Les objectifs des milieux d’affaires, du commerce et de l’industrie et les pressions qu’ils exercent sur les gouvernements font craindre une transformation profonde du monde de l’éducation et, tout spécialement, du secteur universitaire. La FQPPU exige que les gouvernements québécois et canadien s’engagent au grand jour à exclure les services publics, et plus particulièrement l’éducation, de cet accord commercial.
L’accord Canada-Europe favorise la levée des « barrières » qui empêchent l’investissement privé étranger dans les « marchés publics ». Cette libéralisation du commerce des services accorde une priorité aux droits des entreprises sur la souveraineté des gouvernements. En effet, il contient des dispositions de « protection des investissements », semblables à celles du chapitre 11 de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA). Celles-ci permettent aux entreprises de poursuivre des gouvernements et d’être compensées lorsqu’un service public ou, par exemple, une loi environnementale, les prive d’un marché potentiel et d’une occasion d’engranger des profits. L’accord conduit aussi à un durcissement des lois de protection de la propriété intellectuelle, ce qui pourrait miner la liberté académique et entraver la libre circulation de la connaissance.
L’approche dite de « liste négative » employée dans l’AÉCG suppose que tout service qui n’est pas explicitement exclu soit réputé « libéralisable ». Début septembre, un rapport commandé par la Fédération syndicale européenne des services publics (FSESP) et par la Chambre fédérale autrichienne du travail estimait que cette approche « affaiblit les protections de services publics tels que l’éducation ». Or, à l’heure actuelle, le gouvernement canadien ne s’est pas engagé ouvertement à exclure les services publics de l’accord, dont les négociations sont entourées du plus grand secret. La FQPPU considère inadmissible que les négociations soient ainsi menées à huis clos et en l’absence de représentants légitimes et redevables à la collectivité.
N’ayant pas accès aux textes soumis à la discussion, les universitaires et la population ne peuvent pas prendre la pleine mesure des impacts de cet accord sur l’éducation. Mais le contexte laisse craindre le pire, puisque depuis plus d’une décennie, la commercialisation des activités universitaires est à l’agenda des grandes entreprises. Les puissantes organisations économiques internationales comme L’OMC, L’OCDE et la Banque mondiale ont comme projet explicite de transformer l’enseignement supérieur public en marché commercial, les universités en « fournisseurs privés » et la connaissance en marchandise exportable. C’est cet esprit qui anime l’Accord général sur le commerce des services (AGCS), dont s’inspire l’accord Canada-Europe.
Considérant que l’université doit continuer de servir le bien commun, la Fédération dénonce le fait que les services d’éducation et les pratiques universitaires soient inclus dans l’AÉCG. Elle exige du gouvernement canadien de faire preuve de transparence et de s’engager à exclure les services publics de l’accord. Puisque l’enseignement supérieur est de juridiction provinciale, la FQPPU demande que le gouvernement du Québec et, en particulier, la ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport s’opposent à toute disposition qui porterait atteinte à l’université québécoise, à sa singularité et à son indépendance vis-à-vis de pouvoirs externes. Elle s’attend, en conséquence, à ce que les services publics, notamment les services d’éducation et le secteur universitaire, soient exclus de l’AÉCG.