Édition du 17 décembre 2024

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Santé

Des travailleuses en résidences pour personnes aînées témoignent de leur réalité (SQEES-FTQ)

MONTRÉAL, le 5 nov. 2015 - Des centaines de travailleuses et de travailleurs de résidences privées pour personnes aînées, des quatre coins du Québec, des Laurentides au Saguenay-Lac-Saint-Jean, de Montréal à Québec, ont distribué des tracts pour sensibiliser la population au fait qu’ils sont sous-payés. C’est plus de 20 000 tracts qui ont été distribués en main propre à des citoyens. En effet, le personnel qui prend soin de nos parents et grands-parents gagne en moyenne 12,50 $ de l’heure. À titre comparatif, les employés de restauration rapide dans l’État de New York, de Seattle, de Los Angeles ou de San Francisco gagnent un minimum de 15 $ de l’heure. Pour les travailleuses et les travailleurs des résidences, un tel cadre salarial est indécent, alors qu’on leur en demande plus en faisant des actes délégués auparavant réservés aux infirmières.

Des travailleuses témoignent

Lors d’une conférence de presse, deux travailleuses de résidences pour personnes aînées sont venues témoigner de la réalité de leur travail ainsi que l’impact d’un si maigre salaire dans leur vie de tous les jours.

« Avec un salaire de 12,28 $ de l’heure, il est impossible pour moi de m’occuper comme je souhaiterais de mes deux enfants, dont l’un est atteint de dysphasie et l’autre de dyspraxie grave. D’autant que mon employeur ne m’offre qu’une demi-tâche. Ce qui représente 310 $ par deux semaines, témoigne Katy Dalpé, préposée à la résidence Habitat Lafayette à Longueuil. J’ai fait des cours de préposée aux bénéficiaires alors que j’étais sur l’aide sociale. Maintenant, avec les dépenses occasionnées par le travail, la garde des mes enfants et le coût des médicaments, c’est plus difficile pour moi de boucler les fins de mois qu’auparavant. Je n’ai pas le choix, je dois cumuler deux emplois : un le matin et l’autre le soir. Je travaille toutes les fins de semaine et mes journées de congé, je les passe en formation pour terminer mon diplôme. Je n’ai plus de temps ni pour mes fils, ni pour moi. Heureusement que je peux compter sur mon père le matin pour les départs à l’école et à la garderie, mais il commence à trouver ça pénible. C’est incroyable que je prenne soin des autres avec autant de passion et d’attention, mais que je ne sois pas en mesure de m’occuper de mes enfants et de moi de la même façon, étant donné la précarité de ma situation. »

La travailleuse à la résidence Marquis de Tracy, Ginette Dussault, témoigne d’une autre réalité : « Je suis veuve depuis moins d’un an. Heureusement que mon défunt mari avait de bonnes conditions dans le domaine de la construction. Grâce à la rente de 1 200 $ par mois qu’il a pu me laisser je peux finir de payer l’hypothèque de la maison. Ce n’est certainement pas avec mon salaire de 12,87 $ de l’heure que j’y arriverais. D’autant que les préposés aux bénéficiaires où je travaille n’ont que du temps partiel, il n’y a aucun temps complet. Par exemple, malgré mes six ans de service, mon horaire de novembre ne prévoit que 6 jours de travail. J’espère que mon téléphone va sonner pour que je puisse faire plus d’heures et ainsi faire une épicerie qui a du bon sens. C’est sans compter qu’à 62 ans, je suis loin de pouvoir prendre une retraite dans les années qui viennent. J’aime mon travail et les résidents, mais il me semble qu’on pourrait être traités avec plus de respect et de dignité ».

La réalité de ces deux travailleuses n’est que le reflet de la situation de milliers d’autres au Québec. Les emplois dans les résidences privées pour personnes âgées sont en grande majorité occupés par des femmes qu’on maintient dans la pauvreté.

S’inspirer de la campagne Fight for 15

Le Syndicat québécois des employées et employés de service, section locale 298 (FTQ) s’inspire ouvertement de la campagne qui a lieu aux États-Unis : Fight for 15. En effet, sous l’impulsion de l’Union internationale des employés de service (SEIU), est en branle une grande mobilisation des travailleuses et des travailleurs des chaînes de restauration rapide. L’État de New York et plusieurs villes américaines ont adopté une réglementation pour que ces personnes puissent vivre un peu plus dignement en gagnant un minimum de 15 $ de l’heure.

« La décision à laquelle nous faisons face est la suivante : pouvons-nous accepter que des femmes, soit la majorité du personnel, qui lavent, changent, nourrissent, mais aussi consolent, sécurisent et confortent les personnes âgées du Québec gagnent un salaire de crève-faim, en deçà de ce que peut gagner un employé de McDonald à 45 minutes de voiture de Montréal, interroge Danielle Legault, vice-présidente et membre du comité exécutif de SEIU et vice-présidente du SQEES-FTQ. À l’image de la campagne qui est menée chez nos voisins du sud, nous menons un combat sur tous les fronts : auprès de la population, des décideurs publics et des employeurs. »

Un plan d’action en branle au SQEES-FTQ

Dans le cadre de la campagne Prendre soin de nous, c’est aussi pour vous, le SQEES-FTQ s’est efforcé de faire terminer un maximum de convention collective au tournant de l’année 2016. Pour l’organisation syndicale, des négociations coordonnées, notamment chez les plus importants joueurs de l’industrie, permettront d’améliorer significativement les conditions de travail en résidences privées pour personnes aînées.

Dans la même optique, le syndicat a interpellé le gouvernement afin de mettre en place une table de travail avec tous les interlocuteurs du milieu (travailleurs, employeurs, gouvernement, représentants des usagés). Malheureusement, il y a eu une fin de non-recevoir du Ministre de la Santé et des Services sociaux de même que des employeurs. Le président du SQEES-FTQ, Richard Belhumeur, procède présentement à des rencontres avec les principaux responsables des ressources humaines des différents groupes présents dans le marché des résidences privées. Nous leur suggérons de mener des négociations coordonnées par groupe plutôt que résidence par résidence.

Rappelons qu’un sondage Léger marketing, commandé par le SQEES-FTQ, démontre que 89 % de la population juge que 12,50 $ de l’heure pour s’occuper des personnes aînées c’est trop peu, alors que 60 % juge que les administrateurs des résidences privées doivent investir plus pour attirer et maintenir du personnel compétent. (pour consulter le sondage : http://www.sqees.ca/sondageRPA.pdf)

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