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L’opposition obtient habituellement un score d’environ 55 à 60 % aux législatives, mais d’environ 40 % aux élections locales. Le fait que, cette fois, l’opposition ait recueilli 57 % des voix, contre 41 % pour les partis pro-Pékin, constitue indéniablement une grande victoire.
Victoire électorale écrasante
Celle-ci est encore plus importante en termes de sièges. Les partis pan-démocrates ont remporté 388 sièges au total, soit une augmentation de 263 sièges par rapport aux dernières élections locales, tandis que les partis pro-Pékin ont perdu 240 sièges, ne conservant que 59 sièges.
La popularité du camp pan-démocrate avait été déjà constatée dans quelques sondages avant les élections : 83 % de la population rejetait la responsabilité de la violence sur le gouvernement, alors que seulement 40 % pensaient que c’était également la faute des manifestantEs.
Pourtant, personne n’avait imaginé que les pan-démocrates pourraient gagner des élections locales avec une aussi large marge, surtout à un moment où les éléments radicaux du mouvement commençaient à décliner.
Plus de deux millions de personnes mobilisées
Pendant la semaine précédant les élections, la police a assiégé l’université Polytechnique occupée par des manifestantEs. Malgré le refus de plusieurs dizaines de manifestantEs de se rendre, peu de choses pouvaient être faites par les occupantEs et leurs partisanEs à l’extérieur. La plupart des manifestantEs se sont progressivement rendus et ont été arrêtés. CertainEs sont toutefois parvenus à s’échapper.
La victoire électorale ne peut que renforcer le moral de l’opposition. Il est encourageant de constater à ce propos que, dès le lendemain de leur élection, plus de soixante nouveaux et nouvelles éluEs se sont rendus à l’entrée de l’université Polytechnique pour exprimer leur solidarité avec les manifestantEs qui s’y cachaient encore, et pour rendre hommage à leur contribution au mouvement. La police est finalement entrée sur le campus le 28 novembre, mais sans procéder à de nouvelles arrestations.
Ces élections locales constituent en fait la deuxième grande victoire de l’opposition. La précédente, le 4 septembre, avait été de contraindre le gouvernement de Carrie Lam à annoncer le retrait du projet de loi d’extradition.
Avec ces deux victoires majeures, un nouveau type de militantisme pourrait émerger de ce mouvement sans précédent à Hong Kong. Par comparaison, le « mouvement des parapluies » de 2014 avait été totalement vaincu, et il avait été suivi d’une longue période de démoralisation parmi les militantEs. Avec plus de deux millions de personnes mobilisées, le mouvement a maintenant l’occasion de tirer les leçons de ses expériences passées.
Vers une troisième victoire ?
Au moins cinq tentatives d’appel à la grève générale ont eu lieu. Seule celle du 5 août a été couronnée de succès, paralysant pratiquement la moitié de la ville. Il s’agissait de la première grève générale depuis des décennies et elle a démontré à la population le pouvoir du monde du travail.
Des jeunes militantEs ont émergé qui prennent conscience de l’importance des luttes ouvrières, et appellent à rejoindre les syndicats existants ou à en former de nouveaux.
Ce qui est unique dans ce récent processus de syndicalisation, c’est qu’il est fondamentalement décentralisé. Il repose en effet sur l’auto-organisation et est impulsé par des personnes assez peu connues. Il se constitue par le biais de messageries en ligne comme Telegram, plutôt qu’à l’initiative d’organisations déjà implantées sur les lieux de travail.
Reste à voir dans quelle mesure cette campagne de syndicalisation pourra se consolider et être efficace. L’appel d’un jeune fonctionnaire à former un nouveau syndicat d’employéEs de la Fonction publique a rencontré un très vif écho : d’après les médias, des centaines de fonctionnaires se sont syndiqués.
Pour la première fois à Hong Kong, les idéaux de démocratie et d’autonomie s’enracinent dans l’esprit de millions de salariéEs. Ceci devrait en soi constituer une troisième grande victoire de ce mouvement.
Au Loong Yu, Hong Kong le 30 novembre 2019
Traduction de l’anglais par Dominique Lerouge
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