Selon eux :« Un gouvernement Harper majoritaire signifierait une attaque sans précédent portée contre le mouvement syndical, similaire à celle à laquelle nous assistons au sud de la frontière(…) Une victoire éclatante du Bloc québécois est la contribution attendue du Québec à la défaite du Parti conservateur. Une telle victoire serait également annonciatrice d’un nouvel élan vers l’indépendance du Québec… »
En quoi une victoire du Bloc peut-elle contribuer à la défaite des conservateurs ? Le Bloc peut affaiblir les Conservateurs au Québec, mais Harper compte faire des gains en Ontario. Dans cette éventualité c’est le NPD qui sera le grand perdant. Il peut aussi enlever des votes aux Libéraux et de ce fait renforcer les Conservateurs.
Alors de quelle victoire parle-t-on au juste ? Peut-être bien un gouvernement Conservateur minoritaire, qui de toutes façons a démontré qu’il pouvait faire ce qu’il voulait ? Dans une telle optique une victoire des Libéraux, serait l’apothéose ! On nage en plein surréalisme, avec des victoires comme celles-là on n’a plus besoin de défaites. Quoiqu’on en dise en bout de piste nous sommes condamnés, ce sera un gouvernement conservateur ou libéral, comme c’est le cas depuis toujours.
Est-ce que cela fait avancer la politique ? Faut-il rappeler à messieurs Dubuc et Laviolette les ingérences frauduleuses du Parti Libéral lors de la dernière campagne référendaire dont la commission Gomerey a largement fait état ? C’est aussi le Parti Libéral qui a sabré dans l’assurance-emploi, continué dans la voie du Libre-échange contrairement à ses promesses et engagé le Canada dans la guerre en Afghanistan. Faut-il rappeler aussi que le Bloc a utilisé la même logique pour défaire les Libéraux et mettre les Conservateurs au pouvoir en 2008 ?
En étant acteur sur la scène politique fédérale, le Bloc s’est finalement pris à son propre piège et est devenu, à son corps défendant, un mode d’intégration du Québec au Canada. N’a-t-il pas défendu l’importance pour le Canada d’avoir un siège au Conseil de sécurité de l’ONU ? Défendu la présence des troupes canadiennes en Afghanistan ? Donné son accord pour l’achat des F-35 (à conditions qu’il y ait des retombées économiques pour le Québec) ? Donné son accord à l’ALENA ? Tout cela n’a rien d’annonciateur d’un nouvel élan vers l’indépendance du Québec.
Si on veut véritablement changer la politique au niveau fédéral, il faut s’appuyer sur la lutte des mouvements sociaux et du mouvement syndical, en tissant des liens entre les progressistes au Canada-anglais et au Québec. Mais il faut surtout être honnête, en politique il n’y a pas de raccourcis et surtout pas de raccourcis stratégiques. Pour construire un parti politique de gauche au niveau canadien, la question de la reconnaissance du droit à la souveraineté du Québec est une nécessité incontournable, à laquelle on doit s’appliquer. Le NPD ne correspond pas pour l’instant à cette réalité, car ses politiques restent guidées par des intérêts électoralistes, par exemple son appui à la loi sur la clarté référendaire en 2005.
Même si la construction de cette alternative indépendante de gauche est un défi de taille, il jouera un rôle majeur pour l’avenir des militantes et militants progressistes au Canada et au Québec et sera beaucoup plus utile dans la défense des aspirations nationales du Québec.