Tiré du blogue de l’auteur.
1- Le Pakistan est la victime régulière d’une multitude de catastrophes naturelles telles que les inondations, sécheresses et tremblements de terre. En juillet 2022, le gouvernement pakistanais a déclaré subir « l’évènement climatique du siècle » : les provinces du Sind, du Balouchistan et de Khyber Pakhtunkhwa ont subi des précipitations record, causant d’importantes inondations responsables de la mort de plus de 1 700 personnes et affectant directement 33 millions de personnes, selon les Nations Unies.
Aujourd’hui, les effets de ces inondations se font encore sentir. Les crues ont en effet causé des dégâts importants et durables à travers le pays, particulièrement éprouvants pour les populations vivant en zones rurales. Les inondations s’ajoutent à une série de crises qui perdurent : augmentation de la pauvreté, insécurité alimentaire à long terme, propagation de maladies comme le paludisme et la typhoïde, et perturbation de la scolarité de millions d’enfants.
Ghous Baksh, 6/12/2023
2- La période de la mousson est vitale pour le Pakistan. Elle fournit chaque année une grande partie de l’eau nécessaire aux cultures pendant la saison de croissance. Mais le réchauffement climatique rend cette période de plus en plus intense et imprévisible.
À l’été 2022, des pluies de moussons sept fois supérieures à la moyenne, conjuguées à la fonte rapide des glaciers himalayens desquels découlent les rivières, ont été dévastatrices. En s’abattant sur des sols asséchés par une canicule inhabituellement forte et prolongée au printemps, les intempéries ont transformé les ruisseaux et rivières dévalant les montagnes en fleuves de boue, de bois et de débris des infrastructures détruites par les eaux.
Plusieurs mois après ces pluies, les provinces du Sind et du Baloutchistan, les plus touchées du pays, n’étaient toujours pas entièrement libérées de l’eau qui les avait submergées. Six mois après les crues, près d’1,8 million de Pakistanais vivaient encore à proximité d’eaux de crue stagnantes, les exposant, à long terme, à un risque accru de maladies liées à l’eau. Les ménages les plus pauvres, les femmes, les enfants, les personnes âgées et les personnes handicapées sont les plus exposés. Dans les zones les plus touchées, on recense des cas de malnutrition, maladies diarrhéiques, paludisme, maladies de la peau ou encore infections des voies respiratoires.
Ramzanpur, 4/12/2023
3- Dans le 5e pays plus gros producteur de coton au monde, les inondations ont aussi affecté matériellement la population, qui a vu ses opportunités économiques s’envoler et ses revenus disparaitre. Les pluies ont dévasté plus de 600 000 hectares de culture de coton selon les autorités pakistanaises, notamment sur la rive gauche du fleuve de l’Indus. Il en va de même pour les cultures de riz et de blé sur la rive droite où près de la moitié des champs ont été engorgés. Les éleveurs non plus n’ont pas été épargnés. Plus de 700 000 têtes de bétails ont péri à travers le pays d’après les autorités nationales qui estiment à 10 milliards d’euros les pertes subies par le pays.
En conséquence directe des inondations, la Banque mondiale estime que près de 9 millions de personnes risquent de tomber sous le seuil de pauvreté, s’ajoutant ainsi aux 44 millions de Pakistanais vivant déjà sous ce seuil. Il en va ainsi d’Allah Rakhio qui, faute d’argent, a dû quitter sa maison à la suite des inondations dans l’espoir de rejoindre des terres épargnées par les eaux. En vain. À son retour chez lui, 40 jours plus tard, et sans avoir pu s’installer ailleurs, tout avait disparu. « Nos cultures, prêtes à être récoltées, ont été détruites et nos maisons ont toutes été volées. » déclare-t-il, amer, devant une situation qui se répète sans cesse. « Nous sommes rentrés chez nous sans rien. Nous avons travaillé dur, puis il a plu à nouveau. Les toits et les murs [de nos maisons] ont été détruits. ». À l’image d’Allah Rakhio, près de 20,6 millions de Pakistanais ont aujourd’hui un besoin urgent d’aide humanitaire, d’après l’UNICEF.
Ramzanpur, 4/12/2023
4- La montée des eaux a rendu très critiques les conditions d’hygiène dans certains villages, du fait du manque de système d’assainissement. En emportant des débris, de la boue, et d’autres substances, les inondations contaminent les sources d’eau potable, les rendant impropres à la consommation humaine. « Les inondations ont détruit notre environnement ; notre eau a été contaminée. Des maladies comme la malaria et la diarrhée se sont répandues. » relate Aijaaz aux équipes de SOLIDARITÉS INTERNATIONAL présentes dans le village de Ghous Baksh pour conduire une évaluation des besoins sur place. Dans les zones où l’ONG mène cette évaluation, la moitié des villages déclarent ne plus avoir accès à l’eau potable.
En se propageant, les inondations submergent les systèmes d’égouts et de drainage, ce qui entraîne des débordements et la contamination des points d’eau à proximité. D’ailleurs, la plupart des points d’eau (puits, réservoirs, stations) ont été inondés et sont soit détruits soit grandement endommagés (fissures, ruptures) ce qui compromet leur capacité à fournir de l’eau potable aux populations. « Nous avons besoin de nouvelles pompes manuelles, d’eau douce et d’un environnement propre. » explique Aijaaz.
Ghous Baksh, 6/12/2023
5- Devant des besoins en eau, hygiène et assainissement clairement identifiés, les équipes de SOLIDARITÉS INTERNATIONAL ont lancé des activités dans les zones les plus affectées du Nord de la province du Sind.
L’ONG travaille ainsi à la construction et la réhabilitation de points d’eau, en veillant à leur élévation afin de prévenir des contaminations des eaux souillées au sol et protéger les infrastructures. « SOLIDARITÉS INTERNATIONAL nous a fourni des pompes manuelles. Nous avons maintenant de l’eau propre et la pompe à eau est placée à l’intérieur de notre maison » explique Waziran, habitante du village de Ghaus Bux, dont les enfants étaient tombés malades du fait de l’eau impure. Au total 40 pompes manuelles ont été installées.
Ghous Baksh, 6/12/2023
6- Une première action d’urgence à mettre en place pour assurer la salubrité d’une zone habitée est la réhabilitation de latrines. « Un moyen pour nous de prendre soin de notre santé et de notre hygiène » assure Imam Zaadi après la reconstruction de ces latrines détruites par les inondations.
Au premier trimestre 2023, 12 villages ont pu bénéficier de l’aide de SOLIDARITÉS INTERNATIONAL. On dénombre 468 latrines construites. Un résultat qui permet de garantir la sécurité et la salubrité de l’environnement mais aussi et surtout la dignité des hommes, femmes et enfants qui y vivent.
Les prochaines interventions permettront de viser environ 15 000 personnes afin d’améliorer leur accès à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène. À l’image du point d’eau et des latrines construits dans le village de Ghous Baksh où vit Imam Zaadi : « nous sommes mieux protégés de toutes ces maladies et nous menons aujourd’hui une vie beaucoup plus saine. »
Ghous Baksh, 6/12/2023
7- Dans les premiers mois suivants les inondations, plusieurs centaines de milliers de personnes ont été déplacées selon les Nations Unies. Si certaines sont retournées dans les villages dévastés par les inondations, toutes ont dû faire face à un état de dénuement presque total. C’est pour pallier le manque de ressources de première nécessité que SOLIDARITÉS INTERNATIONAL a fourni des kits de santé, d’abris et de nourriture. Plusieurs centaines de kits d’hygiène ont été distribués. Ici, Mohammad Shoaib en liste le contenu aux cotés de Noor Jahan, bénéficiaire de cette distribution. Dentifrices, brosses à dents, savons ou encore serviettes hygiéniques constituent une première aide d’urgence pour les ménages les plus en difficulté. « L’ONG nous a guidés sur la santé et l’hygiène, nous a parlé de la prévention des maladies et nous a fourni des kits d’hygiène. » explique Abdul Ghaffar.
Point de distribution, 7/12/2023
8- Les inondations destructrices de l’été 2022 ont eu lieu dans un contexte de grave crise économique, compliquant la capacité des Pakistanais à répondre à leurs besoins vitaux. En outre, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture estime que presque la moitié de la population rurale se trouverait en phase d’insécurité alimentaire. Si plus d’un millier de kits alimentaires ont été distribués aux populations les plus vulnérables dans les premiers temps de l’urgence, SOLIDARITÉS INTERNATIONAL cherche aussi à accompagner les populations dans la durée.
SOLIDARITÉS INTERNATIONAL concentre son action sur le renforcement de la production agricole locale, en fournissant un soutien à l’élevage. Elle cherche également à soutenir les mécanismes d’adaptation au changement climatique dans les zones rurales, ce qui renforce la résilience des populations et réduit la pauvreté à long terme. Cela implique d’améliorer l’accès à des moyens de subsistance durables, de développer les compétences et les opportunités d’emploi, tout en élargissant le soutien aux secteurs tels que l’élevage, la volaille, la pêche, les entreprises artisanales et l’artisanat.
Point de distribution, 7/12/2023
9- Renforcer la résilience des communautés vulnérables aux effets du changement climatique est un objectif clef de SOLIDARITÉS INTERNATIONAL. Pour cela, l’ONG collabore avec des partenaires locaux qu’elle forme, afin de développer des compétences locales déjà présentes. Sur la vingtaine de salariés de l’ONG sur place, seuls deux sont des staffs internationaux, le reste étant constitué de Pakistanais et Pakistanaises.
L’ONG conduit des ateliers de sensibilisation aux connaissances et bonnes pratiques en matière de nutrition, de santé et d’hygiène. Ces ateliers contribuent à réduire le taux de maladies évitables et à améliorer la qualité de vie globale des populations locales.
Sensibilisation aux bonnes pratiques en matière d’hygiène, village Basham Jakhrani, 7/12/2023
10- « [SOLIDARITÉS INTERNATIONAL a] créé un comité, dont je suis membre, et nous résolvons nos problèmes quotidiens grâce à une contribution collective » raconte Abdul Ghaffar. Un tel comité permet d’intégrer pleinement les habitants à la prise de décision et de travailler à la résilience des populations sur le long terme. Au Pakistan, les inondations seront nécessairement amenées à se reproduire. Violentes, désastreuses, meurtrières, elles ne doivent toutefois pas occulter que le pays s’apprête à souffrir de nombreuses sècheresses et d’un manque cruel d’eau potable dans les années futures. Réunir les communautés vulnérables au changement climatique et travailler à leurs côtés permet de renforcer leur résilience en garantissant la continuité de l’approvisionnement en eau. Surtout, cette méthode permet de souligner l’ultra nécessité de la préservation de l’eau et d’accompagner ces communautés dans les initiatives intelligentes face au climat qu’elles sont les premières à porter.
Village Sher Ali, 8/12/2023
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