Ce que craignaient plus que tout les trois grands partis était une abstention massive aux élections générales en Israël, mardi 10 février, qui aurait fait le jeu des trente (!) autres listes. Pourtant, malgré la pluie et le désintérêt qui avait caractérisé la campagne électorale, le taux de participation a été un peu plus élevé que la fois précédente : 65 %.
Trois caractéristiques résument le résultat de ces quinzièmes élections au Parlement de l’État hébreu .Le parti Kadima, au pouvoir depuis qu’Ariel Sharon a quitté le Likoud, maintient ses positions, passant de 28 députés à 29. Le Likoud, qui avait connu une défaite majeure lors du dernier scrutin, récupère son électorat : il passe de 12 à 27. Les travaillistes s’écrasent littéralement, tombant de dix-neuf (ce qui était déjà un mauvais résultat) à treize députés. Ils obtiennent un score inférieur à celui de la droite fascisante d’Avigdor Lieberman, le parti Israël Beitenou (quinze députés). Si l’on ajoute les partis religieux, la droite est clairement majoritaire à la Knesset : 65 députés, la minorité étant composée de la « gauche » (seize sièges), du centre (28) et des partis arabes (onze).
Ayant obtenu le plus grand nombre d’élus, c’est à Tzipi Livni, dirigeante de Kadima, que Shimon Pérès, le président de l’État, demandera de constituer un gouvernement. Ses chances d’y parvenir sont pourtant très réduites, dès lors qu’elle doit faire face à un bloc de droite majoritaire. Parions donc qu’après de longues et sordides tractations, nous verrons se constituer un gouvernement large autour du Likoud et de Kadima, auquel se joindra, bien évidemment, le Parti travailliste. Ehud Barak, qui n’ignorait pas la défaite annoncée de son parti, revendiquait le ministère de la Défense et non le poste de Premier ministre : avec un résultat aussi bas, il devra sans doute se contenter d’un ministère moins prestigieux.
Il est important de rappeler qu’en Israël, depuis 40 ans, le concept d’alternance n’existe pas, la norme étant une coalition gouvernementale aussi large que possible, les élections se réduisant à une consultation déterminant qui formera le gouvernement et prendra sa tête. C’est ainsi que même le Meretz (gauche travailliste), tombé de dix à trois députés en six ans, n’exclut pas l’éventualité de se retrouver dans un gouvernement mené par Tzipi Livni pour, dit-il, y équilibrer le poids de la droite fascisante de Lieberman…
Quant aux programmes politiques, rien ne différencie, sur le fond, Livni, Nétanyahou et Barak : la colonisation va se poursuivre ; les rencontres, vides de contenu, avec Mahmoud Abbas également ; le plan de paix de la Ligue arabe continuera également à être rejeté. Si, finalement, c’est Nétanyahou qui devient Premier ministre, il y aura un peu moins de double langage. Il restera toujours le président de l’État, Shimon Pérès, pour le tenir. ■
De Jérusalem, Michel Warschawski