Rappelons d’abord que le RQIC, qui représente l’ensemble des organisations syndicales du Québec ainsi que nombre d’organisations de la société civile, n’a pas été invité à présenter son point de vue lors de l’adoption du projet de loi C-30 par la Chambre des communes. Le RQIC se réjouit de pouvoir présenter son analyse cette semaine puisque les travaux du Sénat constituent la dernière étape avant l’entrée en vigueur de l’AÉCG prévue pour le 1er juillet, laquelle demeure conditionnelle à l’adoption de l’entente par la quarantaine de législations européennes concernée.
Un peu plus tôt en avril, la signature de l’Accord de libre-change canadien, interprovincial, a permis aux gouvernements provinciaux et fédéral de préparer le terrain à l’AÉCG en offrant aux entreprises canadiennes les droits accordés par l’AÉCG aux entreprises européennes. Le RQIC veut saisir l’occasion des auditions pour alerter le Comité sénatorial sur les effets importants qu’aura cet accord sur le Canada et le Québec.
Des pouvoirs démesurés accordés aux grandes entreprises
L’AÉCG menace les services publics et les droits économiques et sociaux des citoyennes et citoyens en accordant le droit aux entreprises de poursuivre les gouvernements provinciaux et fédéral et de contester les mesures légitimes et non discriminatoires qu’ils adoptent pour protéger les droits des peuples et l’environnement. Comme nous l’indiquons dans le mémoire, l’AÉCG met en place « un système juridique parallèle qui permet aux investisseurs de contourner les cours de justice existantes ».
D’une instance d’arbitrage qu’on retrouvait dans certains accords précédents, l’AÉCG passe à une véritable cour parallèle de justice au service des entreprises. Rappelons qu’à ce jour, le bilan sur ce plan de l’ALÉNA est de 37 poursuites contre le Canada, accompagnées de 200 millions de $ CAN en pénalités. Les affaires en cours sont évaluées à environ 2,5 milliards de $ CAN.
Un accord qui n’a rien de progressiste
L’AÉCG n’est pas un accord progressiste. Les dispositions sur les droits du travail et sur le développement durable ne peuvent être appliquées de façon contraignante et efficace au moyen de sanctions et elles sont sans effet sur les dangers que les autres chapitres de l’accord posent aux droits des travailleurs, à la protection de l’environnement et aux mesures visant à atténuer le changement climatique.
Des impacts négatifs sur les services publics, la santé, l’agriculture et la culture, notamment
Le mémoire que le RQIC a soumis au Comité sénatorial (disponible sur le site du RQIC) soutient que l’AÉCG menace gravement les services publics. L’effet cliquet (ratchet) et l’effet statu quo (standstill) sont particulièrement problématiques. L’effet cliquet empêche le retour en arrière lorsqu’un service est privatisé ou une norme a été éliminée, et ce, même si le résultat est catastrophique. L’effet statu quo fait en sorte que l’on ne peut réglementer davantage un secteur ou rapatrier en régie interne un service qui ne l’est pas au moment où l’accord est adopté. Ces deux effets favorisent la privatisation et lient les mains des gouvernements futurs.
De plus, l’augmentation des années de protection de brevets pour des nouveaux médicaments fera en sorte que les médicaments génériques, beaucoup moins chers prendront beaucoup plus longtemps à arriver sur le marché. Les experts évaluent le délai entre 2 et 3 ans supplémentaires, ce qui veut dire de 2 à 3 milliards de plus annuellement pour le système de santé canadien.
Par ailleurs, la délégation du RQIC insistera aussi sur un aspect important peu abordé dans le débat public : il s’agit des effets de l’AÉCG sur la culture. Celle-ci a été négociée chapitre par chapitre, alors qu’il aurait fallu exiger une exemption généralisée. Le secteur du livre, par exemple, a été mal protégé, ce qui pourrait éventuelle affecter la promotion d’auteurs québécois.
Un devoir d’information
Avec la conjoncture de remise en question de l’ALÉNA, l’intervention du RQIC auprès du Comité sénatorial est d’autant plus importante que l’on tente de faire passer les opposants aux accords de libre-échange du type AÉCG pour des protectionnistes irréalistes qui rêvent d’isoler le pays du monde. Or, rien n’est plus faux ! Ce que le conteste a plutôt à voir avec un déni de démocratie et la perte de souveraineté que les États s’apprêtent à avaliser en mettant en œuvre l’AÉCG.
C’est pourquoi, en plus du mémoire, le RQIC rend disponible un court document qui déboulonne les mythes de l’AÉCG. Conçu par ATTAC-Québec, en collaboration avec le RQIC, il présente la réalité de cet accord sous forme de questions VRAI ou FAUX basées sur les affirmations du gouvernement canadien.
Un message, un commentaire ?