Édition du 17 décembre 2024

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Politique canadienne

Battons les Conservateurs de Stephen Harper au Parlement de la rue

Bon ou mauvais ? Le 2 mai a propulsé le Nouveau Parti démocratique basé sur les syndicats à la deuxième place, soit l’opposition officielle, produisant ainsi des gains historiques. C’est une bonne chose. Mais le décompte total de sièges a permis aux Conservateurs de gagner une majorité parlementaire. Ce qui n’est pas bon.

Alors, quelle est la conclusion ? Sommes-nous dans une période d’attente de quatre ans, condamnés à être témoin de la destruction lente d’un siècle de gains sociaux ? Non, si nous choisissons de résister.

En fait, les personnes atteintes de déprime post-électorale devraient reprendre courage. Le mouvement ouvrier à travers l’État canadien a rarement eu une meilleure opportunité de saisir l’occasion, d’arrêter l’hémorragie et de prendre en charge la situation. Considérons ce qui suit :

1. La majorité de Stephen Harper est le produit artificiel d’un système électoral antidémocratique. Remportant seulement 39,5% des suffrages exprimés, moins d’un quart de l’électorat total, Harper n’a pas de mandat pour mener à bien son programme anti-ouvrier brutal.

Alors que sa nomination de trois candidats conservateurs défaits au Sénat démontre que son arrogance est intacte, Harper est un tigre de papier. Il peut être arrêté. De toute évidence, il faudra des actions politiques et économiques ouvrières de masse, en commençant avec le soutien actif de la lutte des travailleurs et des travailleuses des postes contre les concessions. Mais le point essentiel demeure : l’ordre du jour conservateur peut être arrêté.

2. L’élection fédérale du 2 mai a mis de côté le « vote stratégique », la mise sur pied d’un gouvernement bourgeois de coalition et toute discussion sur une fusion entre le NPD et les Libéraux. Ces exemples flagrants de collaboration de classe , qui peuvent seulement créer de la confusion et diviser la classe ouvrière, ne sont plus à l’ordre du jour pour quatre ans et espérons le pour toujours. Mais le « gouvernement en attente » du NPD doit prouver qu’il est capable de gouverner dans l’intérêt de la classe ouvrière, des petits agriculteurs, des nationalités opprimées, des femmes, des jeunes et des personnes âgées.

3. Les gains spectaculaire du NPD au Québec sont très significatifs, mais aussi très fragiles. Les attentes nationalistes des Québecois-es sont élevées. Elles sont reprises par les jeunes voix parmi les 59 députés du NPD au Québec. Les engagements positifs du NPD pour faire du français la langue de travail dans les entreprises sous réglementation fédérale à l’intérieur du Québec, et de respecter un vote futur pour la souveraineté, ont alimenté ces attentes. Ainsi le chef du NPD Jack Layton est monté sur un taureau. Il peut l’apprivoiser ou il peut se faire ruer par lui. De plus, la nouvelle situation politique a érigé un pont entre les mouvements ouvriers des deux nations. La lutte du Syndicat des travailleurs et des travailleuses des postes lors des négociations collectives peut être le baromètre de l’unité pancandienne des travailleurs et des travailleuses contre la classe capitaliste canadienne et son ordre du jour anti-ouvrier.

4. Nous pouvons aujourd’hui remplacer la retraite syndicale des 30 dernières années avec une résistance de masse contre les projets des grandes entreprises. Les conditions objectives pour un revirement sont réunies. Le principal obstacle à la résistance dont nous avons besoin, c’est la direction pro-capitaliste de nos syndicats et du NPD. Au sommet de ces deux organisations on retrouve le même groupe de bureaucrates privilégiés. Ils ont fait ramer le bateau surtout dans un sens - par en arrière – depuis plus d’un quart de siècle. Pour changer le cours, la bureaucratie de droite doit être éjectée. Pour que cela arrive et pour avoir espoir d’un changement de direction, nous avons besoin d’intensifier la construction d’une opposition de lutte de classe à l’intérieur des syndicats et du NPD. D’un petit gland pousse un grand chêne.

5. Une opposition de lutte de classe est basée sur un programme clair et un solide ensemble de principes reflétant les besoins concrets de la grande majorité de la population. Le Caucus Socialiste du NPD , fondé en 1997, avec plus de 500 partisans à travers le pays, est basé sur le Manifeste pour un Canada socialiste. Il a élaboré et développé un ensemble des résolutions adoptées lors de ses conférences annuelles au cours des 14 dernières années. L’engagement du CS à lutter pour la propriété publique des secteurs prédominants de l’économie, sous le contrôle démocratique des travailleurs et travailleuses et des communautés, afin de faciliter la transition vers l’efficacité énergétique verte à tous les niveaux, de l’industrie et du chauffage résidentiel jusqu’au transport en commun, en est un exemple puissant.

Le programme de la Coalition pour la Solidarité Ouvrière et la Démocratie Syndicale (Workers Solidarity and Union Democracy Coalition), fondée en 1991, et relancée en 2005, fournit un autre bon exemple. Il défend les points suivants : 1.Résister aux concessions syndicales et aux reculs sociaux. 2. Soutenir les luttes pour la démocratie syndicale, rendre les syndicats plus accessibles, plus responsables, transparents et participatifs. 3. Reprendre nos syndicats et les transformer en organisations de combat. 4. S’appuyer sur nos propres forces, et renouveler ou créer nos propres organisations, de bas en haut, pour lutter pour les intérêts de la classe ouvrière et contre les profits et le pouvoir des grandes entreprises.

Les principes de fonctionnement auxquels Solidarité Ouvrière et le Caucus Socialiste du NPD se sont engagés sont essentiellement ceux de l’historique Commune de Paris de 1871, le premier gouvernement ouvrier dans l’histoire du monde : la démocratie directe, la représentation proportionnelle de tous les courants d’opinion, le droit des membres de la base de révoquer et de remplacer les représentants élus, et la règle selon laquelle les titulaires d’une fonction ne doivent pas être payés plus cher que ceux et celles qu’ils représentent.

Ce n’est pas tout le monde qui appartient à un syndicat, ni tout le monde qui est capable de se joindre à ou de former un syndicat. Mais tous, indépendamment de leur citoyenneté ou de leur statut, peuvent adhérer au NPD basé sur les syndicats et peuvent soutenir la lutte du Caucus Socialiste pour que le NPD se tourne résolument vers la gauche. Ce qui importe est le processus, la lutte elle-même, et non dans quelle mesure le parti tourne à gauche. La plupart des travailleurs et des travailleuses ordinaires qui adhèrent à un parti basé sur les syndicats ne s’incrivent pas juste pour devenir des cheerleaders pour le chef. Nous adhérons au NPD pour la même raison que nous nous affilions à un syndicat - pour faire avancer nos intérêts de classe.

Sans les syndicats, le NPD n’existerait pas. C’est pourquoi le parti appartient à la classe ouvrière, non pas à Thomas Mulcair ou Jack Layton, ni à Brad Lavigne, pas plus qu’à la famille Lewis. Le NPD appartient à ses membres cotisants, à ses syndicats affiliés, à ses 100.000 membres, à ses 4.5 millions d’électeurs. Nous demandons simplement que le NPD serve les intérêts de sa grande base sociale et non le système d’exploitation et d’oppression qui est au service d’une minuscule élite capitaliste. C’est la lutte au sein de nos syndicats et au sein du NDP basé sur les syndicats qui décidera de la forme de la lutte contre l’austérité capitaliste et la guerre. La lutte actuelle décidera de l’ensemble des rapports des forces de classe.

Il y a un point sur lequel il vaut la peine d’insister à nos amis à travers la gauche indépendante : C’est le temps de prendre position, de mettre de côté les abstractions académiques, et de dépasser les campagnes de petites activités secondaires. La voie pour influencer les 4.5 millions d’électeurs néo-démocrates se trouve dans la lutte contre les dirigeants pro-capitalistes envers lesquels des millions de personnes ont des illusions. Notre tâche n’est pas de soutenir la direction actuelle, mais de la défier, en particulier au sein des organisations de masse de la classe ouvrière. Seules ces organisations de masse ont la capacité d’éduquer et de mobiliser des millions de personnes. Nous devons nous efforcer de gagner ces organisations à l’action de masse contre les attaques des dirigeants et en faveur de politiques socialistes qui peuvent donner forme à une alternative au désastre économique et environnemental en cours qu’est le capitalisme mondial.

Le 2 mai a marqué le début d’une situation nouvelle, pleine de nouvelles possibilités qui font chaud au cœur à tout travailleur et travailleuse. Alors que les dirigeants du Congrès du Travail du Canada nous disent « d’attendre quatre ans pour remplacer le gouvernement », tout en fusionnant les conseils syndicaux pour les rendre encore plus éloignés des syndicalistes locaux, nous n’avons pas besoin d’être liés à leurs exigences. Lorsque Jack Layton dit qu’il veut être « plus une proposition qu’une opposition », nous ne devons pas avaler cette pilule. La tâche des socialistes, des radicaux et des militants ouvriers est de s’unir derrière les travailleurs et les travailleuses des postes, pour soutenir les revendications des Québécois et des peuples autochtones pour la libération nationale, pour demander de l’argent pour les emplois, pour la conversion de l’énergie verte, non pas pour les prisons, les avions de chasse et les guerres impérialistes d’occupation.

Ensemble, nous pouvons prouver que le gouvernement le plus à droite dans l’histoire canadienne est un tigre de papier. Nous pouvons montrer qu’il peut être emporté par une forte vague de lutte de classe. Forçons les dirigeants syndicaux à diriger la lutte, ou sinon d’être éjectés de leur poste. Cela implique la construction d’une aile gauche militante et bien organisée dans les syndicats et le NPD. C’est maintenant le temps. Joignez-vous à nous.

(Traduction Hugo Pouliot)

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