Édition du 17 décembre 2024

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Éducation

Quelques réflexions sur les tableaux du professeur Godbout

Luc Godbout, fiscaliste et professeur à l’université de Sherbrooke, a beaucoup participé au débat public entourant la hausse des frais. D’abord, il a proposé de mettre en place un système de Remboursement proportionnel au revenu (RPR), formule qui a inspiré le gouvernement pour sa sortie du début d’avril. Plus récemment, il vient d’offrir une analyse de l’effet des bonifications de l’Aide financière aux études (AFE) qui nous montre qu’elles sont largement bénéfiques aux étudiant-es, comme on peut le voir dans ce vidéo.

(tiré du site de l’IRIS)http://www.iris-recherche.qc.ca/

Le but de ce billet n’est pas d’attaquer la méthodologie ou même les conclusions du fiscaliste, mais de formuler certaines précisions et quelques commentaires.

Précisions

Il faut être très clair, Luc Godbout fait ses calculs sur l’ensemble du plan prévu, et non seulement sur les mesures les plus récentes. Ce n’est donc pas la nouvelle offre qui est étudiée, mais l’ensemble des mesures gouvernementales touchant l’AFE et les frais de scolarité depuis le budget de 2011.

Les tableaux présentés sont des études de certains cas spécifiques. Ce que le fiscaliste fait, c’est de prendre ce que le gouvernement a annoncé pour voir comment ça s’appliquerait sur une famille ou une autre. Ce genre de calcul prend pour argent comptant les déclarations et les évaluations de coût du gouvernement. Si ces mesures signifient des dépassements de coûts, ces calculs ne sauraient nous le dire.

Ces tableaux mesurent de façon enrichissante la question de l’exemption de la contribution parentale. L’exemption parentale, qui était à 28 000$ avant le budget 2012 et qui passera à 45 000$ selon la dernière offre, est le montant à partir duquel les parents doivent commencer à contribuer au financement des études de leurs enfants. Donc, à partir de ce montant les bourses commencent à diminuer.

Commentaires

Si ces tableaux sont instructifs, ils peuvent aussi donner une fausse impression : celle que tous les étudiant-es bénéficient d’une contribution parentale. En fait, chez les universitaires recevant de l’aide financière aux études, 65% des étudiant-es ne bénéficient pas d’une contribution parentale. Cette mesure s’adresse donc au 35% restant. Ce que nous disent les tableaux de M. Godbout, c’est que des 35% des étudiant-es qui reçoivent, environ 80% sortiront gagnant-es (ceux dont les parents font moins de 60 000$ de revenus annuels) du mélange entre les bonifications à l’AFE et la hausse des frais. Il s’agit donc de 28% des étudiant-es universitaires recevant de l’aide financière aux études et d’environ 10% de l’ensemble des universitaires.

Il faut ensuite situer ce qu’est le gain en question pour ces étudiant-es. La réduction de la contribution parentale, au sens de la loi, ne devrait pas apporter un sou de plus aux étudiant-es. En effet, au lieu de voir leurs parents contribuer, c’est maintenant l’État qui prend leur place, pour un montant équivalent. On pourra répondre, et c’est en ça que la mesure est intéressante, que, souvent, les parents ne versent pas la contribution prévue par l’État ou que la verser leur demande de s’endetter eux-mêmes. C’est exact, mais cette aide supplémentaire est loin de régler les problèmes structurels que pose l’aide financière aux études.

Après cette réforme, les montants attribués pour le logement et la nourriture qui n’ont pas été mis à jour depuis le milieu des années 1990 resteront les mêmes. Avec ou sans contribution parentale, les étudiant-es recevront toujours 7$ par jour pour se nourrir.

Enfin, la présentation de M. Godbout donne l’impression qu’il s’agit d’un package deal. Que la hausse est liée à cette amélioration de l’aide financière aux études (AFE). Pourtant, ce n’est pas vraiment le cas, ou si peu. Reprenons les mesures une à une en commençant par les plus récentes. La récente amélioration des bourses coûte 39 M$ qui est pris à même un crédit d’impôt. Cette mesure, intéressante, aurait pu être faite il y a deux ans ou dans deux ans, c’est un changement administratif auquel la hausse des frais n’ajoute ou n’enlève rien : le gouvernement n’investit rien, il change des règles c’est tout. Même chose pour les nouveaux prêts annoncés en début avril, ce sont les universités qui devront les compenser par de nouveaux dons.

Enfin, pour ce qui est de l’amélioration annoncée en même temps que la hausse. Sur les 116 M$ annoncés, au moins 80 M$ servent à compenser la hausse elle-même pour les étudiant-es les plus pauvres. Il reste, au maximum, un modeste 35 M$ qui est investit pour réduire la contribution parentale. Ce petit montant est le seul lien entre les deux propositions. Il pourrait facilement être compensé par le gouvernement ou, au pire, celui-ci pourrait proposer de faire les mêmes mesure mais d’augmenter l’exemption de la contribution parentales autour de 40 000$ plutôt que 45 000$ sans augmenter ni les frais ni sa propre contribution.

En somme, les améliorations apportées au régime de bourse, en plus de ne profiter qu’à peu d’étudiant-e, ne peuvent être associées, comme le fait M. Godbout, à de la générosité de la part du gouvernement. Il s’agit au mieux que d’une forme d’utilisation intéressante des fonds de l’État. Ce type de mesure peut très bien s’appliquer sans devoir être lié à une hausse des frais de scolarité et, malheureusement, ne compense pas adéquatement la majorité des étudiant-es contre la hausse actuelle.

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