Pour Daniel Boyer, président de la FTQ, « celui qui a dit, au soir du 7 avril, qu’il allait être le premier ministre ’de tous les Québécois’ ne peut décréter une série de mesures qui auraient pour effet, une fois de plus, de détériorer le climat de travail au sein des réseaux de la santé et de l’éducation ainsi que de la fonction publique. Et qui auraient aussi comme effet de détériorer la qualité des services publics.
« Nous demandons à Monsieur Couillard d’attendre le débat avant d’appliquer certaines conclusions du rapport qu’il a commandé aux économistes Claude Montmarquette et Luc Godbout, de Cirano, un think-thank porté vers la droite. Si le rapport a raison de proposer une réflexion sur la fiscalité et un examen détaillé des programmes existants, il a tort de recommander des mesures draconiennes à court terme, qui auraient pour effet de disloquer encore plus le secteur public.
« Nous nous attendons à ce que le nouveau gouvernement respecte les engagements conclus dans les dernières conventions et qu’il fasse preuve de bonne foi lors du renouvellement prochain des conventions collectives des secteurs publics et parapublics. La ’réconciliation’ est arrivée, a dit M. Couillard… C’est le contraire de la confrontation… », ajoute Daniel Boyer.
Du déjà vu
Pour la FTQ, la situation ressemble étrangement à la situation de 1993-1994, alors que la loi 102 annonçait un gel des salaires de deux ans et la récupération de 1 % de la masse salariale, sous forme de gains de productivité ou de réductions dans les avantages sociaux. Les syndicats eurent beau proposer une série de mesures d’économie, rien n’y fit. Le gouvernement décida de procéder par voie de décret pur et simple. Certaines ententes s’ajoutèrent, à l’effet de départs hâtés à la retraite.
Loin d’être une « réussite », ces mesures ont provoqué une fuite du personnel éligible à une retraite anticipée, un fardeau de tâche pour les autres, avec tout l’accablement provoqué par le gel des salaires.
« Tout le monde convient aujourd’hui que les salariés dans le secteur public tirent de l’arrière par rapport aux autres et certains voudraient, encore une fois, s’en prendre à eux. Le temps du mépris a eu son temps.
« Nos membres sont aussi conscients que d’autres de la situation des finances publiques et ils sont prêts à participer activement au débat, à chercher et à trouver des solutions, à la condition de recevoir l’estime et le respect qu’ils méritent. »
Consultations pré-budgétaires
« À chaque année, la FTQ participe aux consultations pré-budgétaires organisées par le gouvernement. À chaque année, nous disons que la solution se trouve du côté des revenus plutôt que des dépenses et nous proposons différentes mesures. Nous avons également demandé de procéder à une révision périodique et complète des mesures fiscales afin de resserrer, voire abolir, celles qui ne sont plus justifiées au plan économique et renforcer celles qui le sont.
Le rapport des « experts »
Tout en proposant une réflexion, le rapport Montmarquette-Godbout propose par ailleurs des a priori qui dispose à toutes fins pratiques de la discussion. On va dans le détail en proposant par exemple la vente de 10 % du capital d’Hydro-Québec (une porte ouverte à la privatisation), ou encore une orientation très nette en faveur de la hausse de la tarification et des taxes à la consommation. Ce rapport, faut-il le rappeler, reprend notamment les mêmes orientations que celles de Montmarquette en 2008… Comme mise à jour, on peut se poser des questions !
« N’est-on pas en train de se substituer à ce que devrait être un débat ouvert et démocratique, sans a priori. Je le répète, a conclu Daniel Boyer, plutôt que de mettre la charrue avant les bœufs, le nouveau gouvernement devrait annoncer une vraie consultation des Québécois et des Québécoises. Sans quoi, il ne saurait agir ainsi en leur nom. »