28 janvie4 2025 | tiré de Révolution permanente
https://www.revolutionpermanente.fr/Submersion-migratoire-Bayrou-reprend-la-rhetorique-du-RN-et-prepare-une-offensive-anti-immigres
Macron avait déjà repris et popularisé des poncifs racistes de l’extrême droite : « ensauvagement », « décivilisation ». Son bras-droit, Gérald Darmanin alors ministre de l’Intérieur avait en 2020 déploré l’« ensauvagement de la société ». Le Premier Ministre François Bayrou, soutien de la première heure du Président, s’essaye désormais à la théorie conspirationniste et suprémaciste du « grand remplacement » en évoquant lundi soir sur LCI une « submersion migratoire » à Mayotte et en France. À l’Assemblée ce mardi, le chef du gouvernement a persisté en précisant qu’il parlait de submersion migratoire à Mayotte, où les Comoriens sont traités en étrangers sur leur archipel, avant d’ajouter « et ce n’est pas le seul endroit en France ». Un discours réitéré qui ne laisse pas le doute quant à la volonté d’assumer cette rhétorique empruntée à l’extrême-droite, que Jean Marie Le Pen avait popularisé en 1989 : « Nous sommes menacés par une vague, une submersion », affirmait-il.
Ces déclarations de Bayrou ont cependant reçu des réponses contradictoires. D’un côté, un secteur de la macronie avait déjà préparé le terrain. Lundi, Le Figaro publie une interview de Maud Bregeon, députée macroniste et ancienne porte-parole du gouvernement Barnier, dans laquelle celle-ci plaide pour remettre sur la table les mesures les plus dures de la loi Immigration. Mardi sur France Info, la députée de la Marne, Laure Miller, a soutenu les propos de Bayrou : « Si vous discutez avec n’importe qui dans la rue, vous verrez qu’il y a ce sentiment de submersion migratoire ». Mais il a également causé quelques remous chez les députés macronistes, du moins sur la forme. « Je n’aurais jamais tenu ces propos et ils me gênent » a ainsi affirmé Yaël Braun-Pivet qui n’a pourtant pas hésité à voter il y a un an la Loi Immigration. « Ce n’était pas le meilleur mot à utiliser », concède un ministre aux journal Les Echos. Bruno Retailleau (Intérieur) et Gérald Darmanin (Justice) se sont sans surprise félicités qu’ils reprennent leurs rhétoriques racistes.
Une offensive qui ouvre une crise avec le PS
Le Parti Socialiste, qui a jusque-là très bien plié pour refuser de censurer le gouvernement Bayrou-Retailleau, a été obligé de réagir à des propos d’un racisme aussi décomplexé, mais qui affleuraient déjà dans la déclaration de politique générale de Bayrou : « L’installation d’une famille étrangère dans un village pyrénéen ou cévenol, c’est un mouvement de générosité qui se déploie […]. Mais que trente familles s’installent et le village se sent menacé. » Les dirigeants du Parti Socialiste ont donc claqué la porte des négociations en cours visant à trouver un accord en vue de la CMP ce jeudi autour du budget 2025.
Désormais, le Parti Socialiste veut faire monter les enchères et parle plus volontiers de censure.Cette sortie aura des « conséquences déflagratoires » a réagi le député PS Laurent Baumel. La menace est plus prégnante encore au sein de de l’entourage d’Olivier Faure : « Le secrétaire général du PS, Pierre Jouvet, la sénatrice socialiste Corinne Narassiguin, son collègue député Arthur Delaporte, ou encore l’eurodéputée Chloé Ridel… Désormais, les menaces des cadres socialistes sont à prendre au pied de la lettre », pointe L’Opinion. Mais si rien n’est gravé dans le marbre, comme l’ont illustré le cirque autour des menaces de censure lors du discours de politique générale, il reste que la tension est remontée d’un cran suite aux propos de Bayrou.
Un accord précaire : la crise politique de retour au premier plan
Cette crise ouverte avec le PS illustre la très relative stabilité de l’accord obtenue par Bayrou. Un coup à « gauche » sur la question du budget et le « conclave » sur les retraites, un coup à droite pour contenter l’aile droite de son gouvernement, Retailleau et les LR. Une stratégie à très haut risque qui vise à tenter d’élargir son socle et de résoudre la quadrature du cercle d’une Assemblée structurellement divisée et instable.
Or cette fois, en voulant consolider son bloc sur la droite et tester le RN qui reste une clé pour une non-censure avec un PS polarisé, Bayrou risque de ruiner le tour de dressage qu’il avait réussi avec les socialistes et se met à la portée d’une censure du RN, comme Barnier. Et l’extrême droite est gourmande et n’a pas tardé à réagir. « Ce que l’on attend de lui, ce sont des actes qui suivent les constats et pour l’instant on a beaucoup de constats et très peu d’actes », a réagi Marine Le Pen au Palais-Bourbon. Pour l’heure, pas d’accord ni avec le PS ni avec le RN.
Une offensive qui présage de l’offensive autoritaire et raciste à venir
Mais la précipitation des macronistes à passer à l’après-budget témoigne de leurs ambitions racistes et sécuritaires. Sentiment d’insécurité, sentiment de « submersion » disent-ils, alors que Retailleau, Darmanin et les médias capitalistes saturent l’espace de discussions plus écœurantes les unes que les autres : violence de mineurs, guerre contre la drogue, restriction de droits délirants pour les prisonniers…
En menant une campagne permanente contre les réfugiés avec ou sans titres de séjour, comme avec la circulaire Retailleau qui veut rendre quasi-impossible la régularisation, les capitalistes préparent des offensives racistes contre toutes les personnes d’origine étrangère. Le « sentiment de submersion » de Bayrou s’arrête au prénom, à la couleur de peau ou à la manière de s’habiller ou de manger, il ne regarde pas la situation administrative.
Dans le monde entier, les partis de l’extrême centre néolibéral, se convertissent ouvertement aux thèses de l’extrême droite. En Allemagne, la démocratie-chrétienne (CDU) est prête à voter avec l’AfD, un parti nostalgique du nazisme, pour déporter des étrangers. En temps de crise, la démocratie capitaliste montre son vrai visage : raciste, policière et profondément anti-ouvrière.
Dans ces conditions, maintenir la « stabilité » d’un tel régime comme s’y engage le Parti Socialiste ou les directions syndicales en trouvant des accords avec le gouvernement pour ne pas le censurer, ou en participant au dialogue social, c’est permettre à ce gouvernement de mener des attaques racistes violentes qui vont s’abattre contre la population d’origine immigrée.
Toutes les oppositions en parole des directions syndicales à la loi immigration de 2024 ne valent rien si celles-ci s’acharnent à sauver le gouvernement qui ne rêve que de pourrir toujours plus la vie des travailleurs immigrés. La lutte contre l’extrême droite, si elle est sincère, doit passer par une lutte décidée contre ce gouvernement, son budget austéritaire et ses lois racistes !
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