Édition du 17 décembre 2024

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Premières Nations

Déclaration des femmes autochtones de Val-d'Or

MONTRÉAL, le 17 nov. 2016 - C’est avec une amère déception et une profonde préoccupation que nous avons appris que le Directeur des poursuites criminelles et pénales du Québec (DPCP) ne portera aucune accusation criminelle à l’encontre de 6 des policiers de la ville de Val-d’Or mis en cause par nos dénonciations passées.

Il y a 18 mois de cela, au Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or, nous avions choisi, après mûres réflexions, d’oublier la peur, de rompre le silence et de parler enfin à cœur ouvert, en dénonçant publiquement devant la journaliste Josée Dupuis de l’émission Enquête de Radio Canada, comment nous avions été victimes d’intimidation, d’abus de pouvoir, d’agressions sexuelles et physiques de la part de policiers de la SQ de Val-d’Or pendant plusieurs années. Ces dénonciations, nous les avons faites pour notre amie Sindy et la famille Ruperthouse, avec l’espoir qu’on puisse la retrouver mais également pour que cesse la violence policière à l’égard des femmes autochtones.

Au-delà de tout ce que cette décision nous a coûté et de ce qu’elle a chamboulé dans nos vies personnelles, nous continuerons d’en payer le prix dans le futur ; au-delà des multiples difficultés que nous avons rencontrées depuis lors, nous avions l’espoir que justice nous serait rendue, et qu’ainsi la cause des femmes autochtones de Val-d’Or, de toutes les femmes autochtones du pays, pourrait être dorénavant mieux entendue, et considérée avec plus de respect par tous et toutes.

Aujourd’hui, il nous faut bien constater que ce n’est pas le cas. Et cela provoque en nous des sentiments profonds et contradictoires : de rage, de découragement, de peur, de crainte d’être jugées et traitées de menteuses. Nous nous sentons trahies, humiliées et notre cœur est brisé en 1000 morceaux. Comme si devant la justice de ce pays, nous n’étions pas importantes, nous ne comptions pas, nous n’avions pas été écoutées. Et surtout comme si la peur n’allait plus cesser de nous hanter : peur du retour des policiers suspendus, peur des représailles, peur pour notre sécurité même.

Imaginez : on est ensemble et on a peur. Alors qu’est-ce que ce sera quand on sera seule ? Et toutes ces femmes qui ont subi des abus et ne les ont pas encore dénoncés, ne risquent-elles pas d’abandonner leurs démarches, de dire que "ça donne rien, qu’on ne nous écoute pas, qu’on ne peut plus avoir confiance dans le système de justice et de police" ?

Mais même si le message qui est lancé avec cette décision du DPCP, risque de laisser croire que c’est nous qui avons perdu, nous puisons dans nos ressources les plus profondes pour raviver la volonté de continuer malgré tout… Nous ne pensons pas que nous avons fait cela en vain. Même si nous souhaitons aujourd’hui prendre le temps de panser nos plaies, de vivre cette déception profonde en toute intimité, de nous tenir loin des médias, nous ne voulons pas baisser les bras. Nous voulons continuer à nous faire entendre pour que la vérité soit exposée et reconnue officiellement. Nous voulons que soit mise en place une commission d’enquête publique et indépendante par le Gouvernement du Québec afin que toute la lumière puisse être faite sur cette affaire à Val-d’Or.

Ce que nous demandons, c’est une véritable justice : une justice pour nous-même, une justice pour nos filles, une justice pour nos petites-filles…..

Ce qui nous conforte, c’est que nous savons que nous ne sommes pas seules. Et qu’aujourd’hui nous pouvons faire un solennel appel à tous les gens du Québec, autochtones, comme allochtones, pour qu’ils tendent la main aux femmes autochtones et que puisse se nouer une nouvelle chaine d’appui et de solidarité plus solide que jamais.

C’est aussi cela qui nous donne, redonne espoir.

Angela King

June Fair

Joséphine Papatie

Cherilyn Papatie

Priscillia Papatie

Mani Decoursy

Bernadette Ogushing
 
Nadia Papatie

Elysia Ottereyes Roberts

Bianka Moushoom

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