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Des protestations nocturnes ont toujours lieu. La résistance contre l’obligation du port du hijab est très répandue, et des jeunes défient ouvertement le régime malgré des menaces et des amendes. Les moindres occasions (jours de fête, matchs de foot, enterrements d’opposantEs…) sont utilisées pour proférer des slogans hostiles au régime et à son Guide suprême. Néanmoins, on est loin d’assister à des manifestations simultanées à travers le pays.
Par ailleurs, une « Charte des revendications minimales » a été élaboré et signée le 15 février par 20 syndicats, associations d’ouvrierEs, d’enseignantEs, de retraitéEs, de femmes, d’étudiantEs (1).
Elle a reçu immédiatement le soutien de la plus grande partie de l’opposition de gauche révolutionnaire en exil. Mais il est encore trop tôt pour savoir quelles seront en Iran les conséquences pratiques de cette Charte qui conjugue des revendications de liberté, de démocratie et de justice sociale.
La reprise des luttes revendicatives
Les luttes revendicatives, qui existaient dans les premiers mois du soulèvement, ont redémarré avec plus de force qu’auparavant. Elles sont parties du secteur pétrolier et leur porte-parole est le « Conseil d’organisation des grèves des travailleurs contractuels du pétrole ».
Des milliers de salariéEs participent au mouvement avec des revendications comme :
– l’augmentation de 79 % des salaires (pour tenir compte de l’inflation) ;
– un rythme de 20 jours travaillés et 10 jours de repos, pour tenir compte des conditions infernales de ce secteur ;
– la fin du recours à l’intérim qui procure actuellement aux sociétés pétrolières la grande majorité de leur main-d’œuvre, c’est-à-dire dans la droite ligne de la lutte de l’été 2021, qui a dépassé les 100 000 grévistes.
Les grèves se sont très vite répandues à d’autres secteurs. Surpris par le timing et surtout l’extension rapide du mouvement, les représentants du régime ont tenté de « calmer » le jeu en demandant aux salariéEs de « ne pas faire de vagues », de ne pas organiser de manifestations, et de rester chez eux en attendant l’intervention des « responsables gouvernementaux ».
Les autorités ont « salué la sagesse » de grévistes n’ayant pas scandé des slogans politiques hostiles au régime. Elles ont dénoncé les ingérences « de forces obscures et de l’opposition en exil ».
Le Guide suprême a même dû reconnaître devant un parterre de miliciens du régime le bien-fondé de certaines revendications notamment le paiement des salaires dûs !
La réaction du pouvoir est multiforme : arrestations de salariéEs accuséEs d’être des meneurEs, évacuations et fermetures d’usines en grève afin d’empêcher des manifestations sur le lieu de travail.
De plus, le régime veut dissuader les salariéEs de faire grève en prétendant faussement que dans certaines entreprises des revendications auraient été satisfaites sans cesser le travail.
Viennent s’y ajouter des menaces de « lock-out » ou de licenciement comme il en est question dans une entreprise pour 4 000 grévistes. Mais les grèves continuent et s’étendent à d’autres secteurs et localités.
Des questions pour l’instant sans réponse
Pourquoi dans les premiers mois du soulèvement, une jonction n’a-t-elle pas eu lieu entre dimension politique et dimension sociale ?
Pourquoi, aujourd’hui, une grande partie des courants politiques existants ne viennent-ils pas se joindre à l’actuel mouvement revendicatif ?
Peut-on se contenter de dire que la répression est la seule explication à cette absence de jonction, ou faut-il approfondir l’analyse et trouver des causes complémentaires ?
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