Depuis un mois aujourd’hui, la Colombie est le scénario d’une grève sociale
sans précédent. Chaque jour des milliers de personnes se donnent
rendez-vous dans les rues et sur les routes du pays pour s’opposer aux
politiques du gouvernement. Des politiques qui auront pour conséquence
d’appauvrir davantage la population, dans un pays ou près de la moitié de
celle-ci vit déjà en situation de pauvreté. Les mobilisations dénoncent
aussi la violation systématique des droits humains en Colombie.
Aujourd’hui, à 14h25 heure de Colombie, près de la ville de Cucuta, une
dizaine de militaires des Forces armées colombiennes se sont approchés des
manifestant-e-s qui poursuivent présentement leurs manifestations
légitimes. De plus, des hélicoptères de la police ont survolé les lieux des
manifestations, à l’entrée de la ville de Cucuta juste au-dessus de la
station d’essence Urimaco. Vers 16h heure de Colombie, (17h heure de
Montréal) la police nationale s’est dirigée vers les manifestant·es qui se
trouvent à Urimaco, à l’entrée de Cucuta. On dénombre actuellement une
cinquantaine de policiers à moto.
Selon une source confidentielle et crédible, la dernière information dont
nous disposons (17h45 heure de Montréal) est que le gouvernement aurait
donné l’ordre d’attaquer les manifestants-es.
Deux accompagnateurs-trices québébois-es du PASC, ainsi que d’autres
organismes de défense des droits humains nationaux et internationaux et des
délégués des Nations Unies sont sur place.
Nous craignons pour la sécurité et l’intégrité physique des
manifestants-es. La police nationale ainsi que de l’ESMAD (police
anti-émeute dénoncée pour ses violations répétées des droits humains) sont
à l’origine des violences sanglantes que connaît la Colombie depuis un
mois. Nous demandons à ce que l’armée se retire et tenons l’État comme
responsable des éventuelles agressions contre les manifestant·es qui
exercent leur droit de manifester.
Depuis un mois, le gouvernement refuse d’envisager des solutions sociales
pour dénouer la crise. Il répond en stigmatisant les manifestants.es, en
criminalisant la mobilisation et en militarisant le pays. Le traitement de
guerre à l’encontre des manifestations a été qualifié par des ex-présidents
colombiens et par nombre de congressistes comme des « crimes d’État ».
C’est que, la police tire contre les manifestants.es et contre les
passants.es dans une escalade d’utilisation disproportionnée de la force.
Depuis le début de la grève, la police est accusée d’avoir assassiné au
moins 43 personnes, commis 22 agressions sexuelles et d’avoir détenu 130
personnes qui sont depuis portées disparues.
Cette violence d’État se caractérise par la politique de sécurité nationale
basée sur la doctrine de l’ennemi interne, une logique apparue dans le
contexte de la guerre froide et qui a servi à l’État colombien pour mater
la contestation sociale depuis des décennies. Actuellement, le discours et
la réponse étatique depuis le début de la grève font des mouvements sociaux
le nouvel ennemi interne.
La violence de l’armée et de la police n’est pas seulement le fait de
l’agissement des forces de l’ordre. Le traitement militaire de la
contestation sociale a été ordonné par le président Ivan Duque lui-même et
par son ministre de la Défense Diego Molano, puis relayé par une élite
politique et sociale très riche qui voit ses privilèges menacés et qui
s’indigne devant l’inconfort causé par les blocages de routes des
manifestants.es, à la grandeur du pays. Cette, riche et blanche, qui a
bénéficié trop longtemps de la guerre en Colombie, oublie de dire que les
demandes d’investissement social et de respect des droits humains ont été
formulées pendant des décennies par des ONG et des organismes
internationaux. Si les gens continuent de manifester depuis un mois, malgré
la répression généralisée et soutenue dont ils sont la cible, c’est parce
que c’est leur dernier recours pour se faire entendre.
Le visage politique, social et culturel de la Colombie est en train de
changer aujourd’hui. Les jeunes n’ont plus d’espoir dans le futur ; ces
enfants des 8 millions de déplacés forcés internes, pour qui l’accès à
l’école, à la santé et à une habitation salubre est un privilège, sont
aujourd’hui en pied de lutte. Ils misent tout ce qu’ils ont, y compris
leurs vies, dans la construction d’une société plus juste et inclusive. Ces
jeunes ont joint leurs voix à celles des secteurs sociaux organisés et
mobilisés depuis toujours, notamment les autochtones, les afrodescdendant.es,
les étudiant.es <http://xn--tudiant-9xa.es>
, et les paysan.nes. Ils
affirment être prêts.es <http://xn--prts-hpa.es>
à résister le temps qu’il
faudra pour obtenir gain de cause à leurs revendications légitimes.
Projet accompagnement solidarité Colombie (PASC)
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