En assemblée générale, le 6 avril, le conseil central a résolu de développer un plan de lutte pour promouvoir la campagne du salaire minimum à 15 $. « Cette proposition donne tout son sens au mot solidarité et permet de lutter pour les travailleuses et les travailleurs les plus précaires, dont certains sont syndiqués et pourtant loin du 15 $ l’heure, des femmes surtout. Celles qui travaillent dans les centres d’hébergement privés sont un bon exemple », a lancé la présidente du conseil central, Dominique Daigneault.
$15 Now !
Cette campagne a pris son essor en 2012, notamment à Seattle sous l’impulsion de Socialist Alternative et de la conseillère municipale Kshama Sawant. Elle a rapidement gagné de très larges appuis [1]. Depuis, la campagne $15 Now ! accumule les victoires. Après Seattle, ce fut New York, Chicago, Portland, Los Angeles, San Francisco et plusieurs autres villes américaines. En mars, la Californie annonçait qu’elle hausserait le salaire minimum à 15 $ d’ici 2022. C’est le premier État américain à adopter une telle mesure et l’État de New York emboîtait le pas quelques jours plus tard.
Le Canada n’est pas en reste : cette revendication a eu des échos en Colombie-Britannique et en Ontario, notamment, dans la région de Toronto, où elle connaît beaucoup de succès. Le Workers’ Action Centre fait campagne auprès des travailleuses et travailleurs syndiqués et non syndiqués pour de meilleurs salaires, de bonnes conditions de travail et pour le respect. Mais jusqu’à présent, seul le gouvernement néo-démocrate de Rachel Notley, en Alberta, s’y est engagé d’ici 2018.
Les forces s’organisent
Au Québec, plusieurs organismes sont aussi de cette lutte. Le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTI) a été parmi les premiers à énoncer cette revendication. Pour le CTI, elle doit s’accompagner d’une amélioration des conditions de vie et de travail des personnes, notamment celles à l’emploi d’agences de placement temporaire ou aide familiale, et ce, peu importe leur statut d’immigration. [2]
Plus récemment, l’organisme Au bas de l’échelle, qui œuvre auprès des travailleuses et travailleurs non syndiqués, l’a fait sienne. « Une hausse du salaire minimum est un déterminant important de la société et une façon efficace de lutter contre la pauvreté. Elle a notamment un effet de levier sur l’échelle salariale de 20 % de la main d’œuvre du Québec et particulièrement de 25 % de la main-d’œuvre féminine », note Mélanie Gauvin, la représentante de l’organisme qui était présente à la dernière assemblée du conseil central.
Au tour des organisations syndicales de joindre le mouvement. Pour Dominique Daigneault, participer à cette campagne auprès des groupes communautaires alliés revêt une importance capitale. « On l’a dit souvent ces dernières années, le mouvement syndical doit se renouveler et cela passe aussi par sa capacité à mobiliser l’ensemble des travailleuses et des travailleurs, syndiqués ou non. C’est la raison pour laquelle nous allons nous tenir aux côtés des personnes précaires non syndiquées – les travailleurs d’agences et les travailleurs migrants notamment – et bien sûr, auprès de nos membres aussi. »
Au Québec et ailleurs dans le monde, on observe une forte croissance des inégalités et une augmentation du nombre de travailleurs pauvres, parmi lesquels un fort contingent de femmes. Tous des phénomènes que la campagne $15 Now ! met davantage en lumière. Malgré un taux de syndicalisation plus qu’enviable à près de 39 %, le Québec ne fait pas exception. Travailler à temps plein ne permet plus de « joindre les deux bouts » pour plusieurs, y compris pour les personnes syndiquées. Pour contrer cette tendance et empêcher que la pauvreté et la précarité ne gagnent encore plus de terrain, même dans ses rangs, le mouvement syndical doit s’engager dans la campagne pour la hausse du salaire minimum à 15 $ l’heure. Sa force d’attraction en dépend ainsi que sa capacité de mobiliser l’ensemble des travailleuses et travailleurs.