Édition du 17 décembre 2024

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Politique québécoise

Plan Nord : Charest nous prépare une nouvelle imposture électorale !

Jean Charest, premier ministre du Québec, Régis Labeaume, le maire de Québec, Clément Gignac, le ministre des ressources naturelles et 25 hommes d’affaires de la région de la Capitale nationale font la visite du Grand Nord québécois pour mousser le Plan Nord. Jean Charest redouble d’efforts pour faire du Plan Nord, l’axe de sa prochaine campagne électorale qui devrait se tenir en 2012.

Le Plan Nord, un projet régressif dans une conjoncture difficile

La construction des grands barrages sur la Manicouagan avait illustré, à l’époque, la mobilisation des savoir-faire de la population québécoise par l’État québécois, afin d’assurer l’entrée du Québec dans un Québec moderne. Il signifiait la prise en main et le développement par le Québec lui-même et pour lui-même suite à la nationalisation de la production de l’électricité.

Le Plan Nord porte un tout autre message. D’ici cinq ans, le gouvernement québécois prévoit investir 2,1 milliards de dollars visant la création d’infrastructures de transport et d’habitation afin de créer les conditions nécessaires à l’exploitation des richesses minières et énergétiques par les entreprises canadiennes et étrangères. Il s’agit d’enfoncer le Québec dans son rôle de producteur de matières premières et d’énergies pour les pays, et particulièrement les États-Unis, qui sauront, eux, s’engager dans les processus industriels et nous renvoyer sous forme de marchandises ce qu’ils auront produit dans leurs entreprises. C’est la logique de la nouvelle frontière à conquérir, des occasions d’affaires juteuses à offrir aux entreprises d’ici et d’ailleurs. Le Plan Nord s’inscrit dans une logique productiviste où une croissance sans fin doit être au rendez-vous. Les développements énergétiques prévus ne planifient aucunement un sérieux tournant vers les énergies renouvelables. Sans compter que tout ce projet veut se réaliser sans qu’on accepte une quelconque négociation de nation à nation reconnaissant les droits ancestraux des populations autochtones et inuits qui habitent ce territoire.

Dans sa tournée de promotion de son Plan Nord à travers le monde, le gouvernement Charest aura rencontré un intérêt pour ce qu’il présentait comme un Eldorado lucratif pour les différentes entreprises, mais en même temps, une retenue évidente face à la crise qui frappe tant l’Europe que les États-Unis. La crise économique en Europe risque de s’approfondir dans les prochains mois. Et la possibilité d’une nouvelle crise financière majeure fait partie des scénarios envisagés par les économistes qui ne sont pas à la solde des banques. Dans un monde particulièrement interdépendant, la crise européenne aura un impact en retour sur les États-Unis et le Canada, et dans une certaine mesure, sur les pays émergents.

Qu’est-ce qui fait courir Jean Charest dans le Nord du Québec ?

Et si Jean Charest est déjà en campagne pour vendre son Plan Nord, c’est qu’il est bien au fait de ces réalités. Le destin politique du PLQ est lié à sa possibilité de vendre son Plan Nord avant que le tout se dégonfle misérablement. Il sait qu’il dispose de quelques mois seulement pour monter son bateau à la population et pour pouvoir présenter son projet de vente des richesses du Québec comme un projet de développement des emplois. Il mise sur l’inquiétude de la population qui voit le secteur manufacturier affaibli par les fermetures d’entreprises. Il cherche à détourner l’attention de cette population alors qu’il favorise le désinvestissement dans les services publics et qu’il soutient la privatisation. La tarification des services publics après avoir baissé les impôts des plus riches, le désinvestissement public à ce niveau au nom de la poursuite du déficit zéro. Le programme du Plan Nord, ce sont les subventions au pillage des minières et autres affairistes et les tarifications en tout genre pour la majorité de la population.

Le projet politique de Charest est assez limpide

 Promettre aux organisations patronales de socialiser les coûts d’exploitation (construction de routes, de ports, fourniture de sources d’énergie à faible coût).

 Donner la parole aux entreprises en s’appuyant sur le contrôle des médias pour présenter son projet de bradage de nos ressources naturelles comme le seul projet d’avenir concret et prometteur d’enrichissement pour le Québec.
 Enrober ce projet de la rhétorique du développement durable.

Et voilà, le paquet sera prêt à être converti en slogans électoraux pour livrer une marchandise toxique présentée comme un avenir radieux.

Un autre projet pour le Québec

La campagne politique de la gauche sociale et politique doit être un moment fort de la lutte contre la privatisation des services publics, contre la hausse des frais de scolarité et pour la gratuité scolaire du primaire à l’université. Elle doit être l’occasion de dire un NON clair à la privatisation rampante du secteur de la santé et au monopole des pharmaceutiques qui font grimper les prix des médicaments et des services de santé. La mise sur pied de Pharma-Québec un pôle public d’acquisition, de recherche et de production de produits pharmaceutiques serait un instrument essentiel à cet égard.

Contre l’approfondissement des écarts dans la distribution de la richesse, la campagne électorale de la gauche politique et sociale doit rejeter la priorité accordée au gouvernement Charest à combler le déficit et proposera une réforme de la fiscalité favorisant une nouvelle redistribution de la richesse, la hausse du salaire minimum et la baisse des heures de travail sans baisse des salaires luttant ainsi contre la pauvreté et le chômage.

Dans les prochaines élections, la gauche sociale et politique pourra proposer, comme Québec solidaire l’avait fait en 2008, un projet économique qui constitue une alternative concrète au projet libéral de braderie du Québec aux affairistes de tout genre.

Ce projet s’articulait autour de grands chantiers écologiques :

 réorienter le financement public vers une véritable politique alternative pour le transport en commun et le transport des marchandises par voie ferrée ;

 faire un tournant vers les énergies renouvelables en nationalisant l’énergie éolienne en fondant la société d’État Éole-Québec et en mettant sur pied une société publique, Énergie-Québec dont le mandat sera de fournir de l’électricité de façon accessible et écologique (hydraulique, éolien, solaire, géothermie, biomasse) à l’ensemble du peuple québécois en partenariat avec les instances démocratiques régionales, locales et autochtones qui tireront profit et autonomie de ce développement ;

 lancer un vaste chantier sur l’efficacité afin de transformer le parc immobilier du Québec pour réduire notre consommation d’énergie et notre production de gaz à effet de serre ;

 adopter une politique de souveraineté alimentaire pour renforcer la cohésion du milieu rural et faire nos propres choix en matière d’alimentation et d’agriculture afin de réaliser nos objectifs sociaux et écologiques

 assurer une gestion publique et écologique des déchets...

Voila, les perspectives tirées des propositions que Québec solidaire a fait à la population du Québec et aux différents mouvements sociaux pour faire face à la droite et construire un véritable front de résistance tant au niveau électoral et que dans les mobilisations sociales.

Bernard Rioux

Militant socialiste depuis le début des années 70, il a été impliqué dans le processus d’unification de la gauche politique. Il a participé à la fondation du Parti de la démocratie socialiste et à celle de l’Union des Forces progressistes. Militant de Québec solidaire, il participe au collectif de Gauche socialiste où il a été longtemps responsable de son site, lagauche.com (maintenant la gauche.ca). Il est un membre fondateur de Presse-toi à gauche.

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