Ce rapport montre comment le système économique mondial permet à une élite fortunée d’accumuler d’immenses richesses, tandis que des centaines de millions de personnes peinent à survivre avec un salaire de misère.
Le patrimoine des milliardaires a augmenté en moyenne de 13 % par an depuis 2010, soit six fois plus vite que la rémunération des travailleuses et travailleurs, qui n’a progressé que de 2 % par an en moyenne. Entre mars 2016 et mars 2017, le nombre de milliardaires a augmenté plus rapidement que jamais, à raison d’un nouveau milliardaire tous les deux jours.
Quatre jours suffisent au PDG de l’une des cinq premières marques mondiales de mode pour gagner ce qu’une ouvrière de la confection bangladaise gagnera au cours de sa vie. Aux États-Unis, en à peine plus d’une journée de travail, un PDG gagne autant qu’un simple ouvrier en une année.
Porter les salaires des 2,5 millions d’ouvrières et ouvriers du textile vietnamiens à un niveau décent coûterait 2,2 milliards de dollars par an. Cela équivaut à un tiers des sommes versées aux actionnaires par les cinq plus grands acteurs du secteur de la mode en 2016.
Le rapport d’Oxfam précise les principaux facteurs qui contribuent à accroître les rémunérations des actionnaires et des dirigeant-e-s d’entreprise au détriment du salaire et des conditions de travail : l’érosion des droits des travailleurs, l’influence excessive des grandes entreprises sur les politiques publiques et la constante volonté des entreprises de réduire au minimum les coûts pour maximiser les dividendes des actionnaires.
Pour Winnie Byanyima, directrice générale d’Oxfam International, « le boom des milliardaires n’est pas le signe d’une économie florissante, mais le symptôme d’un système économique défaillant. Les personnes qui fabriquent nos vêtements, assemblent nos téléphones et cultivent notre nourriture sont exploitées pour assurer un approvisionnement continu de produits bon marché et grossir les profits des multinationales et de leurs investisseurs milliardaires. »
Les travailleuses se retrouvent souvent au bas de l’échelle. Partout dans le monde, les femmes gagnent systématiquement moins que les hommes et occupent généralement les types d’emplois les moins rémunérés et les plus précaires. En revanche, 9 milliardaires sur 10 sont des hommes.
« Oxfam a parlé à des femmes du monde entier, dont les inégalités gâchent l’existence, explique Winnie Byanyima. Des ouvrières d’usines de confection, au Vietnam, qui travaillent si loin de chez elles pour gagner un salaire si maigre qu’elles ne peuvent pas voir leurs enfants pendant des mois. Des ouvrières de l’industrie avicole, aux États-Unis, qui sont obligées de porter des couches faute de pouvoir prendre des pauses toilettes. Des employées de l’hôtellerie, au Canada et en République dominicaine, qui taisent le harcèlement sexuel dont elles font l’objet par crainte de perdre leur travail. »
Oxfam appelle les gouvernements à prendre les mesures suivantes, afin que nos économies bénéficient à toutes et tous, et non à quelques privilégié-e-s seulement :
– Limiter la rémunération des actionnaires et des dirigeant-e-s d’entreprise, et garantir aux travailleuses et travailleurs un salaire minimum « vital », permettant une qualité de vie décente. Par exemple, au Nigeria, le salaire minimum légal devrait être triplé pour assurer des conditions de vie décentes.
– Éliminer l’écart salarial entre les femmes et les hommes et protéger les droits des travailleuses. Au rythme où les choses évoluent, il faudra 217 ans pour parvenir à l’égalité de rémunération et des chances professionnelles entre les femmes et les hommes.
– Faire en sorte que les riches paient leur juste part d’impôt en augmentant leur taux d’imposition, en renforçant les mesures de lutte contre l’évasion fiscale et en accroissant les dépenses dans les services publics, comme la santé et l’éducation. Oxfam estime qu’un impôt mondial de 1,5 % sur la fortune des milliardaires pourrait permettre de scolariser tous les enfants.
Les résultats d’une nouvelle enquête mondiale commandée par Oxfam mettent en évidence une vague de soutien en faveur de la lutte contre les inégalités. Au total, 70 000 personnes ont été interrogées dans dix pays. Près des deux tiers pensent qu’il est urgent de réduire le fossé entre les riches et les pauvres.
« Il est difficile de trouver des responsables politiques et des chefs d’entreprise qui affirment ne pas s’inquiéter des inégalités. Il est encore plus difficile d’en trouver qui prennent des mesures pour les combattre. Au contraire, beaucoup aggravent les choses en réduisant les impôts et en affaiblissant les droits du travail, déplore Winnie Byanyima.
« Les citoyennes et citoyens veulent que les choses changent. Ils veulent que les travailleuses et travailleurs soient rémunérés décemment, que les grandes entreprises et les super-riches paient plus d’impôts, que les femmes jouissent des mêmes droits que leurs homologues masculins, qu’il y ait une limite au pouvoir et à la fortune pouvant se concentrer entre si peu de mains. Ils veulent des mesures concrètes. »
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