Voilà l’un des constats faits par la présidente de la CSQ, Louise Chabot, dans le mémoire présenté aujourd’hui dans le cadre de la consultation parlementaire sur le projet de loi no 77 visant à modifier la Loi sur l’immigration au Québec.
Un caractère distinct à préserver
Ainsi Louise Chabot rappelle que « les politiques québécoises d’immigration ont toujours fait de la pérennité du fait français l’objectif premier de la stratégie d’immigration. C’est d’ailleurs dans l’optique de préserver le caractère distinct du Québec que les gouvernements québécois successifs ont cherché à récupérer une bonne partie des responsabilités et des pouvoirs liés à l’immigration dans l’actuel partage avec le gouvernement fédéral. À quoi bon récupérer des pouvoirs du fédéral en matière d’immigration si c’est pour canadianiser notre politique d’immigration et harmoniser nos façons de faire avec Ottawa ? », questionne-t-elle.
Responsabilités et obligations de l’État à préciser
Plutôt que de privilégier une déresponsabilisation de l’État québécois en matière de francisation et d’intégration des nouveaux arrivants, comme le fait craindre le projet de loi 77, la Centrale plaide pour que les responsabilités et obligations de l’État en matière de francisation et d’intégration soient précisées davantage, de façon à assurer la pérennité du français. Plus spécifiquement, il faut maintenir la pondération accordée à la connaissance du français dans le processus de sélection des personnes immigrantes.
Dans ce même esprit, la CSQ demande que l’on organise plus de cours de francisation qualifiante à des niveaux de compétence avancés, et que l’on renforce les investissements en francisation.
Des préoccupations légitimes oubliées
La Centrale reconnaît qu’il y a nécessité de revoir la Loi sur l’immigration. En effet, elle est silencieuse sur des enjeux au cœur des préoccupations exprimées par la population, telles que la pérennité du français, l’intégration et le respect des valeurs communes du Québec, ainsi que l’occupation et la vitalité des territoires.
« Malheureusement, les modifications proposées au projet de loi no 77 ne répondent pas à ces préoccupations légitimes. Au contraire, on a plutôt l’impression que le gouvernement s’affaire à dessiner une vaste réforme de l’immigration au Québec n’ayant qu’un seul objectif : répondre aux besoins ponctuels de main-d’œuvre des entreprises », constate Louise Chabot.
Une pénurie de main-d’œuvre questionnable
Cette dernière appelle d’ailleurs le gouvernement à la prudence, mettant en doute le fait que le Québec vivrait une grave pénurie de main-d’œuvre. Elle précise qu’on retrouvait au Québec, en 2014, 41 700 postes vacants pour 340 300 chômeuses et chômeurs, soit un poste pour 8,2 personnes en chômage.
« Alors que des milliers d’adultes attendent une place dans un programme de formation continue au collégial et que les prévisions d’Emploi-Québec concluent que des dizaines de milliers d’emplois nécessitant une formation collégiale devront être comblés au cours des prochaines années, on comprend mal pourquoi on n’améliore pas les possibilités de qualification et de formation pour ces adultes plutôt que d’assouplir les critères linguistiques afin d’attirer davantage d’immigrants », déclare Louise Chabot.
Importance de l’éducation et de la formation
Pour la présidente de la CSQ, c’est une très mauvaise stratégie que d’essayer de répondre aux besoins de main-d’œuvre des entreprises québécoises en misant sur l’immigration plutôt que sur l’éducation et la formation.
« Il faut se doter d’une véritable politique d’éducation aux adultes, notamment en facilitant l’accessibilité financière des adultes à des projets de formation visant à compléter une formation de base ou à se réorienter sur le plan professionnel. Les obstacles sont particulièrement nombreux pour les personnes handicapées, les immigrants, les autochtones et les femmes. De plus, il faut s’appuyer sur la formation continue à l’éducation aux adultes, dont le potentiel est largement sous-exploité », commente Louise Chabot.
Des compressions nuisibles
Malheureusement, les politiques d’austérité encouragées par le gouvernement compliquent la situation. « Difficile d’améliorer l’accessibilité à la formation continue, l’éducation des adultes et la reconnaissance des acquis et compétences en période de compressions budgétaires. De fait, soulignons que les commissions scolaires ont dû subir des compressions de l’ordre de 950 millions de dollars depuis 2010, les cégeps de plus de 155 millions pour la même période alors que les budgets des universités ont été amputés de 273,6 millions depuis 2012 », souligne la présidente de la CSQ.
Renforcer le français comme langue de travail
En terminant, Louise Chabot a fait siennes les inquiétudes manifestées par le Conseil supérieur de la langue française (CSLF) qui, chiffres à l’appui, a démontré que le français recule dans les entreprises au Québec. « Pour la CSQ, ces données sont très préoccupantes et contredisent fortement les tenants d’un relatif équilibre linguistique au Québec, et ce, particulièrement en milieu de travail. Il est donc essentiel de renforcer les dispositions de la Charte de la langue française concernant la langue de travail et que le gouvernement donne suite aux recommandations du Conseil supérieur de la langue française et à nos nombreuses recommandations à ce chapitre », conclut la présidente de la CSQ.