouvel affront du fédéral face au Québec. Après la défaite de 1995, la direction péquiste de Bouchard puis de Landry a remis la perspective référendaire à des lendemains indéfinis alors que les gouvernements péquistes faisaient de la gestion néolibérale le nec plus ultra du modernisme.

Pour ce qui est de ne pas placer les revendications sociales dans ses priorités le PQ en a fait une marque de commerce. On n’oubliera pas son offensive contre les syndicats du secteur public en 82, ses lois spéciales à répétition contre les travailleuses de ce secteur, particulièrement contre les infirmières, son obsession du déficit zéro reprenant à son compte le discours démagogique de la droite Américaine à cet égard, son soutien au libre-échange, particulièrement à l’ALENA et à celui de la ZLÉA qui étaient des portes ouvertes à la spoliation des peuples d’Amérique latine comme la suite des choses allait malheureusement le démontrer. Que les pressions des mouvements sociaux mobilisés aient obligé le PQ à faire des concessions, on peut le reconnaître. Mais avec le temps, il s’est montré de plus en plus imperméable à ces pressions. Il ne s’est pas rendu aux revendications de la Marche du pain et des roses. Il est maintenant décidé à démontrer son ouverture face à la privatisation de la santé. Il soutient désormais le financement public de l’école privée. Il est maintenant prêt à permettre le dégel des frais de scolarité. Et il parle encore de la volonté de se recentrer… à droite. Durant la dernière campagne électorale, Pauline Marois a même fait preuve d’une ouverture surprenante à l’égard de l’ADQ.

Marc Desnoyers reproche à Québec solidaire de vouloir donner un contenu progressiste à l’indépendance. Québec solidaire plaide coupable. Québec solidaire n’aurait qu’une conception purement instrumentale de l’indépendance. Cela est inexact, Nous sommes inter-nationalistes et pour être internationaliste, il faut refuser toute forme d’oppression nationale. C’est pourquoi nous rejetons la domination de l’État fédéral qui refuse de reconnaître notre droit à l’autodétermination, notre réalité nationale et s’escrime à maintenir et à renforcer notre statut politique de minoritaire. Dans son article, Marc Desnoyers demande si les membres de QS seraient toujours souverainistes si le Canada était dirigé par un parti de gauche qui partagerait notre vision des choses ? L’oppression de la nation québécoise par l’État canadien n’est pas le fait d’un parti politique, mais de l’État canadien dans sa conception même qui refuse le caractère multinational de la société canadienne. Si le Canada était dirigé par des progressistes, cela jetterait les bases d’une alliance politique pour en finir avec l’État canadien, réaliser notre indépendance et pour établir de rapports libres et égalitaires entre toutes les nations que l’on retrouve sur le territoire actuel de cet État et tout particulièrement avec les nations autochtones.

Être indépendantiste, c’est affirmer que nous ne négocierons pas ce droit à l’autodétermination, mais nous l’appliquerons selon les modalités qu’aura définies la nation québécoise dans l’exercice de sa souveraineté populaire. Il faut refonder le mouvement souverainiste autour de l’articulation d’un projet social égalitariste, d’un projet national de rupture claire avec l’État canadien et du plein exercice de la souveraineté populaire. Cette orientation a le mérite de la cohérence et d’une radicalité démocratique débouchant sur notre proposition de l’élection d’une assemblée constituante pour définir le Québec indépendant que nous voulons.

Pour ce qui est de l’identité québécoise, Québec solidaire comprend qu’aujourd’hui comme hier, cette identité est en redéfinition, que le Québec de demain s’appuie sur celui d’hier, mais qu’elle se forge aussi des apports des populations immigrantes et que la culture québécoise sera celle de la solidarité, de l’égalité et du refus de toute forme d’oppression. La langue française doit être défendue comme un creuset de l’unité démocratique de l’ensemble du peuple québécois. La définition de la culture du peuple québécois ne sera pas indépendante des débats qui s’y produiront et des apports qui s’y feront… Elle ne devrait pas surtout être une culture officielle… car qu’est-ce que la culture pour un peuple sinon l’ensemble des créations issues ses expériences historiques et qui scandera sa marche vers une société plus libre, plus juste, plus égalitaire et plus solidaire. Notre vision de l’unité du peuple québécois ne relève ni du nationalisme étroit qui veut faire passer un serment du test aux nouveaux arrivants sur le ralliement à nos valeurs, ni le multiculturalisme qui cherche à utiliser la promotion de la diversité pour masquer les formes bien réelles d’oppression nationale qui existe au Canada. Notre conception de l’unité se forge dans le creuset des combats d’hier et d’aujourd’hui sur le terrain des luttes sociales et nationales. Défendre des orientations qui correspondent aux intérêts de la majorité de la population du Québec, de ce n’est pas se minoriser, c’est prendre le seul chemin qui permettra que la majorité sociale devienne une véritable majorité politique. Et c’est pourquoi, notre conception de la lutte pour l’indépendance nous apparait plus inclusive et plus emballante que cette volonté de démarcation des vrais et des faux souverainistes, des faux et des vrais québécois-e-s.

Alors, croire que le regroupement actuel de la gauche et de la droite dans un grand parti est une assurance de l’unité des indépendantistes, c’est la pire des illusions. Car, c’est également nourrir l’espoir antidémocratique que l’existence d’un parti nationaliste qui cherche à maintenir le maximum d’imprécisions sur son projet social empêchera que les opinions clairement de gauche comme de droite puissent s’exprimer. Le Parti québécois serait-il devenu le parti du refus de l’expression démocratique de la diversité sociale et politique au Québec ? Ce serait se donner une bien triste vocation.

Mots-clés : Québec
Bernard Rioux

Militant socialiste depuis le début des années 70, il a été impliqué dans le processus d’unification de la gauche politique. Il a participé à la fondation du Parti de la démocratie socialiste et à celle de l’Union des Forces progressistes. Militant de Québec solidaire, il participe au collectif de Gauche socialiste où il a été longtemps responsable de son site, lagauche.com (maintenant la gauche.ca). Il est un membre fondateur de Presse-toi à gauche.

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