Tiré de Médiapart.
Il y a un an, le 15 août 2021, l’Afghanistan basculait de nouveau sous le régime des talibans. Depuis, ces religieux partisans d’un islam « pur et parfait » ont multiplié les restrictions visant les femmes (lire la série de reportages réalisés en janvier par Rachida El Azzouzi et Mortaza Behboudi). Dans un contexte économique et social catastrophique, tous les ingrédients pour une nouvelle guerre civile sont présent. Entretien avec Hervé Nicolle, codirecteur du centre sur les migrations Samuel Hall, qui mène des enquêtes de terrain dans le pays.
Mediapart : Un an après la prise du pouvoir par les talibans, quelles sont les différences que vous avez observées avec leur précédent régime ?
Hervé Nicolle : La première différence que l’on peut observer avec le précédent régime taliban, c’est le pragmatisme. Entre 1996 et 2001, l’instrumentalisation idéologique et religieuse visait à établir un islam pur et parfait dans les limites du pays. Il fallait donc repousser tout signe de modernité (communication), toute forme de décadence (opium), et tout contact avec le monde extérieur, afin de créer un islam cristallin en terre afghane. À l’intérieur du pays, ce rigorisme a été contre-productif car les talibans, qui ne pouvaient pas gouverner et assurer des services basiques à la population, se sont en plus aliéné le soutien populaire. À l’extérieur, ils n’ont pas réussi à créer de véritable soutien, de coalition favorable à leur maintien au pouvoir, à l’exception du Pakistan voisin et du Qatar. Résultat : sans soutien, le régime s’était effondré en quelques semaines.
Aujourd’hui, c’est très différent car les talibans historiques, dont beaucoup sont encore présents dans le gouvernement actuel, ont fait l’analyse scrupuleuse de leurs erreurs. Cela s’est vu dans la manière stratégique de conquérir le pays par le Nord tout en utilisant des tactiques d’encerclement des capitales provinciales en coupant les axes de circulation… Cela se voit aussi par la manière d’utiliser les médias en communiquant avec les armes de l’Occident et en donnant aux journalistes ce qu’ils veulent entendre sur les femmes et l’éducation, tout en faisant exactement le contraire…
- Ayant vécu sous de nombreux régimes, de nombreux Afghans se demandent combien de temps celui-ci va durer.
Cela se voit surtout par la manière d’utiliser l’héroïne, produit à 90 % en Afghanistan, dont on estime que les niveaux de production sont aujourd’hui proches des sommets de 2009 ou 2017… Cela se voit enfin par les tentatives, sans réel succès toutefois, de discuter avec la Chine, la Russie, le Pakistan, l’Iran, la Turquie et bien sûr le Qatar, afin de s’assurer d’un soutien (passif ou actif) régional et de constituer un front des « bonnes volontés » anti-occidentales. Ces discussions tournent autour des matières premières avec la Chine (cuivre, or, lithium) mais ont peu abouti, autour du contrôle du trafic d’héroïne avec l’Iran et des flux migratoires avec Pakistan et Iran.
D’un autre côté, il faut sortir des logiques monochromes et des discours trop dichotomiques sur les talibans. D’abord, il y a probablement plus de conflits qu’avant au sein de la nébuleuse des talibans, qui est tout sauf un groupe uniforme et centralisé. Il y a des « politiques », des « théologiques », des « pro-Pakistanais », des nationalistes, des sympathisants pro-Al-Qaïda… Il y a les sujets qui fâchent, comme l’éducation, les filles, l’opium, etc. Ensuite, il y a une montée de l’État islamique (EI), avec le risque de voir celui-ci fédérer des groupes tadjiks (groupe minoritaire de la région du Panchir) opposés aux talibans ; ce ne serait pas le moindre des paradoxes de voir d’anciens moudjahidines pro-Massoud rejoindre les rangs de l’EI… Enfin, le pays n’a pas réussi à sortir de son isolement international ou économique.
Ce qui est certain, c’est qu’en 2001 comme en 2022, il est impossible de gouverner sans ressources. Or, on sait que les ressources ont été bloquées par les Américains, par la Banque mondiale, par les bailleurs de manière générale, à l’exception de certains programmes humanitaires, ce qui limite évidemment de manière conséquente l’accès à des ressources pour financer les services. On sait aussi que les Afghans, en particulier les jeunes urbains, ont changé en vingt ans. Il sera donc très difficile de conserver une population aussi jeune sous le couvercle répressif sans ressources, sans salaires, sans nourriture, très longtemps. Les ingrédients d’une guerre civile, qui peut se déclencher sous différentes formes, sont déjà là à moyen terme.
Enfin, l’effondrement rapide – vingt ans seulement – du gouvernement mis en place par l’Occident a constitué une étape importante dans une lutte séculaire pour l’autodétermination, contrecarrée par une intervention extérieure. Après plus de douze ans de recherche sur place, j’ai compris que pour beaucoup les talibans ne sont qu’un épisode, une itération de ce processus et non une aberration. Ayant vécu sous de nombreux régimes, de nombreux Afghans se demandent combien de temps celui-ci va durer.
Il y a un an, les observateurs prédisaient que le régime taliban lâcherait du lest pour faire face à une situation économique et humanitaire désastreuse en bénéficiant de l’aide internationale, qu’en est-il ? Les bailleurs ont-ils des moyens de pression ?
L’analyse optimiste conduite il y a un an relevait du fantasme d’expert. Et pourtant, les signes étaient tous présents dans les discours de Seraj Haqqani, Haibatullah Akhundzada ou Zabihullah Mujahid, avec des nuances mais un fond commun. Aujourd’hui, le pays connaît une crise économique et humanitaire de plus en plus grave : 97 % des Afghans vivent sous le seuil de pauvreté, contre environ 50 % en 2020, ce qui était déjà alarmant. Concrètement, cela veut dire que la quasi-totalité de la population vit avec moins de 2 dollars (près de 2 euros) par personne et par jour pour payer loyer, nourriture, dettes, etc.
Les gens ne peuvent donc pas payer leur loyer, ils vivent dans un système d’endettement généralisé, n’ont pas de quoi acheter une nourriture suffisante pour les enfants et doivent se résoudre à des stratégies de survie de plus en plus désespérées dans un contexte où les systèmes de solidarité traditionnels sont en train de s’éroder. L’impact de la crise économique est immédiat – mais aussi de long terme, sur les générations à venir. Selon les recherches d’Amnesty International, les taux de mariages d’enfants, de mariages précoces et de mariages forcés sont en forte hausse en Afghanistan sous le régime taliban.
Quelle réponse humanitaire ? Bien que les États-Unis et d’autres pays aient commencé à acheminer de l’argent en Afghanistan par le biais des Nations unies et d’autres groupes qui contournent les talibans, l’argent qui passe par ces canaux ne représente qu’une infime partie des milliards de dollars d’aide humanitaire dont le pays dépendait auparavant. Il y a plus de 8 à 9 milliards bloqués, et il faudrait environ 4,5 milliards par an aux Nations unies et environ 5 à 7 milliards en plus pour faire tourner le pays. Aujourd’hui, il n’y a rien. Rien pour l’éducation, rien pour la santé, quasiment rien pour l’aide alimentaire. Quarante millions de personnes vivent donc sans aucun appel d’air financier.
Dans les faits, même si on nous parle d’un meilleur accès des organisations sur place, l’aide non seulement a diminué au cours de l’année dernière, mais elle n’atteint pas de manière neutre ni égale les populations. L’inégalité de l’aide est soulignée dans nos études : elle se fait souvent sur la base des relations personnelles avec les chefs communautaires ou selon les lignes ethniques. L’absence d’aide dans de nombreuses communautés exacerbe la crise. Les populations nous disent qu’avant août 2021, bien qu’en proie à la corruption et au népotisme, les organisations d’aide étaient accessibles. En revanche, immédiatement après les événements d’août 2021, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA) a signalé que 54 % des partenaires humanitaires avaient interrompu ou suspendu leurs programmes. Le premier message est donc le suivant : les Afghans ont besoin de voir les investissements des donateurs déboucher sur une aide impartiale et vers des services, notamment en matière d’éducation et de santé.
- Sans une intervention humanitaire soutenue et à grande échelle, les conditions de vie continueront à se détériorer.
Il nous manque des données : je voulais vous donner des chiffres sur la migration, mais aucun chiffre n’a été publié depuis le 1er décembre 2021. Les Nations unies et les organisations humanitaires et de développement doivent être plus ouvertes en ce qui concerne leurs données, car beaucoup d’informations restent privées pour le moment. Le fait de ne pas publier, promouvoir et partager les données a un effet négatif important sur la capacité des organisations humanitaires et de développement à répondre aux besoins des Afghans.
La crainte de légitimer les autorités ou de partager des données légèrement dépassées entrave l’aide et l’assistance aux Afghans qui vivent actuellement une crise humanitaire. Le contexte actuel est dynamique et fluide, ce qui rend le partage des données plus important que jamais. Cela est particulièrement vrai dans le contexte de la répression des journalistes et des activistes dans le pays, qui étaient auparavant une voix importante pour le peuple afghan et un moyen d’évaluer la situation sur le terrain.
Les bailleurs internationaux n’ont pas suffisamment répondu présent pour financer cette hausse des besoins. Sans une intervention humanitaire soutenue et à grande échelle, les conditions de vie continueront à se détériorer. Il semble peu probable qu’une telle intervention ait lieu de sitôt, des milliards d’actifs de l’ancien gouvernement étant toujours gelés. La Banque mondiale a transféré des centaines de millions de dollars à l’Unicef (le Fonds des Nations unies pour l’enfance) pour fournir une assistance immédiate, et l’Agence américaine pour le développement international a annoncé qu’elle fournirait 308 millions de dollars supplémentaires d’aide humanitaire à l’Afghanistan en 2022 - mais cela reste bien en deçà de l’appel de fonds de 4,5 milliards de dollars lancé par les Nations unies pour aider les Afghans les plus menacés.
Enfin, il y a aussi l’impact de l’Ukraine. Les quelques fonds alloués à l’aide humanitaire d’urgence sont également minorés en raison de l’augmentation des prix des denrées alimentaires dans le monde ces derniers mois, impact direct du conflit russo-ukrainien. Les organisations humanitaires ont estimé que les coûts de l’aide humanitaire aux Afghans pourraient augmenter de 20 % à cause de la guerre en Ukraine.
Samedi dernier, des femmes ont tenté de manifester à Kaboul, mais leur rassemblement a été réprimé. Est-ce un signe de résistance de la société civile qui pourrait gêner les talibans et leur volonté d’invisibiliser les femmes ?
Les photos prises lors de ces manifestations montrent clairement que ces femmes sont issues d’un milieu socioéconomique très privilégié et généralement urbain. Ces manifestations, qui étaient devenues plus rares ces derniers mois, sont surtout une manière pour les élites du pays restées sur place, proches de la diaspora, de s’adresser aux internationaux : n’oubliez pas les femmes, n’oubliez pas l’Afghanistan.
Cela ressemble aussi à un chant du cygne. Car ces mêmes manifestantes, bien avant la prise de pouvoir d’août 2021, soulignaient qu’il n’y avait rien à attendre des talibans. Alors que les Occidentaux en étaient encore à se demander si ces derniers avaient changé, si les filles auraient accès à l’éducation, si le nouveau gouvernement accorderait ou non hospitalité à Al-Qaïda sur le sol afghan… ces mêmes femmes nous disaient déjà que l’invisibilisation des femmes comme de la société civile était en cours. Et, à terme, inéluctable.
- Les femmes restent l’enjeu social mais aussi politique central pour les talibans.
Donc, sont-elles des signes de résistance de la société civile ? très certainement, elles sont des actrices politiques, courageuses, qui rappellent que les Afghans n’ont jamais abdiqué. Manifester aujourd’hui, dans le Kaboul de l’été 2022, est bien plus risqué que ça ne l’était il y a un an. Ces femmes sont donc dans la rue au risque de leur vie. C’est un courage et une résistance politiques qui sont aussi des symptômes de désespoir. Peuvent-elles gêner les talibans et leur volonté d’invisibiliser les femmes ? les femmes que l’on voit dans les manifestations sont davantage présentes et visibles au sein de la diaspora ou des médias internationaux que dans la population afghane, où elles sont de fait inaudibles.
Mais oui, la question de la visibilité sociale et politique des femmes est déterminante. Ce n’est pas seulement une question d’égalité ou de discrimination, comme nous comprenons souvent cette problématique. C’est avant tout une question stratégique pour les talibans, qui a été au cœur de la reconquête depuis plus d’une décennie, village par village. Les femmes restent l’enjeu social mais aussi politique central pour les talibans. Si vous voulez conquérir un village, vous devez vous assurer que les femmes – qui représentent le lien communautaire, le lien entre vie domestique et vie collective – sont mises au pas. Et c’est pour ça que la justice talibane, par exemple, s’est autant intéressée aux femmes. Et c’est aussi pour ça que certains groupes talibans ne sont pas toujours fermés à l’éducation des filles, à une forme de justice plus souple que la charia pour les femmes… D’abord pour des raisons politiques, stratégiques, sous le maquillage idéologique de la charia.
Mais ces derniers mois confirment un virage idéologique plus radical, une victoire des théologiens rigoristes, au sein de la nébuleuse talibane. Il s’agit de contrôler la population en contrôlant l’espace privé et public des femmes, c’est ça l’enjeu pour eux. Dans les faits, les talibans ont annoncé au moins seize décrets qui réduisent les droits des femmes depuis leur prise de pouvoir en Afghanistan en août 2021. En mai, leur droit de se déplacer librement en dehors de leur domicile a été restreint – un droit sans lequel il est difficile de jouir de tous les autres droits.
Les personnes que nous avons interrogées ces derniers mois ont fait l’état de restrictions accrues de semaine en semaine. Dans le Nord, à Balkh, les femmes sont terrifiées à l’idée de sortir de chez elles, elles ont peur d’être battues si elles ne portent pas les vêtements appropriés ou ne respectent pas les normes des talibans concernant les femmes. Les personnes interrogées ont également fait état d’une augmentation des postes de contrôle et des couvre-feux à 20 heures en Afghanistan, ce qui a empêché de nombreuses personnes de se rendre dans les zones urbaines ou les villes, par peur des talibans.
Dans le Sud, les femmes interrogées à Kandahar ont parlé de personnes de leur communauté qui donnaient des instructions aux chauffeurs de taxi pour qu’ils ne prennent pas de femmes sans chaperon - même dans les cas où le mari, le fils ou les membres de la famille d’une femme ne pouvaient pas l’accompagner parce qu’ils travaillaient ou essayaient de trouver du travail. Dans l’Ouest, à Hérat, les cas de dépression, de suicide augmentent de jour en jour, en raison de la réclusion des femmes dans les foyers, de l’impossibilité pour les jeunes femmes nées après 2002 d’accéder à l’éducation ou à un travail, de la violence domestique également.
On a vu au moment de la guerre en Ukraine se manifester un élan de solidarité envers les réfugiés ukrainiens, peut-on dire que pour les Afghans les grandes déclarations n’ont guère été suivies d’effets ?
Déjà, il faut relativiser la réalité et la portée des grandes déclarations, en particulier de la France sur l’Afghanistan. Il n’y en a pas eu tant que ça si par « grandes déclarations » vous entendez un discours appuyé sur des principes, des valeurs ou des normes de droit. On est encore une fois restés sur le fameux discours un brin orientaliste de l’amitié franco-afghane, où il s’agissait d’accueillir des quotas spécifiques d’Afghans à un moment où la population entière aurait dû bénéficier d’un statut de réfugiés prima facie, en tant que groupe collectivement persécuté et éligible au statut de réfugié.
À la place, on a eu quelques milliers d’Afghans qui ont pu fuir le pays sur la base de listes souvent arbitraires et en fonction des réseaux d’entraide de la diaspora ou des médias, en fonction aussi de leur action aux côtés de la France depuis vingt ans. Beaucoup, presque 3 000, sont sortis en août et septembre 2021 ; d’autres ont suivi, plus discrètement et au compte-gouttes, depuis Mazâr-e Charîf ou depuis le Pakistan ou l’Iran. Il y a une semaine, jour pour jour, un collègue afghan a ainsi pu retrouver sa femme et ses deux enfants après un an de séparation dans des conditions très difficiles. Il faut saluer la continuité de ces efforts. Mais au regard de la situation de persécution et d’insécurité vécue par les Afghans aujourd’hui, on peut en effet se dire que ces 3 ou 4 000 Afghans évacués depuis l’Afghanistan vers la France ne représentent qu’un nombre limité et peu en rapport avec les risques de persécution et de mort encourus par de nombreux Afghans qui ne souhaitent pas d’un futur avec les talibans pour leur pays.
La deuxième chose à souligner, c’est la question de l’intégration. En mai dernier, le cas des 500 Afghans à Pantin, chassés par la police de leur parking, a montré que l’accueil n’a pas toujours été pensé. Or, si vous ne pensez pas l’accueil en anticipant a minima les conditions d’hospitalité sociale, économique, vous vous contentez d’entasser des populations sans leur donner de réelles perspectives et vous générez en plus une stigmatisation et un discours de rejet. Sans accès à la santé, à l’éducation, à la formation, à la langue, les réfugiés que vous accueillez aujourd’hui sont condamnés à une forme inéluctable de précarité, de double marginalisation : ils ne sont plus de là-bas et ils ne seront jamais d’ici. Cela s’applique aux Afghans comme aux Ukrainiens.
Et c’est là que l’absence de « grands discours » est le plus problématique à mon sens – si nous accueillons 4 000 Afghans ou 100 000 Ukrainiens, en tant que réfugiés et selon une compréhension de la Convention de Genève à géométrie variable, il est aussi de notre responsabilité de fournir à ces gens les conditions d’une possibilité d’intégration sociale, économique et, pour ceux qui resteront en France, de citoyenneté. On en est loin à l’échelle du gouvernement, même si certaines mairies font de gros efforts avec des associations d’aide à l’échelon local.
Enfin, s’agissant de la comparaison entre Afghans et Ukrainiens, j’avoue avoir été surpris par la mobilisation assez remarquable, au début, du gouvernement et de nombreuses mairies en faveur des Ukrainiens. Cela interpelle évidemment, et cela suggère immanquablement que le narratif hégémonique est que les Ukrainiens sont plus solubles dans la société française, pour des raisons culturelles, religieuses, etc. On a entendu des choses similaires dans les médias américains au début du conflit : « Les Ukrainiens sont comme vous et moi », sous-entendu : on pourrait être à leur place, ce n’est pas comme d’habitude une guerre dans un pays satellite à mille lieues de nos capitales occidentales.
La différence dans les élans de solidarité en faveur des réfugiés afghans et ukrainiens est un symptôme de cet état d’esprit, de ce conditionnement politique et médiatique. Ils ne sont même plus questionnés. On est donc sur une forme de différentialisme très dangereux, une forme d’héritage des thèses de Samuel Huntington sur le choc des civilisations, qui nous fait oublier les principes et le droit. Pour autant, il ne s’agit pas d’une compétition ou d’une quantification entre réfugiés de tel ou tel pays. Je pense qu’il faut avoir l’honnêteté de reconnaître la réalité de ce réflexe différentialiste à l’égard du « plus ou moins autre ou assimilable ». C’est du racisme. Mais je pense aussi qu’il faut aussi et avant tout s’assurer de donner les meilleures chances possible aux familles des 4 000 Afghans et 100 000 Ukrainiens qui ont trouvé un asile temporaire ou permanent chez nous.
François Bougon
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