Édition du 17 décembre 2024

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Amiante : connaissances acquises sur l'exposition et les maladies des travailleurs et de la population générale du Québec de 2003 à 2009


Présentation du rapport par Kathleen Ruff

L’industrie de l’amiante/le gouvernement du Québec/le consortium Chadha ne parlent pas de l’exposition à l’amiante des travailleurs de la construction, bien que ce soit le groupe occupationnel qui a le plus de décès à cause d’une exposition à l’amiante.

Un rapport de l’Institut national de santé publique du Québec (l’INSPQ) qui vient tout juste de sortir constate que :

* 43% des 3 000 prélèvements sur les chantiers de construction à risque élevé avaient des concentrations supérieures ou égales à 1 f/ml (limite permis au Québec).

À noter :

* Le Québec a la norme la plus permissive en Occident. Le niveau d’exposition permis au Québec ( 1 f/ml) est 10 fois plus élevé que ce qui est permis partout ailleurs au Canada et 10 fois plus élevé que ce qui est permis par les E-U, par tous les pays d’Europe et par les autres pays industrialisés ((0,1 f/ml). C’est cent fois plus élevé que le niveau permis par les Pays-Bas, l’Allemagne et la Suisse (0,01 f/ml).

Le gouvernement du Québec refuse depuis des années de réviser cette norme malgré les appels répétés de INSPQ, qui la juge trop permissive.

À noter :

* Le rapport constate que les cas de mésothéliome et d’amiantose reconnus comme maladies professionnelles par le CSMPP représentent respectivement seulement 21,4 % des cas de mésothéliome de la plèvre enregistrés au Fichier des Tumeurs du Québec et 35 % des personnes hospitalisées avec une mention d’amiantose enregistrés dans le système MED-ÉCHO (Maintenance et exploitation des données pour l’étude de la clientèle hospitalière).
C’est à dire que le nombre des cas de mésothéliome et de l’amiantose au Québec est beaucoup plus élevé que les chiffres de la CSST.

Kathleen Ruff


Le rapport

Aperçu des contenus

Il n’a toutefois pas pour but de mettre à jour l’état des connaissances sur l’amiante comme tel. Ce rapport résume également l’état d’avancement du système de surveillance des expositions à l’amiante au Québec et des maladies qui en découlent, qui sera mis en place par l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), dans la foulée de l’adoption de la Politique d’utilisation accrue et sécuritaire de l’amiante chrysotile au Québec.

Les données les plus récentes (2004) sur l’exposition environnementale à l’amiante dans l’air extérieur n’ont pas permis d’identifier de fibre d’amiante à Montréal et à Québec. Par contre, à Thetford Mines, la concentration moyenne d’amiante dans l’air était de 0,0043 f/ml en microscopie électronique à transmission (MET). Cette concentration était 215 fois supérieure à celle obtenue dans l’air extérieur de bâtiments ayant fait l’objet de litiges à propos de l’enlèvement de matériaux contenant de l’amiante (MCA) sur le territoire américain. Entre 1998 et 2005, à Asbestos, les concentrations moyennes variaient entre 0,003 à 0,007 f/ml, sans que l’on sache s’il s’agissait de fibres d’amiante puisque la méthode d’analyse n’était pas précisée.

Depuis 2000, aucune publication sur les niveaux d’exposition des travailleurs dans les mines d’amiante des régions de Thetford Mines et d’Asbestos n’a été retracée.

Pour ce qui est du secteur industriel, à la fin de 2009, on a identifié neuf entreprises québécoises où l’on utilisait de l’amiante dans le procédé ou dans lesquelles des travailleurs manipulaient des produits en amiante. Aucun des établissements n’utilisait l’amiante de façon jugée sécuritaire selon un ou plusieurs des critères définis a priori. Ces résultats montrent l’importance de surveiller l’exposition des travailleurs dans ces milieux de travail.

Des données sur la caractérisation des matériaux obtenues en 2009 ont été recueillies dans les chantiers de construction à risque élevé. Parmi les 2 475 échantillons qui contenaient de l’amiante, 75 % contenaient du chrysotile seul, 15 % du chrysotile en présence d’autres types de fibre d’amiante et 10 % uniquement des amphiboles (i.e. la famille d’amiante qui exclut le chrysotile). Dans une autre étude, 1 251 échantillons de matériaux contenaient des amphiboles uniquement et 10 538 autres échantillons du chrysotile seul (95 %) ou un mélange de chrysotile et d’amphiboles (5 %). On retrouve donc majoritairement du chrysotile dans les matériaux en place dans les édifices étudiés.

Parmi 3 000 prélèvements d’air recueillis pendant les travaux sur des chantiers de construction à risque élevé, 43 % avaient des concentrations supérieures ou égales à 1 fibre/ml (f/ml), qui est la norme d’exposition à l’amiante chrysotile au Québec. Ces résultats montrent l’importance d’appliquer les mesures de maîtrise de l’exposition prévues dans la réglementation. Parmi 2 626 prélèvements d’air recueillis dans les vestiaires, pendant les travaux de désamiantage, 77 % avaient des concentrations de fibres égales ou supérieures à 0,01 f/ml comparativement à 14 % dans les zones connexes au chantier (0,01 f/ml est la valeur seuil à respecter avant le démantèlement de l’enceinte étanche à l’intérieur de laquelle se déroulent les travaux de démolition).

En ce qui concerne les maladies reliées à une exposition à l’amiante, de 1982 à 2002, 1 530 personnes (1 210 hommes et 320 femmes) ont reçu un nouveau diagnostic de mésothéliome de la plèvre au Québec. Durant cette période d’étude, les taux d’incidence annuels ajustés pour l’âge ont augmenté de façon significative chez les hommes québécois, avec un taux de croissance annuel moyen de 3,6 %. À l’échelle régionale, les taux standardisés d’incidence du mésothéliome de la plèvre étaient significativement plus élevés chez les hommes et les femmes de Chaudière-Appalaches, ainsi que chez les hommes de la Montérégie et de Lanaudière. Entre 1982 et 2002, 170 Québécois ont reçu un diagnostic de mésothéliome du péritoine (98 hommes et 72 femmes).

Entre 1992 et 2004, 2 072 personnes (1 993 hommes et 79 femmes) ont été hospitalisées avec une première mention d’amiantose comme diagnostic principal ou secondaire. Des excès significatifs d’hospitalisation par amiantose ont été observés chez les hommes et les femmes de Chaudière-Appalaches et chez les hommes de l’Estrie et de Lanaudière.

Une estimation du risque de cancer du poumon et de mésothéliome chez les résidents de la ville de Thetford Mines a été réalisée en utilisant l’approche qui s’appuie sur le modèle de Berman et Crump et sur les lignes directrices du ministère de la Santé et des Services sociaux. Selon l’approche utilisée, l’excès vie durant de mortalité pour ces deux cancers variait entre 8,2 et 125 pour 100 000 personnes résidant à Thetford Mines et exposées continuellement à l’amiante durant toute leur vie.

Peu d’études ont documenté les maladies reliées à l’amiante chez les travailleurs québécois. Dans une publication de 2009, tous les nouveaux cas de maladies reliées à l’amiante reconnues comme des maladies professionnelles pulmonaires par le Comité spécial des maladies professionnelles pulmonaires (CSMPP) entre 1988 et 2003 ont été décrits. Pendant cette période, 1 348 travailleurs ont été atteints de 1 512 maladies. Les travailleurs ont surtout été exposés dans la construction et dans l’entretien et la réparation de produits ou de structures contenant de l’amiante (49,4 %) surpassant ainsi le nombre de travailleurs provenant des mines (29,1 %).

Les cas de mésothéliome et d’amiantose reconnus comme maladies professionnelles par le CSMPP représentent respectivement 21,4 % des cas de mésothéliome de la plèvre enregistrés au Fichier des Tumeurs du Québec et 35 % des personnes hospitalisées avec une mention d’amiantose enregistrés dans le système MED-ÉCHO (Maintenance et exploitation des données pour l’étude de la clientèle hospitalière).

En ce qui a trait à l’exposition à l’amiante, le système de surveillance qui sera mis en place par l’INSPQ priorisera la surveillance de l’exposition des travailleurs qui proviennent des mines, du milieu de la construction et du milieu industriel, ainsi que l’exposition environnementale à l’amiante dans les villes de Thetford Mines et d’Asbestos.

Quant à la surveillance des maladies, le système priorisera celle de l’amiantose, des mésothéliomes de la plèvre et du péritoine ainsi que du cancer du poumon relié à l’amiante, qui sont des maladies à déclaration obligatoire (MADO) depuis 2003. Comme ces maladies sont sous-déclarées, un projet-pilote visant à faciliter la déclaration de ces MADO par les médecins sera mis en place dans deux hôpitaux québécois. Si le projet-pilote s’avérait efficace à identifier et à déclarer les cas, son approche, qui fait appel aux services des archives médicales, serait proposée dans l’ensemble des hôpitaux du Québec.

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