Édition du 24 septembre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Pourquoi certains péquistes s’en prennent à Québec solidaire ?

Un participant à la rencontre des présidents d’association de comté du Parti québécois réclamait sur les ondes de Radio-Canada que ce parti considère désormais Québec solidaire comme un adversaire et qu’il soit « attaqué » dans son comté d’Hochelaga-Maisonneuve.

Coincés entre la gauche et la droite dans leur parti, certains membres du PQ songent à attaquer sur leur gauche, négligeant le souvenir des reculs politiques qu’ont représenté les années du gouvernement des Libéraux pour notre nation. Ces gens se trompent sur le danger que cette droite arrogante fait peser sur l’avenir du Québec.

Les sociaux démocrates qui restent au PQ en viendraient donc à s’en prendre à d’autres sociaux démocrates, indépendantistes de surplus. Ils le feraient en renonçant au renouvellement de ce courant politique qui a marqué l’histoire du Québec et qui tient une place notable sur l’échiquier mondial.

Il y a pourtant un avertissement pour cette formation, devant les modestes gains de Québec solidaire, c’est qu’il faut moderniser constamment et sans relâche son programme politique. C’est ainsi qu’on peut tenir compte de ce que la population fait comme expérience de progrès. Dans les sociétés modernes, on s’informe auprès de média qui renouvellent en permanence leurs reportages et y exposent les avancées de leur univers mondialisé. Ce n’est qu’ainsi que ces programmes peuvent être à la hauteur de ce qu’exigent les citoyens qui ne semblent pas aussi intoxiqués qu’on le dit dans certains milieux par la propagande multi-médiatique.

On a vu en effet beaucoup de contestation de la manière dont les Libéraux se sont consacrés à reproduire les politiques néolibérales dont on voit partout s’afficher les périls. Les Québécois qui on renoué avec la révolte populaire n’ont pas écouté le chant des sirènes libérales, c’est le moins qu’on puisse dire. Cela devrait se traduire par un apprentissage de la formation de Madame Marois qu’il serait suicidaire de revenir à ce type de gestion même pour rendre plus durable son pouvoir minoritaire.

La modernité exige, surtout en politique, que le nouveau l’emporte sur l’ancien. Et les Libéraux, même forts à l’Assemblée nationale, représentent toujours ce passé de collusion qui a mis aux commandes du Québec les plus voraces de nos maîtres. Ce n’est pas rien. S’ils veulent aller en élection, ils auront du mal à expliquer comment ils se sont démarqués de ce passé incriminant.

Il ne s’agit donc pas de suivre le courant insufflé par ces fraudeurs à grande échelle, mais plutôt d’expliquer, de manière à ce que leurs stratèges le comprennent bien eux aussi, que la fête est terminée et qu’il leur faut admettre de respecter ceux qui ont le mieux reflété le souhait qui s’est exprimé dans les urnes. S’ils devaient revenir devant les électeurs, ils leur resteraient à démontrer que ce qui les a poussés hors du pouvoir est derrière eux. Ils auraient à affronter de nouveaux leurs vieux démons : leur proximité avec un monde des affaires véreux.

Une part du soutien traditionnel du PQ se serait déplacée vers Québec solidaire et Option Citoyenne. La dialectique démocratique veut que ce qui se sclérose, dans les institutions politiques notamment, soit remplacé par du plus dynamique. Québec solidaire n’est pas né du néant. Beaucoup de monde constataient qu’il y avait un vide à gauche au Québec. Et nous avons tenté d’y remédier. Cette initiative a eu le résultat, par exemple, que les journalistes se sont mis à expliquer aux informations l’origine révolutionnaire de l’apparition de ces deux tendances en politique. Il y avait non seulement un vide, mais on avait gardé trop longtemps dans les milieux politiques refermés sur eux-mêmes ces clarifications idéologiques. On avait même balayé sous le tapis la longue tradition de gauche du mouvement indépendantiste. Qui se souvient de Parti pris qui a nourri notre jeunesse politique des plus nobles conquêtes de la révolution ?

On ne peut pas nier que le PQ a su élaborer une plate-forme électorale qui se démarquait de celle des Libéraux avec le souci de porter à l’Assemblée nationale une volonté populaire qui s’exprimait depuis deux ou trois ans de voir Charest dégager. Uniquement pour cette réussite, il faudrait louanger les stratèges de ce parti. Mais battre Charest dans les urnes n’enlève pas la responsabilité de le remplacer par du neuf. Si l’aile plus à droite du PQ demande de s’en prendre à Québec solidaire, il faudrait leur expliquer que le risque ne devrait pas venir du côté de la gauche puisque la rue, les pétitions, les lignes ouvertes, les analyses politiques issues des citoyens eux-mêmes ont mis la table pour le pouvoir du PQ. Sans l’insurrection citoyenne des étudiants ciblant le gouvernement des Libéraux, personne n’aurait vu l’urgence ou la nécessité de mettre le PQ au pouvoir. En effet son escalade jusque là s’est fait dans la tourmente et le PQ ne pourra pas esquiver longtemps sa dette politique envers la population excédée par le long règne de Charest.

Si le climat général n’avait été pour rien dans le retour au pouvoir du PQ, un courant d’opinion gagné aux promesses de prospérité des Libéraux aurait pu tout aussi bien l’emporter. Comme disait Pierre Dubuc du SPQ-Libre et de « l’aut’journal » : « Nous l’avons échappé belle … » Il a fallu pour cette mince victoire convaincre des électeurs des Libéraux de changer de camps. Et c’est dans ce sens que devrait continuer la lutte contre une droite aigrie d’avoir été chassé. Il faut donc maintenir à un niveau élevé le combat contre les Libéraux et la CAQ, son petit frère.

Pour le PQ, le danger ne vient donc pas de la gauche, je le redis, mais d’une droite fédéraliste majoritaire qui trépigne de revenir sur les banquettes du côté droit de la chambre.

Remarquons qu’il reste deux opportunités au PQ :

La première, celle de riposter aux argumentaires des Libéraux et de la CAQ de manière à exposer aux yeux de tous, en même temps qu’aux stratèges des troupes fédéralistes, que ce n’est pas le temps de déclencher des élections tout simplement parce que, compte tenu de l’histoire récente d’un passé douteux, les Libéraux y perdraient sans doute leurs dernières plumes et la CAQ s’endetterait à ne pas pouvoir tout rendre une fois au pouvoir sans être soupçonnée de corruption. On connait la méthode de financement des partis de droite maintenant !

L’autre fenêtre d’opportunité, c’est celle qui à mon avis, marquera l’évolution politique du Québec dans le sens des beaux jours du PQ. L’exercice nous rapprocherait de l’indépendance et ramènerait à l’avant-plan cette solution pleine de promesses dont nous devons absolument montrer l’urgence pour, non seulement sortir du bourbier laissé par les Libéraux, mais pour insister sur leur stratégie coûteuse du maintien de liens avec un Canada tout à fait réactionnaire et sclérosé qui nous tuent à petit feux, nous condamnant à un état de subalterne permanant jusqu’à ce que nous décidions de choisir l’émancipation. Cette voie devrait nous conduire à l’unité des forces souverainistes pour extirper notre nation du cloaque canadien.

Guy Roy, membre de la FTQ et militant de Québec solidaire dans Lévis

Guy Roy

l’auteur est membre du collectif PCQ de Québec solidaire à Lévis.

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