Édition du 12 novembre 2024

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Asie/Proche-Orient

11 mars 2011 - 11 mars 2017 : la quadruple catastrophe nucléaire de Fukushima continue

tiré de : La lettre d’informations de la coordination antinucléaire du sud-est (27 mars 2017)

Le 11 mars 2017, date anniversaire du début de la catastrophe nucléaire mondiale de Fukushima, s’élèvera sur l’ensemble de la planète le cri de refus du nucléaire, l’exigence de mettre un terme définitivement à cette ignominie sanitaire et totalitaire. Dans la zone de la quadruple catastrophe atomique de Fukushima-Daïchi, jusqu’à 15 500 salariés s’activent quotidiennement, dans la sueur et la mort, en des travaux interminables et désespérés de décontamination. Les enfants pissent de la radioactivité dans leurs urines, la mort rôde.

Par redaction le mardi 7 mars 2017, 03:56 -

Dans la zone de la quadruple catastrophe atomique de Fukushima-Daïchi, dans laquelle le lobby nucléaire français est pleinement impliqué car Areva a fourni le « mox » du réacteur n°3 dont le corium mortellement radioactif est on ne sait où, jusqu’à 15 500 salariés s’activent quotidiennement, dans la sueur et la mort, en des travaux interminables et désespérés de décontamination. La mort embauche.

Les déchets radioactifs, en énormes quantités seront incinérés pour tenter dans réduire les volumes, selon la stratégie adoptée par le lobby atomique nippon ; puis entreposés là où il y de la place en fonction des lieux et du niveau de contamination. Les autorités japonaises en envisage un stockage définitif. Mais où et sous quelle forme et pour combien de milliers d’années ? Mystère et boule de gomme comme en France et dans les autres pays nucléarisés.

2012-11-01_fukushima-decontamination-et-dedommagements—100-mds-euros_site-nucleaire-detruit_1.jpgD’ici là les sacs de déblais recouverts de bâches parsèment le paysage : le sol gorgé de césium137 est raclé sur 10 cm et stocké dans ces sacs dont la durée de vie n’excède pas trois ans et qu’il faudra enterrer quelque part avant qu’ils ne cèdent. La Terre est une poubelle pour les nucléaristes.

La décontamination consiste à racler les sols contaminés, couper les herbes, ramasser les végétaux morts, émonder les arbres et arbustes, et mettre le tout dans des sacs qui s’entassent un peu partout et un peu plus loin et toujours plus haut chaque jour qui passe.(1)

À 40km à l’Ouest de la centrale atomique en perdition...

Le village de Iitaté-mura à 40 km de la centrale atomique en perdition, où l’ordre d’évacuer n’est pas levé, est devenu un vaste chantier où pratiquement seuls les décontamineurs hantent les rues et les abords et où partout s’amoncèlent des déchets radioactifs.

Ce 11 mars 2011, les 7000 habitants se sont trouvés en plein sous le panache radioactif avançant du Nord vers l’Ouest sans que les autorités de Tokyo, qui en avaient connaissance, ne les alerte. Ce n’est que 28 jours plus tard, le 8 avril 2011, au vu de la contamination effarante des sols, de l’eau, du lait, des fruits et des légumes, que les enfants et les femmes ont été encouragés à évacuer. Le lobby nucléaire aime se servir de la population comme rats de laboratoire.

Les légumes feuillus y sont contaminés à hauteur de 2 540 000 Bq/kg d’Iode131 et 2 650 000 Bq/kg de Césium137 ! La contamination des sols est identiques à celles de la région de Tchernobyl en 1986. (la dose de contamination radioactive maximale des aliments imposée à la population par le lobby nucléaire et les autorités a été augmentée de 10Bq/kg à 100 Bq/kg en 2012).

2012-09-04_enfants-Fukushima-thyroide.jpg3 zones de mort. 3 ans plus tard en 2014 les autorités ont délimité arbitrairement 3 secteurs : la zone rouge avec une radioactivité supérieure à 50 mSv/an, interdite d’accès sauf avec autorisation spéciale et en tenue de protection, pour un maximum de 5 heures ; la zone orange, de 20 à 50 mSv/an, dans laquelle on ne peut passer que brièvement ; la zone « verte » (sinistre euphémisme) avec un débit de 20 millisieverts/an au maximum qui est la pierre angulaire de la manipulation officielle visant à faire croire qu’on peu revivre en zone contaminée : libre d’accès le jour mais interdite la nuit (pour éviter d’absorber quand même trop de radioactivité et mourir trop rapidement et en trop grand nombre ça serait contre-productif).

Dans le coin la contamination est parfois supérieure à celle mesurée dans la zone interdite à 2 km des réacteurs atomiques explosés. L’analyse des lichens et des mousses révèle un taux de contamination jusqu’à 1 million à 1 million et demi de becquerels/kg ! Et le long des routes plusieurs foyers de forte radioactivité répandent leur mort à 55 µSv/h et 77 µSv/h (microsieverts/h).

Pour les spécialistes eux-mêmes : "La décontamination est illusoire, ça ne marche pas. Il vaudrait mieux tout laisser en l’état. Mais on ne peut pas le dire à la population"

A 20-30km au nord des réacteurs nucléaires explosés

Minami-Sôma en bord du littoral à une trentaine de kilomètres au Nord de la centrale atomique de Fukushima daï-ichi, c’est la désolation qui règne, les rizières et les champs sont en jachère à l’abandon et il pèse sur la ville un silence de mort. Les autorités et exploitant nucléaires se livrent ici aussi à un jeux sordide de découpage arbitraire de la ville. Bien qu’une partie de la commune, située à moins de 20 km a été évacuée en urgence en mars 2011, dans une autre partie, située entre 20 et 30 km, la population n’a été incitée qu’à se mettre à l’abri pendant une dizaine de jours. Les personnes qui pouvaient partir sont parties et celles qui n’en ont pas eu le choix ont été abandonnées sur place, livrées à elles-mêmes malgré l’appel à l’aide du maire lancé le 24 mars 2011.

Japon_Fukushima_aliments_contamination-des-aliments-ce-qui-se-passe-est-grave.jpgQuelques personne èrent dans les rues, y compris quelques enfants. Devant une supérette des bus de travailleurs-décontaminateurs s’arrêtent rapidement à la queue leu leu en début et fin de journée avant de regagner leur « Mobile-Inn » préfabriqué pour l’hébergement de la nuit. Des déchets en attente de traitement et des bornes de mesure de la radioactivité (supposées rassurer) parsèment le triste paysage duquel émerge un semi de rizière entretenu par un désespéré ayant perdu la raison.

Ici, dans la zone réouverte par les autorités à la population après deux ans d’interdiction, la vie n’est qu’une apparence en trompe l’oeil : côté faune les grenouilles se propulsent de plus en plus bizarrement, comme atrophiées, leur nombre de têtards et d’oeufs est en baisse significative et présentent des malformations. Côté flore les sapins ont des malformations similaires, les branches les plus proches du sols ne sont plus ramifiées. Que dire de l’impact sur les humains ?

La population de Minami-Sôma a diminué de 66% depuis l’accident et l’âge moyen des habitants a augmenté de 14 années (un niveau attendu en 2025). Le nombre de personnes âgées qui ont besoin de soins spécialisés a augmenté d’environ 29% en deux ans et demi (statistiques entre février 2011 et mai 2013) alors que la moitié des hôpitaux et des cliniques ont dû fermer et que le nombre de médecins a baissé de 15% et celui des infirmières de 19% . Plus généralement, la population en âge de travailler a baissé de 33% à Minami-Sôma

Un système politico-économique mafieux : préserver le profit plutôt que la population et la vie

Un journaliste d’investigation basé au Japon (Jake Adelstein de Enenews) témoignanit vers la fin 2013 de la nuisance des autorités : « même les politiciens à l’intérieur du parti au pouvoir disent : on ne peut pas nier que l’autre but est de museler la presse, d’enfermer les lanceurs d’alertes, et d’assurer que la catastrophe nucléaire de Fukushima cesse d’être une source d’embarras avant les Jeux olympiques. » D’ailleurs le ministre de la Justice (Masako Mori) a déclaré que les informations relatives au nucléaire seront probablement classées secret.

2011-10-31_corium_metl-through_view.jpgC’est effectivement le meilleur moyen pour le pouvoir et les intérêts du lobby atomiste de faire face à la question des fuites de tonnes d’eau contaminée qui se répandent quotidiennement dans les sols et dans l’océan. « Il semble qu’on ne pourra pas faire cesser les fuites de déchets toxiques, mais la nouvelle législation permettrait à l’administration de colmater l’information sur les fuites de façon permanente. » précise sans retenu le ministre.

La centrale nucléaire de Fukushima continue de déverser dans l’atmosphère, la terre et l’eau ses matières toxiques mortelles qui contaminent donc la chaîne agricole et alimentaire mais il faut que les touristes et les sportifs affluent pour les J.O. Alors quoi de mieux pour museler l’information sur les niveaux de contamination que d’adopter loi et décrets d’Etat et en appeler au blanc-seing des organismes pro-nucléaires des autres pays (tel l’IRSN français).

Les autorités ont aussi modifié à la hausse les niveaux de contaminations dans les aliments et les biens manufacturés histoire de dire à la population et aux consommateurs que tout est dorénavant dans les normes. La France et l’Europe s’en sont fait les complices l’an dernier en validant pour l’ensemble des pays européens une augmentation des limites autorisée de contamination radioactive.

Aussitôt ce qui était hier nocif pour la santé et la vie devient acceptable et commercialisable. Quitte à ce que le nombre de cancers et de morts augmentent à terme. Le patronat est aux anges tout comme les buziness-man aux dents longues. Et aussitôt dit aussitôt fait et même plus. Exemple : les agents des douanes de Vladivostok en Russie extrême-orientale, ont saisi 1,5 tonne de pièces détachées d’automobiles. Elles étaient radioactives et dégageaient un niveau de rayonnement si élevé que l’alerte a été immédiatement déclenchée. La cargaison était arrimée sur un bateau en provenance du Japon. Mondialisation libre et concurrence non-faussée oblige : les ports français et européens accueillent aussi pas mal de produits en provenance du Japon.

Histoire de Shadock : Un utopique mur de glace

2017-03_mur-de-glace.jpgFace au débit de l’eau sur le site, Tepco a dégainé en 2014 un colossal projet de mur de glace. Sur le papier, tout était réglé et évident et les simulateurs électroniques avaient tourné à fond pour en valider l’efficacité : 1 568 tubes d’acier étaient plongées sur 30 mètres de profondeur dans le sous-sol de la centrale et sur un périmètre de 1,4 kilomètre. Alimenté par un liquide réfrigérant à – 30°C, le mur allait former à terme une banquise sous ce "Fukushima-Daiichi Titanic". L’idée était de réduire les rejets de strontium, de césium et de tritium dans la mer en empêchant les eaux d’infiltration provenant de la montagne de gagner le sous-sol des réacteurs qui grossissent les volumes astronomiques d’eau radioactive.

La congélation a démarré en retard en mars 2016, et elle n’est pas encore effective en raison de quelques aspects non envisagés par les experts : des courants d’eau importants et un sous-sol parcouru de canalisations. Fin décembre, la Nuclear Regulation Authority (NRA – Autorité de sûreté japonaise) a reconnu des « effets limités, sinon nuls » du mur de glace. Depuis , face à cette "erreur d’appréciation" malgré les conseils avisés des meilleurs spécialistes mondiaux, Tepco a déclaré qu’au lieu du mur d’eau congelée, ils développaient à présent un type particulier de ciment pour en combler totalement les tranchées. Ils pompaient, pompaient, pompaient...

Une économie d’exploitation de classes

Les travailleurs et les déshérités sont en première ligne dans le jeu sordide des institutions et subissent un racket digne de la maffia. Les sdf et chômeurs sont enrôlés souvent de force pour être envoyés comme « décontaminateurs ». Le lobby sous-traite à tour de bras le recrutement à des sociétés officielles qui font appel à leur tour à des sous-traitants qui font appel, eux aussi, à des sous-traitants qui, à leur tour, font appel à des sous-traitants.

2011-06-27_Japon-manifestation_2.jpgAinsi, un ancien intervenant sur le site de la centrale de Fukushima daï-ichi, embauché par une compagnie au 5ème niveau de sous-traitance, a porté plainte suite à son licenciement en juin denier. A l’embauche, on lui avait dit que le travail serait sans danger ; mais au bout d’un certain temps et il a été exposé à de fortes radiations. Il a donc refusé d’accomplir une tâche pour tenter de se préserver : il a été licencié.
Il ne recevait que 13 000 yens par jour (100 euros), alors que TEPCo payait selon lui 50 000 yens par travailleur. Le reste aurait donc été ponctionné par les couches de sous-traitance. Et il devait en plus payer son hébergement.

A ce jour, 11 mars, proche de la date du début de la quadruple catastrophe perpétrée par le lobby atomiste, du césium radioactif continue de se concentrer dans l’eau tout comme du tritium se retrouve en mer au large de la centrale pour faire le tour de la planète. Les fuites radioactives se poursuivent 6 ans après le début du massacre. Les populations ont leur vie brisée, les enfants pissent la radioactivité dans leurs urines, les travailleurs servent de chaire à canon pour maintenir la domination des adorateurs fanatiques de la secte de la destruction atomique.

Commémoration et rassemblement : On se retrouve ici

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(1) plus de 1 100 énormes réservoirs contenant plus de 961 000 m3 d’eau contaminée (soit un volume dépassant la capacité de 380 piscines olympiques) ont avalé des hectares d’espaces boisés. Tepco a remplacé ceux qui fuyaient par des conteneurs soudés et plus seulement vissés. En effet, chaque jour, entre 200 et 400 m3 d’eau souterraine et de pluie s’infiltrent dans les bâtiments de Fukushima-Daiichi : Tepco pompe quotidiennement environ 300 m3 dans le sous-sol de la centrale qui enfermerait près de 60 000 m3 de liquide très radioactif. Et pour le refroidissement du corium, 286 m3 d’eau fraîche sont injectés quotidiennement dans les trois réacteurs.

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en savoir plus : http://fukushima.eu.org/ . https://www.vivre-apres-fukushima.fr/la-nouvelle-loi-japonaise-sur-le-secret/ . www.criirad.org

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