tiré de : l’INFOLETTRE DE FUGUES - # 612 - 18 avril 2017
Publié le 17 avril 2017 Denis-Daniel Boullé
projet hybris La Chapelle
Qu’importe si son audace est fondée sur une ignorance des sujets qu’Éric Duhaime ose aborder, elles et ils saluent son audace même si elle se fonde sur la vacuité de ces propos. Ce qui est ironique de la part de chroniqueurs qui ne cessent de déplorer le manque de connaissances et de culture de nos contemporains. En somme, faire preuve de stupidité publiquement est salué comme une preuve de courage. Peut-être sont-ils et elles atteint-es du syndrome de trumpisation. À croire qu’il existe un lobby des chroniqueurs qui ne font plus qu’un quand l’un des leurs est vilipendé. Et de nous offrir le spectacle de la « victimisation » de celles et ceux qui penseraient autrement, cette fameuse victimisation dont elles et ils traitent souvent les Québécois-es.
Être chroniqueur, c’est aussi susciter la polémique. À distribuer des coups, ils et elles font toujours les étonné-es quand ils et elles en reçoivent. Un peu comme des pyromanes, qui crieraient « Bobo ! Ça brûle » quand un retour de flammes viendrait les brûler.
Ces mêmes chroniqueur-euses ne cessent de tirer sur les communautés LGBTQ. Une cible facile qui, lorsqu’elles se défendent, passent, à la toute fin, par des plaintes devant les tribunaux. Pas d’attentats, pas de fatwas. On peut taper sur nos communautés sans risquer de se retrouver au fond du Saint-Laurent, les pieds dans un bloc de béton. Je ne sais d’où leur vient cette obsession quasi maladive d’un fameux lobby LGBTQ, expression qui fleurit sur tous les sites occidentaux d’extrême droite. Et ils et elles colportent sans questionnement, sans même un minimum de recul, les clichés les plus éculés sur nos communautés, ce qui trahit en fin de compte, une petite crotte d’homophobie et de transphobie encore bien accrochée à leurs nombreuses certitudes. Ils et elles viennent de connaître une épiphanie, avec un animateur gai, qui va dans le même sens qu’eux, et même plus loin. Je comprends qu’ils se portent à sa défense.
J’ai toujours pensé que la bêtise était l’ignorance érigée en idéal. On ne va pas au-delà des apparences. Au contraire, on s’accroche à elles, et elles deviennent des certitudes intangibles, immuables et immanentes. Nos chroniqueur-euses n’ont pas le goût d’aller voir au delà des apparences. .
Comme j’aimerais les inviter à passer quelques jours avec moi pour découvrir les communautés LGBTQ. Une longue promenade tranquille à la rencontre de la diversité, des responsables d’organismes, des bénévoles, mais aussi des LGBTQ lambda dans le Village, autour d’un café. Comme j’aimerais qu’elles et ils assistent à une intervention d’un GRIS dans une école secondaire. Comme j’aimerais qu’elles et ils viennent un mardi soir au Centre communautaire rencontrer l’ATQ, et des personnes trans, qui ne feront jamais la une des journaux, ni un talk show du dimanche soir. Comme j’aimerais qu’elles et ils rencontrent des membres d’associations sportives, de la Coalition des familles homoparentales, de l’association des parents d’enfants trans, ou des personnes séropositives, ou des prostitué-es. Pas pour parler théorie, pas pour parler si c’est bien ou non, pas pour délirer sur un possible ou non effondrement de la civilisation, mais pour rencontrer des personnes, en chair et en os. Les écouter, les entendre et partager avec elles. Une descente de leur perchoir confortable pour aller sur le terrain.
Elles et ils découvriraient que les réalités LGBTQ n’ont rien à voir avec leurs conceptions, qu’il n’y a ni programme, ni petit livre rouge, ni gourou, ni rien de tout cela. Ils se rendraient compte que ce sont des communautés bien plus hétérogènes qu’elles et ils le pensent. Elles et ils percevraient les nuances, les contradictions et surtout que c’est un peu plus complexe que les simples réductions caricaturales qu’elles et ils véhiculent par leur propos.
L’invitation est lancée à Éric Duhaisme (qui a besoin d’une session de rattrapage), à Denise Bombardier, à Sophie Durocher, à Richard Martineau, à Mathieu Bock-côté, à Lise Ravary et à d’autres. Ces chantres du populisme ne verraient pas leurs certitudes obsolètes s’écrouler mais peut-être se fissureraient-elles un peu. Et qui sait si un peu d’humanité n’entrerait pas par ces brèches.
Dernière mise à jour le 17 avril 2017
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